Une métropole du Grand Paris compétente en matière d’habitat, d’aides financières au logement, de schéma de cohérence territoriale, des établissements publics de territoires en charge de l’élaboration du plan local d’urbanisme, mais sans compétence propre en matière d’habitat, qui vont cependant se voir rattachés les offices publics de l’habitat, une région qui va élaborer un schéma régional de l’habitat et de l’hébergement…
Difficile de s’y retrouver dans ce maquis, d’autant qu’un certain nombre de compétences sont liées à l’adoption du plan métropolitain de l’habitat et de l’hébergement, celui-ci ne pouvant être adopté avant le 1er janvier 2017, puisque la compétence habitat ne sera transférée qu’à cette date. Les centres de recherche du Gridauh et du Serdeaut, co-organisateurs du colloque, ont d’ailleurs produite une étude éclairante sur le sujet.
Une réforme avant tout territoriale
La raison de cette complexité, et de certaines incongruités, réside dans le fait que les lois Maptam et Notre, dont sont issues ces réformes, sont avant tout des lois de réforme territoriale, et l’habitat n’est qu’une compétence parmi d’autres.
Le ministère du logement et ses services centraux n’ont pas été vraiment associés aux discussions autour du texte. Aujourd’hui de nombreuses questions interrogent élus et professionnels.
« La loi Alur a rendu les intercommunalités compétentes en matière d’habitat, et a prévu que l’outil de de cette politique, l’office public de l’habitat, soit rattaché à l’intercommunalité, ce qui était cohérent. En revanche, pour le Grand Paris, prévoir le rattachement des offices, qui restent fondamentalement municipaux, du fait de la répartition de leur patrimoine, aux établissements publics de territoires, qui n’ont pas la compétence habitat, pose beaucoup de questions », soulève Alain Cacheux, le président de la Fédération des offices publics de l’habitat.
Plus de cohérence qu’il n’y parait
Antoine Valbon, directeur général des services de l’agglomération Seine Amont, est plus modéré : « les EPT ayant la compétence d’élaboration des PLU, et de l’aménagement, ce sont eux qui vont définir le cadre général des projets de construction ».
Par ailleurs, « au 1er janvier 2016 les plus gros morceaux de la compétence habitat, aujourd’hui aux mains des intercos, vont être transférés aux EPT. Ce n’est qu’à la fin de la période transitoire, au plus tard le 31 décembre 2017, que la métropole deviendra compétente : les EPT ont donc deux ans pour faire leur preuve en la matière », estime Yann Ludmann, sous-directeur des politiques de l’habitat à la Direction de l’habitat, de l’urbanisme et des paysages au ministère du logement.
D’autant que ceux qui disposent d’un quartier en politique de la ville devront installer une conférence intercommunale du logement, élaborer un plan partenarial de gestion de la demande de logement social… Autant d’obligations très opérationnelles et liées à la politique de l’habitat.
Luc André Jaxel Truer, représentant la mission de préfiguration du Grand Paris, a quant à lui fait remarquer qu’il fallait distinguer la compétence juridique de la compétence opérationnelle de la métropole : « quand la métropole va élaborer son programme métropolitain de l’habitat et de l’hébergement, elle ne va pas réinterroger les programmes locaux de l’habitat déjà existants, elle va déjà essayer de remplir les trous, aller voir les territoires qui n’en sont pas munis ».
Antoine Valbon a cependant rappelé que la compétence métropolitaine en matière d’habitat est à l’origine liée à la nécessité d’établir une meilleure répartition de la construction de logements sur l’ensemble du territoire métropolitain, ce que ne permettrait pas une compétence confiée aux EPT.
Fusion, transformation, quel avenir pour les OPH ?
Le rattachement aux EPT des offices publics de l’habitat plutôt qu’aux communes inquiète aussi, et depuis plusieurs mois : l’office est intimement lié à la commune, la majeure partie de son patrimoine est généralement sur sa commune de rattachement. En quoi ce changement de tutelle peut-il modifier la donne ?
Rappelons que la loi Notre a prévu que le conseil d’administration de l’office serait composé de 50% de représentants de la commune, ce qui garantit à celle-ci de garder la main sur son outil. Certains ont cependant essayé de trouver une parade, et tentent de transformer leur office en société d’économie mixte de construction, ce qui leur permettrait d’échapper au rattachement à l’EPT.
Les difficultés techniques de l’exercice sont nombreuses, et Alain Cacheux, le président de la fédération des offices, souhaite que des directives soient données aux préfets pour limiter les transformations.
Le rattachement des offices aux EPT pourrait induire un autre effet, celui à terme d’une fusion des établissements. Alain Cacheux reste dubitatif : « la fusion des OPH va prendre du temps. La réalité de leur patrimoine fait qu’ils vont rester très longtemps municipaux. On peut imaginer la mise en commun de certains moyens, des collaborations, mais leur autonomie va encore durer quelques années ».
La réalité de ces compétences va se construire en marchant, durant les deux années de la période de transition. Mais pour le préfet François Lucas, directeur de la missions de préfiguration du Grand Paris, « il faut dès maintenant bâtir un cadre d’action pour le logement, car il y a une grande attente des citoyens. C’est une dernière chance avant la recentralisation de la politique du logement : les élus ont intérêt collectivement à trouver des solutions, et à produire des résultats. »
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