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Entretien avec Frédéric Tiberghien, rapporteur général de la section du rapport et des études du Conseil d’Etat

Publié le 11/06/2010 • Par Anne-Katell Peton Jean-Marc Joannès • dans : France

Après avoir consacré en 2009 son rapport annuel au droit du logement, le Conseil d’Etat se penche en 2010 sur la question sensible de l’eau. Dans un entretien avec Frédéric Tiberghien, rapporteur général de la section du rapport et des études du Conseil d'Etat, nous revenons sur les principaux enseignements de son rapport.

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Gestion de l’eau : « Une épure théorique parfaite mal appliquée »

Pourquoi avoir choisi le thème de l’eau pour votre rapport annuel ?

Divers motifs d’actualité justifient ce choix : les nombreuses condamnations de la France par la CJUE pour transposition ou application imparfaites des directives communautaires ; l’obligation imposée par la Commission de soumettre à la concurrence, à compter de 2011, l’attribution des concessions hydroélectriques; l’incidence de la loi Sapin sur la durée des délégations de service public (jurisprudence « commune d’Ollivet » de 2009) ; la reprise en régie de la distribution de l’eau par quelques grandes villes ; l’incidence des pollutions diffuses d’origine agricole avec les algues vertes en Bretagne… En outre, le prochain Forum mondial de l’eau se tiendra en France à Marseille en 2012 et nous tenions à éclairer certains de ses débats, celui sur le droit à l’eau et à l’assainissement notamment.

Quel regard portez-vous sur le service public de l’eau ?

Grâce aux collectivités territoriales, 99 % de la population, y compris dans les campagnes, sont raccordés aux réseaux d’eau potable depuis la fin du XXe siècle. Dans l’ensemble, l’eau potable est de qualité et présente un bon rapport qualité-prix. Mais la situation de l’assainissement est moins brillante. En outre, un dixième des départements se révèle structurellement en pénurie et l’on s’achemine partout vers des tensions plus grandes sur la ressource en eau. Pour relever ce défi, Etat et collectivités territoriales devraient s’équiper dès maintenant pour mieux mesurer et gérer les quantités impliquées dans les différents cycles de l’eau.

Le rapport décrit un droit de l’eau « complexe » et « baroque ». Pour autant, vous trouvez pertinent le modèle français de gestion…

Le droit de l’eau résulte de préoccupations qui ont varié selon les époques et d’une stratification. D’où cet éclatement du droit, des institutions, des organisations, des procédures…et leur complexité et enchevêtrement. La France a néanmoins dessiné un modèle efficace de gestion de l’eau dans les années 1960, avec des agences par bassin qui gèrent la ressource unique, un financement par l’usager, des responsabilités locales et le libre choix du mode de gestion par les collectivités. L’épure théorique parfaite n’a jamais été complètement appliquée : l’Etat n’est pas allé au bout de ses choix et a cédé devant les intérêts corporatistes.

L’existence de trois services publics différents – l’eau potable, l’assainissement et les eaux pluviales – est-elle justifiée ?

Ces 3 services distincts traitent les mêmes eaux à un moment différent : ils n’ont pas le même régime juridique et sont souvent gérés par des acteurs différents et selon des modes de gestion différents. Il faudrait tendre à une unification de leur régime juridique et en faire 3 SPIC. Cela suppose de pouvoir donner une valeur économique aux eaux pluviales et de les tarifier. L’utilisation et la gestion des eaux pluviales sont un sujet d’avenir pour les élus locaux : la mise en place des infrastructures et les choix sont structurants pour un siècle. L’organisation actuelle, trop éclatée et complexe, ne peut pas aboutir à des résultats éblouissants. Un projet de loi favorisant le regroupement de ces services par plaques géographiques cohérentes et la simplification est nécessaire.

Le rapport privilégie-t-il la gestion en délégation ou en régie ?

Les deux modes de gestion peuvent être performants ou décevants. Si la loi impose des remises en cause périodiques et fixe des durées maximales pour la DSP, la réciproque n’est pas vraie pour la régie : il parait déséquilibré que l’on puisse rester en régie de manière indéfinie, sans rendre de compte sur ce choix. Pour pouvoir se prononcer sur le meilleur mode de gestion, il faudrait disposer d’indicateurs communs, ce qui n’est pas encore le cas. Dans ces conditions, le choix du mode de gestion doit être réversible. Et il convient de lever les freins juridiques et fiscaux (statut du personnel, TVA, taxe locale, la fiscalité et le droit social, les régimes de retraite) à cette réversibilité.

Le prix de l’eau est-il vraiment plus cher lorsque le service public est délégué ?

Légèrement plus cher mais l’écart se resserre. Jusqu’en l’an 2000, le prix de l’eau avait tendance à augmenter plus vite que l’inflation. C’était justifié car les normes de qualité ont été relevées par l’UE. La loi Sapin, en favorisant des renégociations plus fréquentes, a eu pour effet de casser la hausse ininterrompue des prix. Chaque fois que la collectivité renégocie, c’est avec un objectif prioritaire de réduction du prix, en direction de l’usager électeur.

L’exploitation en régie est-elle moins performante ?

Dans la régie, l’élu local, qui fixe le tarif, répugne à augmenter le prix et sacrifie l’investissement. Ses règles financières et comptables sont également moins contraignantes et privilégient le court terme. Les élus qui privilégient la régie mettent en avant le caractère social de la fourniture d’eau, ce qui se défend.

Quelle est la législation en matière d’arrêtés anti coupures ?

Ils sont généralement annulés par le juge. Couper l’eau pour impayé est contraire à l’idée d’un droit fondamental d’accès à l’eau. La législation ne prévoit rien pour prévenir l’impayé d’eau. Si cela concerne peu d’usagers, il y a là un débat politique : soit la collectivité finance cette charge par l’impôt, soit elle organise un transfert social ; soit elle fait payer les autres usagers, réflexe français. Il n’appartient pas au Conseil d’Etat de trancher ce débat politique. Une proposition de loi en cours d’examen devrait bientôt apporter la réponse attendue.

Quelles sont vos préconisations en matière de tarification sociale ?

La France promeut au plan international l’idée qu’il existe un droit d’accès à l’eau et à l’assainissement. Mais elle oublie d’appliquer chez elle ce qui en est le corollaire : une tarification sociale ou l’aide à la prise en charge de la facture d’eau avant la survenance d’un impayé. La liberté des communes est très grande et une tarification sociale est possible depuis 2010. Par ailleurs, il convient d’introduire dans les conventions de délégation et l’organisation des régies une obligation de fournir gratuitement une offre spécifique pour les sans-abri, en liaison avec le milieu associatif

Tous les outils juridiques, notamment les plans de prévention, sont-ils utilisés ?

Les élus ont une responsabilité en matière de sécurité et de salubrité publiques. Mais ils considèrent qu’ils assurent avant tout une mission de développement économique et de l’emploi. Certains refusent pour cette raison de se laisser brider par des contraintes urbanistiques qui empêcheraient l’implantation d’activités ou de logements en zones inondables. La population n’est pas forcement hostile à ce raisonnement de court terme : il revient moins cher de construire en zone inondable et les représentants de l’État, responsables de l’élaboration des PPRN, n’affichent pas toujours la fermeté nécessaire vis-à-vis des élus locaux et des intérêts en jeu. En outre, le régime d’assurance CATNAT est déresponsabilisant : il doit être réformé pour pénaliser l’investissement dans les zones dangereuses. Entre Etat, élus locaux et citoyens, il n’existe pas de vision partagée. « Xynthia » a tragiquement confirmé la pertinence de ces analyses.

Que faut-il attendre du Grenelle II ?

La Charte de l’environnement et les textes issus du Grenelle de l’environnement inaugurent sans doute une rupture juridique. Ils renforcent les droits des citoyens et constitutionnalisent les grands principes du droit de l’environnement. Ils auront des conséquences à long terme sur la gestion de l’eau. Si la loi Grenelle II est essentiellement technique, il faut la replacer dans cet ensemble. L’association du public à la préparation des décisions et à l’élaboration de la norme va s’accroître, ce qui permettra un meilleur débat démocratique et une meilleure préparation des projets par l’administration.

Avez-vous disposé de toutes les données nécessaires sur la consommation, l’état des réseaux et les politiques de tarification ?

Pour mener une politique publique informée et l’évaluer, l’État a besoin de bases de données fiables. Or, comme nous l’avions déjà relevé l’année dernière pour le logement, l’État reste mal outillé. Pour l’eau dans les tuyaux (petit cycle de l’eau), l’information est dans l’ensemble disponible. Elle reste lacunaire pour le grand cycle de l’eau. Depuis la création de l’ONEMA en 2006, cette nécessité fondamentale a été prise en compte mais il faudra attendre jusqu’à fin 2012 pour avoir une vue d’ensemble.

La diversité des acteurs de l‘eau complique-t-elle le regroupement des données ?

Notre organisation est extrêmement dispersée et les niveaux de responsabilité sont nombreux. Les 35 000 opérateurs définissent et structurent leurs données en fonction de leurs propres besoins. Leur agrégation est d’autant plus difficile qu’il existe plusieurs catégories d’eau, plus ou moins bien appréhendées. Les données relatives aux eaux souterraines sont plus difficiles à recueillir que celles portant sur l’eau des rivières ou l’eau potable. Mesurer la quantité ou la qualité des eaux pluviales n’est pas facile non plus.

Comment s’articule le droit communautaire de l’eau avec le droit français ?

La directive-cadre de 2000 a abandonné l’approche par catégories d’eau au profit d’une approche nouvelle et intégrée, imposant des objectifs à atteindre et une obligation de compte rendu. Elle pousse les États membres à simplifier leur droit et leur organisation: plus ils sont fragmentés, plus il leur est difficile d’atteindre les objectifs communautaires. La France qui ne les a guère modifiés éprouve ainsi des difficultés à appliquer les règles communautaires. C’est notamment pourquoi elle a été souvent poursuivie et condamnée.

L’application du principe communautaire « pollueur payeur » est-elle satisfaisante ?

Faire payer à celui qui pollue la remise en état est au fondement de la responsabilité environnementale. D’après la loi de 1964, les agences de l’eau devaient être financées par des redevances, qui n’étaient ni des redevances pour service rendu ni des impositions, assises sur les prélèvements et sur la détérioration de la qualité de l’eau. Mais en 1982, prenant le contre-pied de la jurisprudence du Conseil d’Etat, le Conseil constitutionnel a assimilé ces redevances, sui generis, à des impositions. En outre, les agriculteurs ont fait en sorte que ce principe ne leur soit pas appliqué et les élus locaux ont limité son application aux communes. La loi de décembre 2006 ayant entériné l’assimilation des redevances des agences à des impositions votées par le Parlement, il subsiste un grand écart entre la constitutionnalisation du principe pollueur- payeur par la Charte de l’environnement et sa mise en pratique : nous ne disposons ni des outils juridiques flexibles pour mettre en œuvre ce principe, ni de la volonté politique de le faire. Le rapport préconise néanmoins que le principe pollueur payeur soit appliqué à l’agriculture et mieux appliqué à l’assainissement : à défaut, le droit de l’eau souffre d’incohérence. C’est une réalité devant laquelle tout le monde recule, y compris les agences de l’eau.

A l’heure où est débattue la réforme des collectivités locales, faut-il aussi réformer les institutions en charge de l’eau ?

Que la gestion du petit cycle de l’eau soit locale est cohérent : ressource locale rime avec responsabilité et prix locaux. Mais beaucoup de petites communes ne s’en sortent pas bien : captages nombreux et non protégés, incidents liés à des pollutions accidentelles ou diffuses… Elles manquent de compétence technique et de capacité d’investissement. Elles n’ont plus la taille critique suffisante pour gérer le service des eaux et de l’assainissement.

Au plan national, les réseaux ne sont pas renouvelés à un rythme suffisant. Si, dans les grandes villes, beaucoup de régies fonctionnent bien, les petits réseaux ruraux ne sont pas en bon état. Il faut simplifier le paysage, inciter au regroupement notamment au niveau des syndicats intercommunaux ou des intercommunalités.

Les élus sont-ils assez ou trop présents dans la gestion de l’eau ?

Les élus maîtrisent très bien les sujets liés au petit cycle de l’eau. Mais les agences de l’eau notent leur vision trop locale : la culture du grand cycle de l’eau leur fait souvent défaut. Les agences devraient davantage diffuser cette culture de la gestion globale de la ressource incluant les notions de qualité, d’équilibre à long terme, son substrat économique et environnemental, les risques d’inondation et de sécheresse… L’élu – c’est difficile – doit faire le lien entre tous ces aspects : les pollutions et les périls environnementaux, les inondations et les PPRN, l’eau potable, l’assainissement collectif et non collectif, l’urbanisme, la protection des zones humides, l’aménagement et l’entretien des voies d’eau… La performance d’ensemble n’est pas à la hauteur de l’implication des élus.

La police de l’eau et le volet pénal du droit de l’eau sont-ils bien appliqués ?

La police de l’eau illustre le décalage entre le droit et son application. Il existe autant de polices que de législations ; ce ne sont pas les mêmes agents qui constatent les infractions ; les sanctions sont douces et rarement mises en œuvre. Nous recommandons des simplifications radicales.
Le droit de l’eau n’est pratiquement pas sanctionné pénalement. La faiblesse du volet répressif serait sans inconvénient s’il existait par ailleurs une éducation au respect de l’environnement et des outils d’incitation économique efficaces du type pollueur payeur. Mais ce n’est pas le cas. La société française vit toujours dans l’idée fausse que polluer ou dégrader l’eau n’est pas un acte grave. C’est cet état d’esprit qu’il faut changer.

Références

« L’eau et son droit », Considérations générales du rapport annuel 2010 du Conseil d’Etat, Documentation française.

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CAUPIN ENALIOP

13/01/2011 05h38

J’ai bien noté les remarques du rédacteur sur l’indifférence avec laquelle les eaux sont polluées sans risques par ses utilisateurs. Les solutions peuvent passer par le traitement à la source des flux pollués, avec des options plus faciles à réaliser pour recirculer les volumes dans le même procédé traité. Il faut pour cela un système physico chimique rapide. HJC

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