Le secteur du bâtiment est un poids lourd en matière de consommations d’énergie et de ressources, d’émissions de CO2 et de production de déchets. La construction publique est un secteur clef à responsabilité majeure dans la transition écologique et sociétale des territoires. Elle l’est par son empreinte écologique d’abord, mais aussi par la place prépondérante de l’investissement public dans l’économie française.
En matière de construction, l’attention des pouvoirs publics se porte sur la rénovation thermique des bâtiments et l’atteinte des objectifs de réduction des consommations énergétiques. Or, si l’on ambitionne d’amener le secteur à la neutralité carbone en 2050, il faudra initier une transformation profonde des manières de produire, d’exploiter et de gérer les bâtiments.
Une construction décarbonée est une construction frugale et sobre, robuste et durable, modulable et adaptable. On parle là de réduire les consommations d’énergie, d’eau, de terrain et de ressources de manière massive. Cela nécessite de poursuivre et d’amplifier le travail de rénovations thermique et patrimoniale bien sûr, mais aussi de généraliser l’utilisation des matériaux biosourcés, de systématiser des constructions sobres et low tech, tout en maintenant un haut niveau de qualité. Cette transformation passera aussi par une place réelle faite au ré-emploi de matériaux, matériels et mobiliers.
La construction neuve consomme 17 fois plus de ressources que la rénovation
La construction publique doit être pionnière. Au travers de nouvelles exigences et du levier puissant de la commande publique, elle doit contribuer à façonner une nouvelle offre et à faire évoluer les pratiques des entreprises pour changer le modèle et les imaginaires.
Un autre enjeu sera la capacité des maîtres d’ouvrage publics à utiliser leur stock, c’est-à-dire ce qui est déjà là, construit depuis des années, voire des siècles.
Selon l’ADEME, la construction neuve consomme 17 fois plus de ressources que la rénovation. Dans la société bas carbone de 2050, on construira beaucoup moins, juste ce qui est strictement nécessaire aux besoins des populations et aux évolutions de la société. D’où la nécessité, pour les collectivités, d’être en capacité d’optimiser et de valoriser le patrimoine existant.
La connaissance du patrimoine et la prospective patrimoniale en lien avec une prospective territoriale sont au cœur du sujet : « Vivre sur le stock et faire vivre le stock », « construire la ville sur la ville ». Là encore un changement de paradigme s’impose pour multiplier les fonctions et usages des bâtiments dans l’espace et dans le temps, pour ouvrir le patrimoine public dormant à des occupations alternatives ou transitoires.
Ces évolutions s’appuieront sur un dernier pilier : la ré-invention du travail avec l’usager-utilisateur. Les modes actuels de programmation ne sont compatibles ni avec des objectifs de sobriété et de frugalité, ni avec des garanties d’acceptabilité des projets. Il y a une mutation à opérer pour, d’un côté, construire et faire vivre des maîtrises d’usage, interlocuteurs-partenaires actifs et fiables ; de l’autre, mettre en place des modes de participation, d’animation et de co-construction des projets qui permettent jusqu’au stade de l’Avant-projet détaillé d’ajuster besoins essentiels et contraintes.
Face à ce défi de la transformation profonde des manières de penser la construction publique, les maîtrises d’ouvrage ne peuvent plus rester dans un rôle de ressource au service des politiques publiques, elles se doivent d’être forces de proposition, audacieuses et innovantes, pour initier une stratégie permettant de conduire la transition écologique d’une profession et d’entraîner dans leur suite un pan essentiel de l’économie française.
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