Concilier liberté d’expression et respect de l’ordre public et de la personne humaine, c’est là l’enjeu de l’ancienne jurisprudence « Benjamin » (1), qui prévoit que seule l’existence de risques de graves troubles à l’ordre public induits par la manifestation ou le spectacle, et l’impossibilité de prévenir ces troubles par des mesures de police appropriées, moins attentatoires aux libertés que l’interdiction, peuvent justifier un arrêté préfectoral ou municipal d’interdiction d’un spectacle.
La circulaire du 6 janvier 2014 du ministre de l’Intérieur, qui vise spécifiquement les spectacles de l’humoriste Dieudonné, rappelle ce cadre légal, et en précise les termes.
Elle indique notamment qu’en l’espèce le grave trouble à l’ordre public peut être constitué par le fait que des spectacles ont déjà donné lieu à des infractions pénales, qui ne sont pas des dérapages ponctuels mais des faits délibérés et réitérés.
Interdiction trop générale – Enfin les infractions en cause sont liées à des propos ou des scènes susceptibles d’affecter le respect dû à la dignité de la personne humaine. Le trouble à l’ordre public serait donc constitué par le spectacle lui-même, et non classiquement par des manifestations causées par le spectacle.
Mais cette interprétation peut revenir à interdire de façon générale les spectacles de l’humoriste ; or on sait que les mesures de police doivent être limitées dans le temps et dans l’espace.
On attend donc avec impatience les décisions des juges saisis en référé liberté à Bordeaux et à Nantes, pris en étau entre pression politique et médiatique.
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