Deux mois après avoir été entérinée par la loi du 22 juillet 2019, la future Agence nationale de cohésion des territoires (ANCT), destinée à faciliter le montage de projets des petites communes en réorganisant l’aide de l’Etat, ne convainc pas les élus. « Je vais vous dire ma grande déception !», a commenté Dominique Bussereau, président de l’Assemblée des départements de France, lors d’un atelier organisé par l’association le 12 septembre à Orléans sur le thème de l’ingénierie territoriale.
« Pré carré »
Première critique, le format de cette agence, qui réunira les services de l’actuel Commissariat général à l’égalité des territoires (CGET), l’Epareca, qui travaille sur la reconversion des centres commerciaux et l’Agence du numérique, mais pas l’Agence nationale de l’habitat ou l’Agence nationale de rénovation urbaine comme cela avait été un temps imaginé, même si des conventionnements pourront être mis en oeuvre. « Ces agences ont évidemment défendu leur pré carré. Donc on se retrouve in fine avec peu de chose, et même pas le Cerema. Je trouve que c’est dommage, la montagne accouche d’une souris », a-t-il déploré.
Invitée des débats, Sophie Duval Huwart, directrice du développement des capacités des territoires au CGET, a pourtant tenté de rassurer en expliquant qu’il s’agissait d’un choix « pragmatique » pour que l’agence « soit opérationnelle le plus rapidement possible ». Sa mise en place est prévue au 1er janvier 2020 », a-t-elle indiqué, et la future agence devrait réunir « 300 à 400 personnes à Paris ».
En revanche dans les territoires, elle n’aura pas pignon sur rue. Il n’y aura ni locaux, ni matérialisation de sa présence. La porte d’entrée sera le préfet du département, qui aura donc une nouvelle casquette, celle de délégué territorial de l’ANCT. C’est lui que les élus iront voir en cas de difficulté pour faire aboutir leurs projets. A charge pour lui de leur fournir une assistance « sur mesure », en mobilisant les services de l’Etat au niveau départemental, régional, voire national s’il s’agit d’un dossier particulièrement pointu. « Il ne s’agit pas juste de se mettre autour d’une table et de discuter, a-t-elle insisté, mais aussi de modifier nos process si nécessaire. C’est un changement de méthode ».
Des services techniques démunis
Là encore, le dispositif ne séduit pas vraiment. Le problème, souligne Dominique Bussereau, c’est que le préfet va se sentir à la fois seul et démuni dans des départements où « tous les gouvernements, y compris ceux auxquels j’ai participé, ont diminué à l’os la présence des services techniques de l’Etat ». Selon lui, plutôt que d’avoir 300 à 400 personnes à Paris, il vaudrait mieux nommer auprès de chaque préfet « un ou deux fonctionnaires de haut niveau sur le modèle des équipes des SGAR ». « Là oui, cela nous aiderait à faire avancer les dossiers, et nous verrions alors l’agence avec moins de déception », a-t-il complété.
Dernière crainte enfin, le risque de concurrence, ou de redondance, entre cette nouvelle agence et les dispositifs d’ingénierie territoriale qui ont été mis en place ces dernières années par de nombreux conseils départementaux, précisément pour pallier le désengagement de l’Etat dans ce domaine. « Le défi sera de bien travailler ensemble », a résumé Frédéric Néraud, vice-président du conseil départemental du Loiret. Toutefois, au-delà de ces réserves, les participants se sont défendus d’être négatifs, et espèrent que le nouveau système fonctionnera « pour répondre à l’attente très forte des élus, et notamment des maires ».
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