Un printemps studieux et non-stop ! Face aux « quatre crises multisectorielles » (du logement, agricole, du pouvoir d’achat, des finances publiques) auxquelles le pays est confronté, les sénateurs vont débattre d’une série de textes majeurs, d’ici la suspension estivale le 11 juillet. L’agenda est si serré que les débats se tiendront parfois dans l’hémicycle, tandis que les commissions continueront de travailler.
Mardi 28 mai, la présidente de la commission des affaires économiques, Dominique Estrosi-Sassone (LR, Alpes-Maritimes), a insisté sur le fait que la France fait face à trois défis : la transition énergétique, le déficit commercial et la réindustrialisation. Une mission sénatoriale de contrôle du dispositif des Territoires d’industrie a d’ailleurs été lancée avec un rapport attendu dans quelques mois. Pour le reste, elle dénonce « un État pompier plus qu’un État stratège. »
Silo et salami
Face au problème du logement, elle souhaite qu’en face « du choc de l’offre », il faille considérer aussi qu’il existe « le choc de la demande. » Afin de séduire futurs acheteurs et investisseurs, de motiver les maires qui s’interrogent sur l’intérêt à construire après la suppression de la taxe d’habitation alors qu’il leur faudra bâtir des équipements publics en cohérence et prévoir les dépenses de fonctionnement afférentes, l’élue du sud suggère « une loi de programmation pour avoir une vision stratégique pour l’ensemble de la filière, et arrêter le stop and go. »
En dénonçant « une politique de silo, de saucissonnage, de salami, compartimentée », elle assure que le ministre du Logement, Guillaume Kasbarian, comme celui de l’Agriculture, Marc Fesneau ne lui ont « pas caché », que cette manière de procéder était rendue nécessaire par l’absence de majorité dans les deux assemblées. D’où un projet de loi sur le logement divisé plusieurs volets.
Une fausse bonne idée
La sénatrice LR constate que le texte qui concerne le logement abordable fait l’impasse sur l’accession à la propriété, pourtant « primordiale dans le parcours résidentiel. » Cependant, le groupe LR est « favorable » au logement intermédiaire et souhaite le voir intégré dans le loi SRU. Elle souhaite aussi que cette loi prenne en compte « les réalités de territoire » et soit à l’écoute des maires, plutôt que de leur imposer des sanctions.
La fin du HLM à vie constitue un autre volet d’une proposition consacrée au logement, mais Dominique Estrosi-Sassone la considère plutôt comme « une fausse bonne idée qui fait du buzz, ne concerne que très peu de locataires et qui va demander un travail gigantesque aux bailleurs sociaux pour mener à bien contrôle et évacuations sans atteindre l’effet escompté. »
Compromis sur les meublés de tourisme
En juin, le logement va donc faire l’objet de négociations entre députés et sénateurs, puisque les deux commissions mixtes paritaires (CMP) -sur les meublés de tourisme et la transformation de bureaux- vont se tenir conjointement le jeudi 20 juin, avant une adoption le 24.
Sur les meublés touristiques, l’Assemblée nationale a adopté le 29 janvier la proposition des députés Iñaki Echaniz (PS) et Annaïg Le Meur (RE). Le 21 mai, les sénateurs ont voté un texte modifié et un texte commun devra sortir de la CMP. « On aspire à ce que ce soit celui du Sénat qui soit retenu, mais c’est donnant donnant », reconnaît la présidente de la commission des affaires économiques. « Alors que les parlementaires de la chambre haute ont adouci les contraintes initiales à l’égard des propriétaires, « certains sénateurs ont été déçus par le volet fiscal dont les plafonds n’étaient pas suffisamment bas. Mais on a voulu garder un équilibre dans ce texte, et ne pas tirer à hue et à dia sur Airbnb », ajoute-t-elle, en souhaitant entendre aussi les maires qui ne se reconnaissent pas dans le discours portés par leurs homologues des grandes villes. « Il faut considérer que des territoires ont besoin de la location touristique saisonnière. »
Quant à refuser de laisser aux maires la possibilité de baisser de 120 à 90 le nombre de jours autorisant la mise en location de la résidence principale sur les plateformes, la sénatrice admet que la proposition facultative a été retirée du texte final, parce qu’elle « ne changeait rien à l‘attrition du marché locatif. Mais on verra comment les débats vont s’organiser, comment on sera susceptible de céder vis à vis de l’Assemblée nationale et comment celle-ci pourra céder par rapport au travail du Sénat. »
Domaines juridiques