Alors que le débat sur le déploiement de la 5G suscite un flot de questions et de réactions parfois excessives entre deux camps extrêmement polarisés, il est permis de se poser une question simple : qui décidera réellement dans nos territoires de l’arrivée de la 5G ? En d’autres mots, dans une France décentralisée, les élus locaux auront-ils leur mot à dire sur ce déploiement et ses conséquences ?
Constatons tout d’abord que jusqu’ici, aucun mouvement, aucun parti politique ou association environnementale ne s’étaient opposés au déploiement de réseaux mobiles dans les territoires. Au contraire, ce sont des retards, et encore plus les inégalités d’accès au numérique, ce qu’on a appelé fort justement la fracture numérique, que les élus, notamment les plus concernés, déploraient. Et il est vrai qu’avant de se polariser sur la 5G, il faudrait peut-être se rappeler que certaines zones du territoire ne reçoivent pas encore la 3G. Dès lors, c’est la couverture numérique du territoire, notamment l’arrivée de la fibre partout, dont il faut se préoccuper, avant toute chose.
Privilégier un déploiement progressif
Concernant le débat sur la 5G, il faut à tout prix éviter les caricatures et instaurer un vrai débat de fond, qui passe par les territoires. Il y a un besoin très profond de se réapproprier le progrès et ses conséquences. Ce qui est sûr, c’est qu’imposer tout déploiement de la 5G malgré l’hostilité des territoires serait à la fois contre-productif et source de tensions inutiles. Ce déploiement ne peut donc s’opérer que de façon concertée avec les élus locaux. Les régions, qui disposent de la compétence économique, mais aussi les structures intercommunales s’apparentent, peu ou prou, à des lieux privilégiés pour que les élus locaux débattent et décident, in fine, de ce qu’il y a lieu de faire : ils connaissent bien mieux que d’autres la réalité de leur territoire, les besoins en termes économiques et sociaux et le ressenti de leurs concitoyens qu’ils pourraient consulter de la manière qu’ils jugeraient la plus appropriée.
Ce qui est sûr, c’est qu’avant de passer à une généralisation massive et à un déploiement sans contrôle décidé par quelques grandes entreprises, et depuis Paris par l’Etat, il est essentiel de privilégier un déploiement progressif et raisonné et de le penser à l’aune d’une véritable stratégie de revitalisation et d’aménagement du territoire. Bien sûr, je n’ignore pas que seules les autorités désignées par la loi – ministre, Arcep, ANFR, Anssi – sont compétentes pour réglementer de façon générale ce secteur. Mais pourquoi une commune ou une intercommunalité ne pourraient-elles pas décider, démocratiquement, que ce service ne doit pas être déployé sur son territoire ? Pourquoi le ministre serait-il plus légitime qu’un conseil élu, représentatif de la population locale, pour arbitrer entre engouement technophile et attentisme prudent ?
Il est paradoxal que les technologies de pointe soient le dernier domaine où le centralisme jacobin le plus archaïque reste en vigueur. Le moment est donc venu de faire évoluer, sur ce plan, la législation. Au moment où le gouvernement prépare un projet de loi relatif à une nouvelle étape de la décentralisation, mais aussi des différenciations, il est temps, sur ce sujet comme sur d’autres, de leur donner une application concrète. Temps de faire enfin confiance aux élus locaux !
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