Connue pour ses rapports souvent critiques sur la gestion des deniers publics, la Cour des comptes, qui célèbre lundi 5 novembre le bicentenaire de sa création par Napoléon 1er, a depuis longtemps élargi son champ d’action au-delà des seuls comptes de l’Etat.
La mission la plus ancienne de la Cour est de veiller au « bon emploi » des fonds publics : non seulement au respect des règles et des objectifs fixés par le pouvoir mais aussi à l’efficacité de la dépense.
Les 650 personnes employées par la Cour, dont 122 conseillers maîtres et 78 conseillers référendaires, sont compétents pour gérer un millier de comptes au total.
Ils devraient prochainement pouvoir en ajouter un autre, des plus symboliques : la présidence de la République, dont Nicolas Sarkozy s’est engagé à faire contrôler le budget par la Cour des comptes, une première.
Avec la LOLF (nouvelle architecture des lois de finances) entrée en vigueur en 2006, et la loi sur le financement de la Sécurité sociale de 2005, la Cour est également tenue de certifier les comptes de l’Etat et de la Sécu, comme un commissaire aux comptes le ferait pour une entreprise.
Elle a en outre vocation à contrôler et conseiller le gouvernement, en réalisant chaque année un rapport sur l’exécution du budget et en fournissant un diagnostic global des finances publiques aux parlementaires avant le débat d’orientation budgétaire.
« Aujourd’hui, la Cour des comptes est à la fois une cour de justice indépendante dans un Etat de droit et l’assistante du Parlement et du gouvernement dans une démocratie politique », résume Philippe Séguin, son premier président depuis 2004, évoquant « une étonnante synthèse qui paraît défier le principe constitutionnel de la séparation des pouvoirs ».
En tant que cour de justice, dont les magistrats sont inamovibles, la Cour dispose en effet d’un pouvoir de sanction direct sur les « comptables publics », qu’elle peut contraindre à reverser les sommes indûment payées. Elle peut aussi infliger des amendes et saisir d’autres juridictions en cas d’irrégularités.
Mais l’un de ses principaux pouvoirs, que Philippe Séguin s’est efforcé de renforcer et d’étendre à tous les secteurs de la société, réside dans son rôle d’information du public. Déficits en tous genres, comité d’entreprise d’EDF, dispositifs d’hébergement des SDF ou de lutte contre l’alcoolisme, centre de rétention pour les étrangers, urgences médicales… tous ont subi les foudres des magistrats de la Cour cette année.
L’une des faiblesses – réelle ou supposée – de la Cour reposait sur le fait que peu de ses avis seraient suivis d’effet, une défaillance que Philippe Séguin affirme vouloir réduire : « J’ai veillé à ce que l’institution se préoccupe plus que par le passé de la suite donnée à ses avis avec maintenant un deuxième rapport annuel, concomitant au premier, qui fait le bilan des suites réservées à ses recommandations ».
Sous l’influence de son président, la Cour semble plus que jamais décidée à persister dans son rôle de « poil à gratter » des institutions, comme elle l’a montré récemment en reprochant aux exonérations sur les stock-options de « plomber » les comptes de la Sécu. Résultat, les députés ont voté fin octobre des contributions patronales en la matière. Une victoire incontestable pour cette « vieille dame » dont on s’est longtemps plaint que les recommandations restent lettre morte.
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