Alors que la France, comme d’autres pays européens, connaît une crise du logement sans précédent depuis celle des subprimes de 2008, le Premier ministre, Gabriel Attal, dans sa déclaration de politique générale, le 30 janvier 2024, a remis au goût du jour le slogan d’Emmanuel Macron du « choc de l’offre ». Doper la construction amènerait mécaniquement à une baisse des prix, selon ce mantra. En 2008, justement, les gouvernements européens et américain ont lancé des plans de relance qui passaient par la construction de logements et ont contribué à la création d’une bulle spéculative.
Isabelle Rey-Lefèbvre, journaliste spécialisée dans les questions du logement au « Monde » depuis plus de vingt ans, démontre avec clarté, dans « Halte à la spéculation sur nos logements ! Les solutions pour habiter à nouveau nos villes » (éd. Rue de l’échiquier, janvier 2024), par quel enchaînement d’événements et de politiques le logement est devenu un produit d’investissement, inaccessible à une partie des habitants. « Dans la même période, les revenus des plus riches et des plus pauvres ont connu une évolution totalement disparate. Les 1 % des plus riches ont vu leurs revenus exploser, tandis que les 10 % des habitants les plus pauvres n’ont pas retrouvé leur niveau de vie d’avant 2008 », expose-t-elle. Ce qui explique la hausse constante, en France, du nombre de demandeurs de logements sociaux.
« Et si les logements servaient à habiter dans de bonnes conditions de confort et ne servaient qu’à cela ? » C’est cette question qui a poussé la journaliste à effectuer un tour dans sept grandes villes d’Europe, à la recherche de modèles alternatifs, où la propriété et la recherche de plus-values sont remplacées par la quête de logements accessibles pour tous.
Comment le logement est-il devenu un produit spéculatif en Europe ?
En 2008, la crise des subprimes a amené les Etats et les banques centrales à réagir, les premiers en lançant des plans de relance, les secondes en baissant les taux d’intérêt. En France, Nicolas Sarkozy a lancé un plan de relance qui comprenait notamment la création du Grand Paris. Tout cela a généré un flux massif de capitaux à investir. Et les investisseurs, les fonds de pension, ont recherché des produits sûrs, après avoir vécu l’explosion de la bulle internet. L’immobilier était l’un d’eux. L’afflux de liquidités a engendré une hausse des prix.
Le second facteur qui a favorisé cette spéculation dans de nombreux pays est l’amoindrissement de la protection sociale apportée par le logement. Pour diminuer son endettement, Berlin a revendu une partie de son parc municipal de logements à des sociétés cotées en Bourse. Les Pays-Bas, à la suite d’injonctions
[60% reste à lire]
Article réservé aux abonnés
Gazette des Communes
Thèmes abordés