RĂ©ponse du ministère de l’agriculture et de l’alimentation : La mesure de bonne conduite agro-environnementale (BCAE) 7 impose aux agriculteurs de ne pas tailler leurs haies entre le 1er avril et le 31 juillet et conditionne le versement des aides du premier pilier. La convention sur la diversitĂ© biologique (CDB) a rĂ©affirmĂ© le caractère fondamental d’une prise de conscience internationale, et de nombreux rapports d’experts tels que ceux de la plateforme intergouvernementale scientifique et politique sur la biodiversitĂ© et les services Ă©cosystĂ©miques (Ă©quivalent, pour la biodiversitĂ©, de ce qu’est le groupe d’experts intergouvernemental sur l’Ă©volution du climat pour le changement climatique) ou de l’organisation des nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) ont montrĂ© très rĂ©cemment l’Ă©tat alarmant dans lequel se situent, en particulier, les territoires agricoles.
Au niveau français, la CDB se dĂ©cline en une stratĂ©gie nationale pour la biodiversitĂ© qui comporte des volets agricoles non nĂ©gligeables. Les politiques nationales ont tentĂ© d’enrayer ce dĂ©clin, au travers de nombreuses mesures mais dont les rĂ©sultats ne peuvent ĂŞtre immĂ©diats. En particulier, la loi sur la reconquĂŞte de la biodiversitĂ©, de la nature et des paysages (votĂ©e le 8 aoĂ»t 2016) a constituĂ© une Ă©tape, et les mesures de la politique agricole commune reprĂ©sentent d’autres moyens pour essayer de limiter les pertes de biodiversitĂ© constatĂ©es grâce Ă de nombreux observatoires et autres dispositifs (observatoire agricole de la biodiversitĂ©, suivi temporel des oiseaux communs, travaux du centre national de la recherche scientifique de ChizĂ©, etc.).
La haie constitue un habitat important pour une grande diversitĂ© d’espèces animales en milieu agricole. Il est important de prĂ©ciser quelques exemples de pĂ©riodes de reproduction d’oiseaux frĂ©quentant les haies [d’après Ă©galement « tout le gibier de France », co-rĂ©daction office national de la chasse et de la faune sauvage (ONCFS) – fĂ©dĂ©ration nationale de la chasse, Ed. Hachette, 2008] :
- la tourterelle des bois, classĂ©e « vulnĂ©rable » par l’union internationale pour la conservation de la nature, et qui fait l’objet d’un projet de plan d’action international auquel collabore l’ONCFS, se reproduit entre la fin du mois d’avril et la fin du mois d’aoĂ»t ;
- la perdrix rouge, qui présente un intérêt cynégétique certain, se reproduit en pied de haies entre fin mai et fin août ;
- le pigeon colombin niche dans les cavités des arbres entre mi-février et mi-septembre ;
- le merle noir, qui se reproduit entre dĂ©but mars et mi-juillet, ou la grive musicienne (entre mi-mars et mi-aoĂ»t), sont Ă©galement des oiseaux Ă protĂ©ger durant la majeure partie de l’Ă©tĂ© ;
- la mĂ©sange bleue s’installe dans les cavitĂ©s des arbres pour s’y reproduire d’avril Ă juillet : c’est une espèce qui est très utile en agriculture, car elle consomme de nombreuses chenilles au moment de l’Ă©levage des jeunes, en particulier en arboriculture (oĂą elle peut ĂŞtre utilisĂ©e pour lutter contre le carpocapse).
Par ailleurs, les chiroptères (qui font l’objet d’un plan national d’action) ont besoin de toute la vĂ©gĂ©tation pendant l’Ă©tĂ©, les arbres des haies constituant des gĂ®tes essentiels au maintien des populations de ces auxiliaires de lutte contre les ravageurs des cultures (exemple : Eudemis et Cochylis, dites « tordeuses » de la vigne). Il serait aussi possible d’Ă©voquer d’autres groupes de taxons (reptiles, batraciens), mais aussi des Ă©lĂ©ments de botanique : l’importance des fleurs fournies par les haies, y compris en juillet-aoĂ»t, est souvent vitale car elles reprĂ©sentent des ressources alimentaires majeures pour de nombreux insectes, entre autres les abeilles (domestiques et sauvages) qui font par ailleurs l’objet de nombreuses mesures et plans d’action. Le ministère de l’agriculture et de l’alimentation comprend que diverses difficultĂ©s soient rencontrĂ©es, par les agriculteurs parfois mais aussi par les collectivitĂ©s.
Une des solutions peut se situer dans la gĂ©nĂ©ralisation de plans de gestion des haies qui intègrent ces difficultĂ©s et proposent des dispositifs adaptĂ©s au niveau du territoire. Ainsi, le plan de dĂ©veloppement de l’agroforesterie, coordonnĂ© par le ministère de l’agriculture et de l’alimentation, travaille sur la mise au point, voire ultĂ©rieurement sur la gĂ©nĂ©ralisation de ces plans de gestion adaptĂ©s Ă de multiples enjeux. Il faut enfin signaler que les haies sont au centre de travaux importants qui ont Ă©tĂ© lancĂ©s, en 2017, Ă l’initiative de l’institut national de l’information gĂ©ographique et forestière et de l’ONCFS et se retrouvent dans le « dispositif de suivi des bocages », co-financĂ© par le ministère de l’agriculture et de l’alimentation, le ministère de la transition Ă©cologique et solidaire et l’agence nationale pour la biodiversitĂ©. Ce dispositif vise Ă identifier et caractĂ©riser tous les bocages de France, en particulier en matière de biodiversitĂ©. De nombreux « utilisateurs » sont associĂ©s au projet [l’association française arbres champĂŞtres et agroforesterie (AFAC-Agroforesteries), l’institut national de la recherche agronomique, l’institut national de l’origine et de la qualitĂ©, enseignement agricole, l’agence de l’environnement et de la maĂ®trise de l’Ă©nergie, etc.].
Références
Question écrite de Sébastien Leclerc, n° 7616, JO de l'Assemblée nationale du 12 juin 2018
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