Quel tableau brossez-vous du projet de loi de réforme des collectivités avant la commission mixte paritaire ?
Je partage le sentiment général : la montagne accouche d’une souris. Au moment où elle a été votée en seconde lecture, les présidents de l’Assemblée nationale et du Sénat (Bernard Accoyer et Gérard Larcher, tous deux UMP, NDLR) ont même dit que cette réforme était inapplicable. Pour ma part, je considère que ce texte n’est pas à la hauteur de ses ambitions.
L’article sur les compétences, par exemple, n’apporte pas la clarification nécessaire. Comment expliquez-vous l’ensablement du texte ?
Les dés sont pipés depuis la suppression de la taxe professionnelle et la mise à mal de l’autonomie des collectivités. Les réformes fiscale et territoriale auraient dû être menées de pair. Au lieu de cela, les considérations électorales focalisent tous les débats depuis le lancement du comité « Balladur », en octobre 2008. Par conséquent, les mesures en faveur de l’intercommunalité dans le projet de modernisation de la démocratie locale (Modeloc), arrêtées peu avant cette date, ne sont toujours pas entrées en vigueur. Leur adoption dépend de celle du conseiller territorial, alors même qu’elles n’ont jamais provoqué de controverse.
Les maires ruraux s’opposent de plus en plus à cette partie du texte…
Nous sommes victimes de la crise. Ces périodes difficiles suscitent toujours des formes de repli, sur la commune en l’occurrence. Tout ceci se sent dans certaines positions récentes de l’Association des maires de France (AMF) qui, à l’origine, avait fait preuve d’ouverture et avec qui nous avions été heureux de défendre des positions communes.
Comment peut se traduire ce raidissement lors du débat au Parlement ?
Le refus, contre l’avis du gouvernement, d’octroyer au conseil communautaire des communautés de communes le droit de définir l’intérêt communautaire est la manifestation de ce conservatisme. Ce mode de fonctionnement marche pourtant très bien dans les communautés d’agglomération comme la mienne. Aucun maire ne le conteste. Le généraliser à toutes les catégories n’était pas follement révolutionnaire. Cela allait simplement dans le sens des objectifs de simplification et de rationalisation affichés par le gouvernement.
De quelle manière abordez-vous le chantier de la rationalisation de la carte de l’intercommunalité ?
Il faut, à mon sens, le voir sous l’angle non pas des institutions et des élus, mais du citoyen qui habite une commune, travaille dans une deuxième et pratique ses loisirs dans une troisième. Notre mode d’organisation territoriale doit épouser l’évolution réelle du pays et les nouvelles façons de vivre.
Le projet de loi répond-il cette exigence ?
La grande question, celle des échelons qui doivent être consolidés et monter en puissance, n’est pas traitée. Selon moi, il s’agit de l’intercommunalité et de la région, ce qui ne signifie pas que je suis favorable à la suppression de la commune et du département.
La montée en puissance de l’intercommunalité ne passe-t-elle pas par une élection au suffrage universel direct sur tout le territoire communautaire ?
Le fléchage des conseillers communautaires, à l’occasion des municipales, est une première et petite étape. L’élection au suffrage universel direct des intercommunalités me paraît inéluctable. Elle devra s’inscrire dans une vision d’ensemble. Pourquoi ne pas imaginer que le département soit composé uniquement de représentants des communautés et devienne le Sénat de l’intercommunalité ?
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