Après avoir été élu représentant au Parlement européen à l’issue des élections du 7 juin 2009, Brice Hortefeux avait temporairement renoncé à exercer son mandat, pour assurer des fonctions ministérielles.
Conformément à ce que prévoit la loi, c’est la candidate suivante sur la liste, Catherine Soullie, qui avait siégé en remplacement. A la suite de la cessation des fonctions ministérielles de M. Hortefeux, elle démissionna et il fut désigné député européen en mars 2011.
Une désignation qui a suscité les plus vives critiques politiques mais aussi juridiques. En effet, comment un ancien député européen devenu ministre mais qui quitte le gouvernement peut à nouveau être député européen ?
La réponse semble simple puisque l’article 24 de la loi française du 7 juillet 1977 dispose qu’ « en cas d’acceptation par un représentant de fonctions gouvernementales, son remplacement est effectué, conformément au premier alinéa, jusqu’à l’expiration d’un délai d’un mois suivant la cessation de ces fonctions. A l’expiration du délai d’un mois, le représentant reprend l’exercice de son mandat ».
Mais encore faut-il que Brice Hortefeux soit considéré comme un « ancien député européen ». Car si un député national est considéré comme tel dès le soir de l’élection, ce n’est pas le cas au Parlement européen où le règlement intérieur considère qu’un député européen commence son mandat à partir de la première session plénière de la législature, dite « constitutive ».
Or, M. Hortefeux n’a jamais assisté à cette première session plénière. Il a en effet démissionné dès son élection sans jamais avoir siégé au sein du Parlement européen.
Ainsi, au sens du droit communautaire, l’ancien ministre n’a jamais été élu député européen de la législature actuelle. Il ne peut donc pas « retrouver » un siège qu’il n’a jamais occupé !
Il s’agit ainsi d’un conflit de normes entre la norme nationale et la norme communautaire, ce qui a naturellement conduit un électeur à saisir le Conseil d’Etat d’une protestation contre cette désignation.
Décision déceptive – Le Conseil d’Etat a rendu mercredi 30 novembre 2011 sa décision. Mais ses arguments ne sont pas sur le fond du problème, comme tout juriste aurait pu l’espérer, mais sur la forme.
Il s’agit en effet ici d’un problème de procédure contentieuse et plus précisément du délai de recours contentieux qui est jugé tardif. La Haute juridiction administrative a jugé que ce type de litige relevait des règles particulières du contentieux électoral, et que par conséquent, le délai de recours spécial, qui est de 10 jours pour les élections européennes, courait à compter de l’installation du nouveau député dans ses fonctions.
Ainsi, la saisine du juge étant datée du 5 avril 2011, elle intervient après l’expiration du délai de 10 jours applicable qui était le 4 avril à minuit. A quelques heures près, le « scandale juridique » n’aura donc pas eu lieu !
Références
Domaines juridiques