« Personne n’apparaît en mesure, aujourd’hui, d’affirmer quelles seront les recettes de la Contribution sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) pour chaque collectivité. Nous sommes dans le flou le plus total », résume Gaëtan Huet, consultant à Partenaires Finances Locales. Dans ce contexte, l’Etat, loin de rassurer les acteurs locaux, s’inquiète aujourd’hui du coût que pourrait représenter, in fine, une réforme conçue notamment pour alléger les finances publiques.
Facture alourdie pour l’Etat
Rédigée dans le plus grande hâte, la réforme de la Taxe professionnelle avait subi, l’an dernier, un premier accroc, de taille, pour ce qui est de son coût pour le budget de l’Etat. Les sénateurs étaient parvenus, lors de l’examen du PLF pour 2010, à rendre progressive la CVAE, de 0% à 1, 5% pour les entreprises dont le chiffre d’affaires est inférieur à 50 millions d’euros. Un dégrèvement qui représente une dépense de plus de 4 milliards d’euros !
L’économie demeurait néanmoins importante pour l’Etat, puisque ce dernier s’acquittait de dégrèvements atteignant 11,5 milliards d’euros au titre de l’ancienne TP.
Mais l’annulation par le Conseil constitutionnel de la taxe carbone, dont la prévision de rendement s’établissait à 1,9 milliard d’euros, puis l’annulation par le même Conseil du dispositif initialement prévu pour les bénéfices non commerciaux (BNC), dont la prévision de rendement était de 780 millions d’euros, sont venus alourdir la facture dont devra s’acquitter l’Etat…
Au total, le coût de la réforme pourrait être compris entre 7 milliards d’euros – évaluation découlant des éléments transmis par le Gouvernement – et 8 milliards d’euros, soit près de deux fois le coût de 3,9 milliards d’euros initialement prévu, indique Gilles Carrez dans le rapport relatif au 4è collectif budgétaire pour 2010, en cours d’examen.
Des risques d’évasion fiscale
Pour les territoires, l’inquiétude provient des risques de pertes de recettes liées à la nouvelle assiette de l’impôt économique local.
Les débats portent, actuellement, au sein des deux chambres, sur les clés de répartition de la valeur ajoutée, à un double niveau.
Lundi 6 décembre, le Sénat est revenu sur la clé de répartition de la valeur ajoutée des entreprises multisites. Les sénateurs ont adopté une nouvelle clé de « territorialisation » de la CVAE, établie pour deux tiers au prorata des effectifs, et pour un tiers au prorata des valeurs locatives foncières. « Foncières » et non « industrielles », comme l’avaient souhaité les députés.
Autre cheval de bataille, la consolidation de la valeur ajoutée au niveau du groupe pour les sociétés filialisées, afin d’éviter des tours de passe-passe aboutissant à une optimisation fiscale s’exerçant au détriment des collectivités territoriales.
Ainsi, alors que le gouvernement avait obtenu, in extremis, en première lecture, l’annulation d’un article prévoyant une telle consolidation, les sénateurs, via le PLF, et les députés via le PLFR, tentent de le rétablir.
Mardi soir 7 décembre, L’AdCF se félicitait de l’amendement adopté par le Sénat, « considérant que les réorganisations juridiques des groupes doivent être neutres sur le rendement de la nouvelle CVAE mais aussi sur sa répartition territoriale. C’est la stabilité de la nouvelle assiette pour les collectivités mais aussi la pertinence de sa répartition entre les territoires d’accueil des entreprises qui sont en jeu », concluait l’Assemblée des communautés de France.