C’est entendu, le verbe présidentiel n’a plus la même puissance depuis la dissolution ratée qui a fait perdre à Emmanuel Macron sa majorité à l’Assemblée. Mais, tout de même ! Qu’un président de la République valide l’idée de la fin du statut à vie des fonctionnaires, soufflée par l’essayiste libérale Agnès Verdier-Molinié lors de l’émission spéciale de TF1 le 13 mai, montre à quel point les termes du débat sont biaisés.
Crise des déficits publics
D’abord parce qu’en fait et en droit, la question ne se pose pas puisque « l’emploi à vie » n’existe pas. Haut fonctionnaire de formation lui-même, le Président le sait parfaitement. Ensuite, parce qu’on peut difficilement répondre à un problème si ses causes ne sont pas correctement identifiées. Ainsi, l’emploi à vie n’existant pas, il n’y a aucune chance que sa suppression contribue à régler la crise des déficits publics. De même, considérer que la progression des effectifs de fonctionnaires entraîne une dépense publique hors de contrôle sans jamais mettre « en face » ce qui est produit par l’action publique est pour le moins fallacieux.
Réalité à rebours des discours
Emmanuel Macron a d’ailleurs, sur ce plan, évolué depuis sa première campagne en 2017, lorsqu’il ambitionnait 120 000 suppressions de postes. Face à la directrice de l’Ifrap, il met désormais en avant que ces agents publics, ce sont des enseignants, des policiers, des soignants… bref, des gens pas inutiles. Et remarque que « sur 1 000 euros de dépense publique, tout le fonctionnement des administrations, ce sont 66 euros. Ce n’est donc pas vrai qu’on règle le déficit public avec la diminution des fonctionnaires ».
Dans le même registre, il aurait pu faire valoir que la part de l’emploi public dans l’emploi total est passée de 22 % en 1989 à 19,8 % en 2022. Une réalité à rebours des discours qui dépeignent une fonctionnarisation du pays. Le Premier ministre, François Bayrou, qui annonce une énième « revue des effectifs », pourrait s’en saisir et proposer un vrai débat objectivé et éclairé. En posant que « la baisse des effectifs de la fonction publique et des collectivités locales est possible et salutaire », il tronque, à son tour, les enjeux.
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