RĂ©ponse du ministère de la Justice : Depuis l’entrĂ©e en vigueur du code pĂ©nal le 1er mars 1994, la condamnation pĂ©nale d’un Ă©lu n’entraĂ®ne plus son inĂ©ligibilitĂ© de façon automatique.
Afin d’Ă©carter des fonctions Ă©lectives les personnes qui, par les infractions qu’elles ont commises, ne remplissent plus les conditions de moralitĂ© essentielles Ă l’exercice d’un mandat public, la juridiction est en effet tenue d’assortir expressĂ©ment la condamnation d’une peine complĂ©mentaire d’interdiction des droits civiques, civils et de famille, telle que prĂ©vue par l’article 131-26 du code pĂ©nal (CP).
Parmi les droits susceptibles d’ĂŞtre interdits, figurent notamment le droit de vote, le droit de tĂ©moigner en justice et l’Ă©ligibilitĂ©.
Dans sa dĂ©cision, la juridiction pĂ©nale peut prononcer l’interdiction de tout ou partie des droits mentionnĂ©s dans cet article, pour une durĂ©e qui ne peut excĂ©der dix ans en cas de condamnation pour crime et cinq ans en cas de condamnation pour dĂ©lit.
L’article 131-26-1 du CP, issu de la loi n° 2013-907 du 11 octobre 2013 relative Ă la transparence de la vie publique prĂ©voit toutefois que lorsque la loi le prĂ©cise, dans l’hypothèse d’une condamnation d’une personne exerçant une fonction de membre du Gouvernement ou un mandat Ă©lectif public au moment des faits, la durĂ©e maximale de la peine complĂ©mentaire d’inĂ©ligibilitĂ© encourue est portĂ©e Ă dix ans en cas de condamnation pour dĂ©lit.
La loi n° 2017-1339 du 15 septembre 2017 pour la confiance dans la vie politique a renforcĂ© l’exigence de probitĂ© des candidats aux Ă©lections politiques en insĂ©rant dans le code pĂ©nal, un nouvel article 131-26-2 qui pose le principe du prononcĂ© obligatoire de la peine complĂ©mentaire d’inĂ©ligibilitĂ© pour certains dĂ©lits mentionnĂ©s Ă cet article.
La circulaire de prĂ©sentation de ces nouvelles dispositions en date du 21 septembre 2017 prĂ©cise que cette peine doit ĂŞtre prononcĂ©e expressĂ©ment par le juge, Ă qui il revient d’en fixer la durĂ©e, dans la limite des durĂ©es maximales encourues prĂ©vues par les mĂŞmes articles 131-26 et 131-26-1 du CP.
Par une dĂ©cision spĂ©cialement motivĂ©e, le juge peut toutefois Ă©carter expressĂ©ment le prononcĂ© de cette peine en considĂ©ration des circonstances de l’infraction ou de la personnalitĂ© de son auteur.
Si le principe de lĂ©galitĂ© criminelle interdit au juge d’aggraver de quelque manière que ce soit la rĂ©pression prĂ©vue par la loi, il lui appartient, dans les limites fixĂ©es par la loi de dĂ©terminer la nature, le quantum et le rĂ©gime des peines prononcĂ©es en fonction des circonstances de l’infraction, de la personnalitĂ© de son auteur, et de sa situation matĂ©rielle, familiale et sociale, conformĂ©ment aux finalitĂ©s et fonctions de la peine Ă©noncĂ©es Ă l’article 130-1 et 132-1 du CP.
Dès lors, le juge peut, sans mĂ©connaĂ®tre le principe d’Ă©galitĂ© des citoyens devant la loi, en diminuer le quantum, Ă©carter certaines d’entre elles ou les assortir de diverses modalitĂ©s prĂ©vues par la loi. En revanche, l’inĂ©ligibilitĂ© Ă©tant attachĂ©e Ă une personne et non Ă une fonction Ă©lective, il n’appartient pas au juge de dĂ©terminer l’Ă©tendue de la mesure d’inĂ©ligibilitĂ©, notamment en la cantonnant Ă un mandat en particulier.
ConformĂ©ment aux articles 131-10 du CP et 471 du code de procĂ©dure pĂ©nale (CPP), cette peine peut ĂŞtre assortie de l’exĂ©cution provisoire permettant de la rendre immĂ©diatement exĂ©cutoire, nonobstant toute voie de recours.
Sur ce point, le Conseil constitutionnel a de nouveau rĂ©cemment jugĂ© que cette peine complĂ©mentaire, ainsi que ses effets diffĂ©renciĂ©s en fonction du type de mandat exercĂ©, n’Ă©taient pas contraires au principe d’Ă©galitĂ© devant la loi.
Il juge en effet que cette diffĂ©rence de traitement entre un mandat municipal et un mandat parlementaire repose sur la nature distincte des mandats locaux et nationaux, et l’existence de procĂ©dures de dĂ©chĂ©ance diffĂ©rentes (Cons. Const. 2013-326 QPC du 5 juillet 2013, Cons. Const. 2017-753 QPC du 8 septembre 2017, Cons. Const., 28 mars 2025, n° 2025-1129).
Références
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