Echangeons des milliers de normes réglementaires, franco-françaises pour l’essentiel, parfois absurdes, souvent obsolètes et dont l’efficacité n’est généralement pas évaluée, contre le nombre de votre choix de normes qui sont volontaires dans 99 % des cas, totalement euro-compatibles pour 90 % d’entre elles et régulièrement mises à jour par les acteurs eux-mêmes !
Cet été, le sommet de l’Etat – comme à chaque début de quinquennat – a rouvert la chasse aux normes réglementaires. Tout nouveau texte réglementaire devrait désormais être compensé par la suppression de deux textes existants. La règle proposée part d’une bonne intention, mais elle est trop timide.
Les collectivités ne cessent de stigmatiser des lois et règlements exagérément détaillés. Ces textes peinent à être appliqués, car ils ignorent les spécificités locales en prétendant habiller chaque collectivité avec le même costume rigide.
Or, depuis plus de trente ans, les directives européennes estampillées « nouvelle approche » prescrivent des exigences essentielles (donc non détaillées) face aux enjeux de sécurité ou de santé publique. Elles renvoient, à travers la normalisation volontaire européenne, au « droit souple » la mission de décrire les conditions de mise en œuvre des exigences essentielles. Ces normes sont alors produites par un consensus entre les acteurs concernés, et mises à jour régulièrement. Nos voisins allemands font de même avec les normes DIN (1). Cette méthode apporte du pragmatisme dans l’application d’un texte législatif (ou réglementaire), qui peut alors demeurer lisible et stable.
Jean-Ludovic Silicani, ancien commissaire à la réforme de l’Etat, a élaboré récemment pour le réservoir d’idées Génération libre une note intitulée « Pour une révolution normative ». Le rapport de la sénatrice Elisabeth Lamure, paru en juillet, fournit des recommandations pour que le pouvoir politique reprenne la main sur le processus réglementaire, en recourant davantage à la normalisation volontaire. Qu’autant de recommandations éminentes, validées par la pratique européenne, convergent est remarquable. Le ministère de l’Economie lui-même, dans un guide récent, promeut l’usage de la normalisation dans un objectif de simplification de la réglementation. Ceci est révélateur d’une prise de conscience.
Afin de concrétiser l’indispensable sursaut visant à doter notre pays et nos collectivités d’un cadre modernisé, une volonté politique nécessite un changement de braquet. Refusons de nous réfugier derrière une application souvent dévoyée du principe de précaution. Travaillons par pans sectoriels de réglementation. Exploitons l’urgence créée par la Conférence nationale des territoires ou les états généraux de l’alimentation pour remettre à plat des dispositifs essoufflés.
Si ces défis sont relevés au niveau politique, soyez certains que le CNEN et Afnor mobiliseront tous leurs efforts au service d’une cause d’intérêt national telle que cette « nouvelle approche à la française ».
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