« Il y a un avant et un après 2022 », a déclaré Claudine Bichet, vice-présidente (EELV) de Bordeaux Métropole en ouverture des Assises européennes de la transition énergétique (AETE) à Bordeaux, le 23 mai, évoquant les incendies et la sécheresse qui ont frappé la Gironde l’été dernier. « Cela a entraîné une vraie prise de conscience, mais il ne faut pas attendre de telles catastrophes naturelles pour agir, car nous avons à accomplir en 10 ans ce que nous n’avons pas réussi à faire en 30 ans », a-t-elle pointé.
Aller plus vite
Du reste, la métropole bordelaise a considérablement augmenté ses efforts pour accélérer la transition énergétique (lire notre interview), et passer de 4 % d’autonomie énergétique en 2020 à 41 % en 2026.
Intervenant lors de cette plénière, Pierre Hurmic, maire (EELV) de Bordeaux, a souligné que le budget « rénovation énergétique » de sa ville avait été triplé. Il s’est également félicité de la plus haute distinction remise par l’Ademe à la Communauté urbaine de Bordeaux : la 5ème étoile du label « Territoire engagé transition écologique », que possède déjà la communauté urbaine de Dunkerque (co-organisatrice des AETE avec le Grand Genève et l’Ademe) et qui a également été remise à la ville de Rennes et à Rennes métropole.
Le maire de Bordeaux a profité de cette tribune pour relancer son idée de rocade qu’il souhaiterait couvrir de panneaux photovoltaïques, interpellant au passage l’État (propriétaire de l’ouvrage) en la personne d’Agnès Pannier-Runacher, ministre de la Transition énergétique, présente lors de l’évènement. Il a aussi annoncé son souhait de lancer une coopérative carbone, reprenant ainsi l’exemple réussi de La Rochelle.
Facteurs humains et financiers
« Pour accélérer, il faut activer plusieurs leviers. Le premier est financier », explique Claudine Bichet, citant les derniers rapports (Ademe, I4CE, France Stratégie…) qui appellent à multiplier les investissements d’un facteur 6 à 10, selon les scénarios. Elle identifie aussi le levier réglementaire, « même si la récente loi d’accélération des énergies renouvelables en a fait sauter un certain nombre ». Enfin, il faut également augmenter les moyens humains, estime l’élue, alors même que les collectivités ont du mal à recruter des agents, particulièrement dans le domaine de la transition énergétique où la compétition fait rage avec le privé. « Nous manquons de bras, ainsi que de formations et de filières structurées », a-t-elle ajouté.
Boris Ravignon, président par intérim de l’Ademe est allé dans son sens : « Les collectivités ont un besoin criant d’ingénierie et d’être soutenues. Certes, certaines ont une taille qui leur permet de disposer de moyens humains importants, mais même celles-là ont besoin de se renforcer », a-t-il déclaré, en précisant que l’Ademe finançait actuellement 780 postes dans les collectivités, via des contrats d’une durée de trois ans.
Le succès des réseaux de chaleur
Au-delà de l’urgence climatique, les effets de la crise énergétique ont également été évoqués. « A travers cette crise, nous avons connu ce que le monde a traversé avec le choc pétrolier dans les années 1970. Cela a fait réagir ceux qui, jusque-là, ne voulaient pas réagir », a pointé Patrice Vergriete, président (DVG) de la Communauté urbaine de Dunkerque. « Et nous savons aussi que le prix de l’énergie va continuer à monter dans les années qui viennent », a-t-il ajouté.
D’où l’importance pour les collectivités d’agir au plus vite et de changer de braquet. C’est apparemment ce qu’elles ont fait, en se lançant dans la création de réseaux de chaleur, ou en étendant ceux existants. « Il y a actuellement un flux important de demandes de subventions pour le Fonds chaleur, et c’est tant mieux ! La crise a été salutaire », s’est félicité Boris Ravignon. A tel point que l’enveloppe de 520 millions d’euros de ce fonds – que gère l’Ademe – a déjà attribuée pour 2023. Plus d’une vingtaine de dossiers seraient en attente. Au total, il y aurait pour près d’un milliard d’euros de projets de réseaux de chaleur, estime-t-on à l’Agence de la transition écologique.
Lors de la dernière campagne présidentielle, Emmanuel Macron avait d’ailleurs proposé de doubler le Fonds chaleur pour atteindre cette somme d’un milliard. Nicolas Garnier, animateur de la séance plénière et délégué général d’Amorce, l’a d’ailleurs rappelé à Agnès Pannier-Runacher. Une évolution qu’elle a semblé approuver, mais la discussion devra avoir lieu lors du prochain projet de loi de finances rectificatives, ou du projet de loi de finances pour 2024.
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