L’envol du taux de rĂ©munĂ©ration du Livret A qui devrait atteindre 4% en fĂ©vrier, son plus haut niveau depuis plus de 20 ans, risque fort d’ĂŞtre freinĂ© par le gouvernement car il renchĂ©rirait automatiquement le financement du logement social.
La hausse thĂ©orique Ă 4%, contre 3% actuellement, s’explique par l’accĂ©lĂ©ration de l’inflation et l’augmentation des taux d’intĂ©rĂŞt auxquels les banques se prĂŞtent entre elles. Ces derniers sont sous forte pression en raison de la crise des crĂ©dits hypothĂ©caires amĂ©ricains Ă risque, les « subprimes ».
Depuis 2003, l’actualisation du taux au 1er aoĂ»t et au 1er fĂ©vrier de chaque annĂ©e rĂ©sulte d’une moyenne entre l’inflation hors tabac et l’Euribor 3 mois (taux interbancaire), majorĂ©e de 0,25 point.
Pour le mois de dĂ©cembre, l’Insee a annoncĂ© le 15 janvier une inflation hors tabac de 2,46% sur un an, tandis que la moyenne de l’Euribor s’Ă©tablissait Ă 4,857%. MajorĂ© de 0,25 point, le calcul de l’AFP fait ressortir un taux de 3,9%, arrondi Ă 4%.
Le dispositif prévoit que la Banque de France fasse les calculs le 15 janvier puis les transmette dans un délai de quatre jours au directeur du Trésor.
Selon les textes officiels, ce mĂ©canisme automatique peut ĂŞtre remis en cause si la « Banque de France estime que des circonstances exceptionnelles justifient une dĂ©rogation ».
Cette annĂ©e, « il est possible que la Banque de France fasse Ă©tat de circonstances exceptionnelles Ă l’heure actuelle sur les marchĂ©s » financiers, a expliquĂ© un conseiller de Christine Lagarde, confirmant des propos tenus par la ministre de l’Economie elle-mĂŞme en dĂ©cembre.
Le niveau de rémunération du Livret A, détenu par 45 millions de Français, a en effet des conséquences sur le financement du logement social.
Ses encours, centralisés par la Caisse des Dépôts (CDC), permettent de financer des prêts à long terme aux organismes du logement social, et toute hausse de son taux renchérit le coût de leurs crédits.
Le rapport de Michel Camdessus sur la rĂ©forme de la distribution du Livret A, remis en dĂ©cembre au gouvernement, prĂ©conise que sa rĂ©munĂ©ration soit « limitĂ©e au niveau le plus raisonnable possible ».
« Aujourd’hui, un quart de point d’augmentation de la rĂ©munĂ©ration coĂ»te 500 millions d’euros annuels aux ‘fonds d’Ă©pargne’ en charge du financement des HLM », selon le rapport de l’ancien gouverneur de la Banque de France.
Michel Camdessus s’est d’ailleurs prononcĂ© contre un relèvement du taux de ce produit d’Ă©pargne dĂ©fiscalisĂ©, dans un entretien au Monde datĂ© du 16 janvier.
« L’Euribor (…) est en ce moment très Ă©levĂ© du fait de la crise des crĂ©dits immobiliers Ă risque. Maintenir cette règle reviendrait Ă faire payer aux plus pauvres en France les bĂŞtises des subprimes aux Etats-Unis! », a-t-il estimĂ©.
L’ex-directeur gĂ©nĂ©ral du Fonds monĂ©taire international dĂ©fend un nouveau mode de calcul qui ne prendrait pas en compte la majoration de 0,25 point et qui remplacerait l’Euribor par l’Eonia, un autre taux interbancaire moins volatil.
En outre, un rendement de 4% pourrait avoir des consĂ©quences sur le dĂ©veloppement des contrats d’assurance-vie, garantis en euros dont la rĂ©munĂ©ration, après prĂ©lèvements sociaux, se situe en moyenne entre 3,8% et 4%, selon les professionnels.
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