« En service commandé », « inutilement agressive » et « à contre-emploi » : le numéro deux de l’Association des maires de France, André Laignel (PS) n’a pas digéré l’interview sur le site du Point de Jacqueline Gourault, la « madame Territoires du Gouvernement ». A l’occasion de cet entretien publié le 28 septembre 2018, la ministre déléguée auprès du ministre de l’Intérieur juge catastrophiste le discours de l’Association des maires de France.
« Jamais les dotations n’ont été aussi fortes à destination des territoires ruraux, tonne Jacqueline Gourault à propos du projet de loi de finances pour 2019. Moins de 1 % des communes sont concernées par la contractualisation avec l’Etat pour maîtriser l’évolution de leurs dépenses de fonctionnement. » Des arguments qui font bondir André Laignel, par ailleurs président du Comité des finances locales.
« 21 000 des communes ont vu leur dotation forfaitaire baisser en 2018, 16 000 leur dotation globale de fonctionnement », martèle-t-il à « La Gazette ». Quant au périmètre de la contractualisation, aujourd’hui circonscrit aux 322 plus grosses collectivités et intercommunalités, il va, selon André Laignel, s’étendre… « Ne vous faîtes pas d’illusion, cela va ruisseler », avait-il lancé lors du premier rassemblement pour les libertés locales, le 26 septembre à Marseille.
Feu sur l’appel de Marseille
Une réunion organisée par les présidents de l’AMF, François Baroin (LR), de l’Assemblée des départements de France, Dominique Bussereau (Ex-LR) et de Régions de France, Hervé Morin (UDI). Un rassemblement qui s’est concrétisé par un « appel de Marseille » contre « l’ultra-centralisation ». Un « meeting politique » de « militants » selon les propres mots des orateurs, pointe Jacqueline Gourault.
L’ex-vice-présidente de l’AMF a particulièrement peu goûté le propos de François Baroin (LR). « Il s’exprime comme si l’Etat devait s’en remettre à ses propositions. Comme s’il considérait l’élection d’Emmanuel Macron comme une erreur de casting. Le candidat qu’il soutenait à la précédente présidentielle, François Fillon prévoyait 20 milliards d’économie à réaliser par les collectivités locales », cingle la ministre.
Et, pour la bonne bouche, Jacqueline Gourault d’ajouter : « Hervé Morin et François Baroin n’ont-ils jamais été ministres ? Critiquer l’administration centrale, c’est facile. » Une charge contre laquelle s’élève André Laignel : « Nous n’avons jamais pris à partie les ministres nommément. Je constate que la réciproque n’est pas vraie. »
Vers un boycott de la CNT
Pour le numéro deux de l’AMF, l’exécutif joue un jeu trouble avec les associations d’élus, privilégiant systématiquement l’Assemblée des communautés de France et France Urbaine. Deux structures qu’il qualifie d’« auxiliaires de vie du Gouvernement ».
Au passage, le socialiste André Laignel s’attaque au président de France Urbaine, Jean-Luc Moudenc (LR). « Sa ligne, pro-gouvernementale, n’est pas majoritaire. François Rebsamen (NDLR : président de la Fédération nationale des élus socialistes et républicains) à Dijon, Martine Aubry à Lille et Anne Hidalgo à Paris ne la partagent pas. Il en est de même aussi pour les maires de Saint-Etienne et de Cannes, Gaël Perdriau et David Lisnard », égrène-t-il.
Très remontée, l’Association des maires de France ne paraît pas décidée à retrouver la table de la Conférence nationale des territoire. Une instance de concertation Etat-collectivités que l’association, l’ADF et Régions de France boycottent depuis le mois de juillet. « Si c’est pour entendre la messe, nous ne viendrons pas », prévient André Laignel.
Dans ces conditions, le congrès des maires des 20, 21 et 22 novembre s’annonce houleux. Lors de la précédente édition, Emmanuel Macron avait annoncé qu’il s’y rendrait tous les ans. Le président de la République sera reçu selon les usages républicains, assure André Laignel, avant d’asséner un ultime tacle : « Emmanuel Macron s’est invité. L’usage aurait voulu qu’on l’invite… »
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