La notion de diversité, qui a investi le discours politique et les politiques publiques depuis plusieurs années, est indéniablement abstraite et difficile à traiter concrètement dans un pays attaché au principe de la méritocratie républicaine. Les politiques de lutte contre les discriminations contribuent à faire reculer l’exclusion, mais elles doivent aussi agir positivement pour que la société retrouve cette mobilité qui est au cœur du pacte républicain et de sa promesse d’égalité. En d’autres termes, pour le service public, il s’agit de faire en sorte que l’administration soit plus représentative de ses administrés.
Il est certes indispensable de développer des politiques qui contribuent à lutter contre les discriminations, et le département de Seine-Saint-Denis s’est attaché à en impulser de nouvelles dans le domaine de l’éducation et de l’emploi notamment. Mais, il est tout aussi important d’agir sur l’organisation administrative elle-même, afin de la rendre plus perméable à la diversité. C’est le sens de la candidature du département au label Diversité, la première candidature d’une collectivité départementale.
Un instrument d’attractivité – Le label Diversité, en tant qu’il certifie que la collectivité assure l’égalité de traitement dans tous ses actes en matière de recrutement et de gestion des ressources humaines, est l’estampille de l’exemplarité. Cependant, il ne produit pas mécaniquement de la diversité, mais apporte seulement une garantie de vertu de la collectivité. Il peut même être, à l’extrême, la justification absolue de la reproduction sociale qu’il prétend justement enrayer et combattre en vertu de l’idéal d’une société pleinement démocratique. C’est seulement si le label Diversité, notamment par la communication qui en est faite et la volonté qui l’anime, devient un instrument d’attractivité pour la collectivité et au service d’une diversification effective des profils et des candidatures qu’il peut réaliser, à terme, son objectif.
Pour la Seine-Saint-Denis, faire du label Diversité l’emblème d’une gestion exemplaire des ressources humaines, c’est aussi lutter contre les phénomènes d’autocensure et inciter les jeunes diplômés de ce département, si divers mais aussi si défavorisé et stigmatisé, à présenter leur candidature aux postes ouverts par la collectivité. C’est s’efforcer de favoriser une plus grande adéquation entre la population et sa représentation à tous les niveaux de l’administration locale, qui correspond non seulement à un souci de justice mais aussi à un enjeu de dynamisme de l’administration : les études sociologiques montrent qu’au sein d’une organisation la diversité est plus productive que l’homogénéité. C’est aussi pour cela que le label est un enjeu de diversification des profils, afin que l’ENA et l’INET – qui forment des administrateurs de grande qualité, mais dont la diversité sociale, et donc la vitalité, s’est asséchée, comme le montrent toutes les études à ce sujet – ne soient plus les seules voies d’accès aux responsabilités. De ce point de vue, je réitère ma position sur ces deux écoles qui doivent non seulement fusionner – dans la perspective de la réforme territoriale –, mais encore dont le système de recrutement par concours doit aussi évoluer vers des modalités alternatives d’intégration des élèves. Pour réussir à promouvoir la diversité dans l’administration, il faut faire en sorte que chacun puisse avoir les mêmes chances d’y accéder, du Chêne-Pointu à Clichy-sous-Bois à la Montagne Sainte-Geneviève…
La candidature du département de Seine-Saint-Denis au label Diversité revêt, dans le même esprit, une dimension volontariste. Il ne s’agit pas de se donner « bonne conscience » et de continuer sous l’égide d’une parfaite égalité de traitement à justifier l’endogamie du recrutement, mais bien d’en faire un levier de changement, pour réellement donner toute sa place à la diversité dans l’administration.
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