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[tribune] littoral

Erosion côtière : « Pas de droit efficient sans vision politique ! »

Publié le 17/06/2025 • Par Auteur associé • dans : Actu juridique, France, Opinions

Professeur à l'université de La Rochelle
Dr
Le recul du trait de côte est aujourd’hui au centre des débats sur l’aménagement durable et intéresse tout particulièrement les élus du littoral, en première ligne. Pour Laurent Bordereaux, juriste et professeur à l’université de La Rochelle, la naissance d’un droit de l’érosion à la hauteur des enjeux en présence nécessite un cap politique.

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Laurent Bordereaux

Juriste, professeur à La Rochelle Université

Il ne se passe pas une semaine sans que les médias ne se fassent l’écho de ce sujet majeur du XXIème siècle ! En pleine tourmente du changement climatique, les sociétés littorales sont en effet plus que jamais confrontées à un recul inexorable du trait de côte, appelant sans surprise une forte demande sociale de droit. La France, particulièrement touchée par ce phénomène d’érosion (des trois façades métropolitaines à l’outre-mer), a tardivement déployé tout un arsenal de dispositifs juridiques pour y faire face.

Il faut dire que nombre de questions pressantes appelaient sans aucun doute un accompagnent adapté dans la loi, le besoin de sécurité juridique, proportionnel à l’extrême mobilité de l’interface terre-mer, devenant de plus en plus impérieux. Ainsi, les pouvoirs publics (Etat, collectivités locales et établissements publics) s’étant plus ou moins résolus à délocaliser en zone rétro-littorale toute une série de biens publics et privés en raison de l’inefficience des solutions « dures » (digues traditionnelles) de protection du littoral, la question de l’accompagnement juridique de cette nouvelle politique publique du recul devenait incontournable.

Si le droit français a vu naître, avec la fameuse loi dite « Littoral » du 3 janvier 1986, les grandes règles d’urbanisme ayant permis de protéger un espace éminemment sensible et sous pression d’une urbanisation incontrôlée, l’érosion côtière appelait bien une production normative spécifique. Dans cette optique, plusieurs textes importants ont été récemment adoptés, comme la loi Climat et Résilience n° 2021- 1104 du 22 août 2021 et l’ordonnance n° 2022-489 du 6 avril 2022 relative à l’aménagement durable des territoires littoraux.

De nouveaux instruments, notamment contractuels, ont ainsi vu le jour ou ont été réactivés, comme le « bail réel d’adaptation à l’érosion côtière » ou le projet partenarial d’aménagement (PPA), destinés à mieux appréhender dans le discours juridique les différentes problématiques relatives aux constructions et aménagements menacés, des zones physiquement touchées aux espaces de relocalisation. Par ailleurs, un nouveau régime d’urbanisme, très strict, a été créé dans les secteurs de recul pensés par le législateur, à savoir la zone d’érosion à un horizon de trente ans et celle couvrant un horizon plus lointain, entre trente et cent ans.

Cela étant, de nombreuses interrogations demeurent aujourd’hui sans véritable réponse, soulignant les lacunes du cadre politique des dispositions juridiques pourtant destinées à être rapidement mobilisées. Or, il n’y aura pas de droit efficient de l’érosion côtière sans vision politique des risques naturels. De ce point de vue, plusieurs sujets méritent tout particulièrement des éclaircissements très attendus des habitants du bord de mer et des élus du littoral.

Quid du financement ?

Tout d’abord, la question financière est naturellement au centre du jeu. Elle intéresse très directement les propriétaires privés riverains des zones d’érosion, qui voient, sans droit à indemnisation pour l’heure, une partie de leurs biens s’incorporer au domaine public maritime de l’Etat. Cette question est d’autant plus délicate que le Conseil constitutionnel et le Conseil d’Etat (en 2018) ont jugé, à propos de la célèbre affaire girondine du Signal, que contrairement à la submersion marine, l’érosion ne figurait pas parmi les risques naturels majeurs susceptibles de fonder une opération d’expropriation, excluant donc le recours au fonds « Barnier ».

Si l’ordonnance du 6 avril 2022 a permis depuis aux collectivités publiques mentionnées (dont les collectivités locales) d’exproprier afin de constituer des réserves foncières « en vue de prévenir les conséquences du recul du trait de côte » (1), il n’en reste pas moins, d’une part, que la dissociation actuelle des deux risques littoraux en cause (érosion et submersion) est très fragile et, d’autre part, qu’il est urgent de fixer une règle du jeu concernant les aspects financiers de la relocalisation, qui ne saurait d’ailleurs exclure les équipements publics (routes, sentiers littoraux, stations d’épuration, etc…).

Bref, qui finance et quels biens, au final, seraient susceptibles d’être indemnisés ? S’agissant des habitations, faut-il acter un fonds d’indemnisation (avec un plafond) ? Sur quels critères serait-il calculé ? Et quid des résidences secondaires ? Quid des campings ? Le cadre temporel de la réflexion est également important : dans quelle mesure la conscience du risque par la population est susceptible d’exclure les nouveaux arrivants d’un (éventuel) dispositif d’indemnisation ?  Sur tous ces points précis, la généralité de la parole de l’Etat, à laquelle le Comité interministériel de la mer du 26 mai 2025 n’échappe pas, ne rassure pas plus qu’elle n’éclaire. L’idée d’une solution financière fondée sur la solidarité nationale semble en tous cas s’éloigner…

Cartes locales des zones d’érosion

Ensuite, dans le champ du droit de l’aménagement et de l’urbanisme, la question de la relocalisation des biens menacés par l’érosion paraît sérieusement à réinvestir. Cette problématique, dont on parle beaucoup aujourd’hui, en cache pourtant une autre : il est en effet étonnant de se projeter vers une recomposition des territoires littoraux alors même que les cartes locales d’érosion exigées par la loi Climat et Résilience peinent à voir le jour et à être communiquées au public, dans le cadre de la concertation…  Ces cartes ont pourtant vocation à intégrer les plans locaux d’urbanisme des communes concernées par l’actuel décret n° 2024-531 du 10 juin 2024, ce qui déclenchera l’application d’un redoutable régime d’inconstructibilité dans la première zone réglementaire d’érosion (de zéro à trente ans), y compris dans les secteurs urbanisés, où toute extension d’une construction existante devra être démontable (2).

Le sujet aura-t-il sa place dans les débats des élections municipales de 2026 ? Rien n’est moins sûr. Gageons cependant que la mise en œuvre du plan national d’adaptation au changement climatique (PNACC 3), présenté par le gouvernement en mars 2025, permettra quelques avancées en la matière.

Dérogation à la loi Littoral et planification stratégique

En outre, les exceptions portées à la loi Littoral de 1986 pour faciliter les opérations de relocalisation laissent songeur. Le principe dit d’extension en continuité de l’urbanisation, impliquant de construire en continuité directe des zones véritablement urbanisées afin d’éviter le mitage du littoral (3), n’est certes pas intangible. Il a d’ailleurs été maintes fois assoupli par le législateur, des installations agricoles aux panneaux solaires. Des configurations territoriales complexes peuvent tout à fait justifier de relocaliser des biens en discontinuité des villages et agglomérations. Mais le PPA, dont le périmètre est restreint et la finalité ponctuelle, ne saurait être le seul vecteur du déclenchement de la dérogation à la loi Littoral et, plus généralement de la politique de recomposition spatiale. Il faut redonner ici au schéma de cohérence territoriale (SCOT) toute sa dimension de planification stratégique et (donc) intercommunale.

Quant à l’écriture même de cette dérogation dans le code de l’urbanisme, elle gagnerait bien évidemment à ne pas être si absconse (4)… L’intelligibilité de la règle de droit n’est-elle pas un objectif de valeur constitutionnelle ?

Finalement et malgré d’indéniables avancées, le jeune droit de l’érosion côtière, en plein chantier, ne rompt pas avec les maux qui caractérisent le droit de l’aménagement, donnant le sentiment d’avoir été écrit au premier chef pour les bureaux d’études et les cabinets de conseils aux collectivités territoriales.

Notes

Note 01 Article L. 221-1 alinéa 2 du Code de l’urbanisme. Retour au texte

Note 02 Etant entendu que dans les secteurs urbanisés de la zone d’érosion de 0 à 30 ans, la capacité d’habitation des constructions existantes ne devra pas être augmentée. Concernant les constructions nouvelles dans les secteurs urbanisés et non urbanisés de cette même zone, seules les constructions ou installations nécessaires à des services publics ou à des activités économiques exigeant la proximité immédiate de l'eau peuvent être autorisées, à condition qu'elles présentent un caractère démontable. Voir les dispositions de l’article L. 121-22-4 du Code de l’urbanisme. Retour au texte

Note 03 CE, 27 septembre 2006, Commune du Lavandou, req. n° 275924. Retour au texte

Note 04 Voir les dispositions de l’article L. 312-9 du Code de l’urbanisme. Notons, en tout état de cause, que la relocalisation de biens menacés par l'érosion en discontinuité des zones urbanisées est proscrite dans la bande des 100 mètres ainsi que dans les espaces remarquables du littoral. Elle est également proscrite dans les espaces proches du rivage, sauf ici à titre exceptionnel et sur autorisation ministérielle (mais toujours en dehors de la bande des 100 mètres et des espaces remarquables). Retour au texte

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