Dans les turbulences depuis l’ouverture à la concurrence du marché de la formation en 2009, l’Afpa « avait perdu le Nord » et « 20 % de son activité », mais « cela aurait pu être pire », estime Yves Barou, nommé fin juin pour remettre à flot l’association de 9 300 salariés. La disparition de l’Afpa – 160 000 stagiaires formés en 2011, dont 92 000 demandeurs d’emploi –, est « impensable », selon son président.
Défaut de gouvernance – L’association a accusé un déficit de 53 millions d’euros en 2011 et prévoit 75 millions d’euros de pertes en 2012. Elle était en juin au bord de la cessation de paiement. Les déboires de son principal financeur, Dexia, et une crise de gouvernance interne n’ont rien arrangé. Les ex-président et directeur général, en guerre, sont partis.
M. Barou s’applique à recruter un DG de confiance. Depuis son arrivée, 50 millions de créances ont été recouvrés, « de l’air jusqu’à la fin d’année ».
Recapitalisation nécessaire – L’ex-DG adjoint de Thalès a présenté lundi à la presse et au conseil d’administration sa stratégie, avant son plan définitif mi-novembre. Après six décennies « en mode subvention », « l’Afpa a besoin de fonds propres comme toute entreprise » et « doit investir », a-t-il estimé. « Il n’y aura pas de scénario grec pour l’Afpa », « pas de cure d’austérité », « pas de découpage », a-t-il promis.
L’Afpa demandera en octobre à ses partenaires, « nationaux et régionaux », une « recapitalisation ». « L’ordre de grandeur (environ 200 millions d’euros de titres obligataires, dit la presse) n’est pas idiot », selon M. Barou.
Pour redevenir « l’opérateur de référence », l’Afpa a, selon lui, des « atouts » : son « savoir-faire » (280 métiers enseignés) et son « maillage national » (216 centres). Le réseau sera « simplifié » mais « pas détruit » et l’offre de formation rendue « plus souple » car « nous devrons être plus compétitifs », a-t-il dit, notamment dans les appels d’offre pour les salariés victimes de plans sociaux. « En Rhône-Alpes, en Picardie ou en Lorraine », a cité le président.
« Nous n’allons pas avoir dans chaque ville, chaque centre Afpa qui offre chaque formation. En Paca par exemple, 130 formations sont disponibles, sur les 280 existantes », a-t-il encore expliqué.
Les régions au pilotage pour la formation des chômeurs – Si tous les départs en retraite ne seront pas remplacés dans les fonctions administratives, M. Barou espère pouvoir augmenter le nombre de formateurs en CDI et recréer un « corps de formateurs itinérants » quand l’Afpa emploie 1 000 CDD.
Pour former les chômeurs, il prône un système « régulé » par les régions pour « fluidifier » un système aberrant avec d’un côté les chômeurs qui « attendent », de l’autre des centres Afpa « sous-utilisés ».
Entre 2009 et 2011, on observe ainsi « une baisse de 56 % du taux de remplissage des formations industrielles ». Et début juillet 2012, moins d’un tiers des formations Afpa pour le second semestre étaient réservées.
Changer les règles du jeu – En interne, un vent nouveau semble souffler. Les syndicats, hostiles au plan de la direction précédente, approuvent les grandes orientations, mais restent prudents.
« On a un président optimiste qui croit à l’Afpa et veut la refonder sur ses fondamentaux, c’est tant mieux », estime Alain Guillemot (CFDT). « Des idées nous plaisent », commente Jacques Coudsi (CGT) qui attend d’en savoir plus sur « la compétitivité » prônée et les « partenariats » envisagés pour gérer l’hébergement et la restauration des stagiaires.
« La nouvelle direction a beaucoup d’ambitions mais tant que l’on ne changera pas les règles du jeu, l’Afpa restera dans une situation difficile », souligne le représentant CGT.
Le gouvernement répète son attachement à l’Afpa, que la précédente majorité « souhaitait voir disparaître », selon le ministre délégué à la Formation professionnelle Thierry Repentin.
Mais « on tarde à voir la concrétisation », s’inquiète M. Guillemot, « il ne suffit pas de dire qu’on aime l’Afpa, les vrais choix s’apprécieront aux gestes ».