Après 14 ans de présence festive dans les rues du pays de Morlaix (Finistère), le Festival des arts de la rue (Far) baisse son pavillon. Avec amertume, comme le confie Claude Morizur, le co-directeur du Fourneau, l’un des neuf centres nationaux des arts de la rue labellisés en France (voir encadré), à l’origine de cette manifestation.
« Nous n’avons pas vu le coup venir », reconnaît-il, faisant allusion à la décision prise en novembre 2010 par Morlaix Communauté de réviser unilatéralement le montant de ses engagements financiers auprès du FAR.
Dans des conditions presque rocambolesques, l’adjointe en charge de la culture ayant maladroitement modifié les montants à la main sur le document de convention que s’apprêtaient à signer les partenaires du festival, dont :
- la Drac,
- le conseil régional de Bretagne,
- le conseil général du Finistère,
- la ville de Brest…
La subvention de Morlaix Communauté qui s’élevait à 80.000 euros en 2010 aurait ainsi été amputée progressivement de 60.000 euros d’ici à 2013.
Devant la remise en cause de l’équilibre budgétaire de cet événement doté d’un budget de fonctionnement de 295.000 euros, le Fourneau a décidé de jeter l’éponge.
Le 30 janvier 2011, après plusieurs semaines « douloureuses », son conseil d’administration a voté à l’unanimité la cessation de son engagement sur ce territoire. « Nous allons déployer notre projet sur un territoire plus vaste, en lien avec d’autres réseaux, dont celui des scènes nationales. 2011 sera une année de transition, mais nous recevons déjà de nombreuses sollicitations dans tous les secteurs, de la part d’intercommunalités ou d’associations, comme le Festival des Vieilles Charrues à Carhaix », explique Claude Morizur.
Autre dimension dans laquelle le Fourneau pousse ses feux : l’international, notamment en Amérique latine, au Chili, mais aussi en Europe à travers le réseau Zepa (Zone européenne de projets artistiques), projet culturel franco-britannique qui s’inscrit dans le cadre du programme européen Interreg IV.
Quant à Morlaix Communauté, qui, ironie de l’histoire, ne dispose pas de la compétence « culture », et n’a donc aucun service dédié en son sein, ses élus indiquent réfléchir à de nouvelles initiatives dans le domaine du spectacle vivant. Sans doute à moindre coût. Mais certainement sans le savoir-faire du FAR.
Le Fourneau, mode d’emploi
Créé il y a 18 ans au Relecq Kerhuon, près de Brest, le Fourneau occupe une place singulière dans le paysage des arts de la rue en Bretagne.
Cet établissement de création et de production artistique dans l’espace public est basé sur le Port de commerce de Brest. C’est l’un des neuf Centres nationaux des arts de la rue labellisés en France.
Il articule son projet autour de trois pôles d’activités :
- le soutien à la création
- la programmation nomade
- une activité ressources/recherche/formation
Son site internet www.lefourneau.com offre une mine d’informations sur sa programmation et sa philosophie.
Réponse de Morlaix Communauté à notre article
Morlaix Communauté, par la voix de Yvon Hervé, président de Morlaix-Communauté, Annie Loneux Vice-présidente Culture Yves Moisan Conseiller délégué à la Communication a souhaité réagir à plusieurs informations contenues dans notre article.
- Morlaix Communauté juge le titre de l’article « inapproprié : en effet, son désengagement est une décision unilatérale du Fourneau, qui a considéré que les conditions n’étaient plus réunies pour la poursuite de son activité en pays de Morlaix, mais ceci après avoir dans un premier temps accepté les évolutions budgétaires proposées par la collectivité ».
- Morlaix Communauté précise que le budget global alloué au Fourneau « pour sa programmation en 2010 dans les communes (ville et communes rurales) était de 160 000 euros. Morlaix-Communauté, qui, en 2009, avait dû compenser le désengagement financier de la ville-centre (moins 60 000€) pour le FAR de Morlaix, a souhaité, dans un contexte de projections budgétaires revues à la baisse résultant des nouvelles dispositions fiscales, réduire progressivement de 10 000 € par an à compter de 2011 sa dotation globale au Fourneau (avec une inscription de 580 000 € pour la durée de la convention quadriennale au lieu des 640 000 € demandés). S’ajoutaient à ce subventionnement environ 10 000 € par an de frais divers à la charge de la collectivité, ainsi que 10 000 € environ de participation des communes, sans oublier en sus la valorisation des services techniques. En tout état de cause pour l’année 2011, le Fourneau disposait d’un budget suffisant, ayant, d’un commun accord avec la collectivité, réduit l’amplitude de son programme annuel (animation dans trois communes rurales au lieu de quatre).
- Morlaix communauté estime par ailleurs que la relation des faits concernant la signature de la convention dans notre article est « orientée : En réalité, Le Fourneau ayant présenté, annexé à la convention d’objectifs, un plan financier pluriannuel n’ayant pas enregistré les modifications budgétaires qui lui avaient été dûment signifiées au cours d’une table ronde réunissant les partenaires de la convention, le Président n’a pas eu d’autre choix que de le signaler par une petite note rectificative portée en marge de ce document annexé à la convention. Il est utile de préciser que, dans la mesure où elle préfigurait une projection financière sur trois ans, cette annexe n’avait pas de valeur contractuelle, en application de la règle de l’annualisation budgétaire régissant les collectivités publiques, la partie contractuelle de la convention d’objectifs ayant été signée par le Président sans aucune modification !
Le Président de Morlaix-Communauté a parfaitement respecté les seuls engagements qui avaient été votés par délibération du conseil communautaire, à savoir : signature de la convention d’objectifs et versement de la subvention 2010 sans modification (soit 160 000 €). - Morlaix Communauté revient sur les propos recueillis de Claude Morizur, co-directeur du Fourneau. « Comment justifie-t-il alors la proposition de programmation 2011 qu’il a lui-même adressée au Président de Morlaix-Communauté suite à la table ronde, programmation réduite et redéployée sur le territoire pour tenir compte de la réduction de la subvention de Morlaix-Communauté et du désengagement de la ville-centre ?
- Enfin, Morlaix Communauté souligne que « certes Morlaix-Communauté ne dispose pas, comme vous l’indiquez, de la compétence culture mais néanmoins le soutien aux arts de la rue est inscrit dans ses statuts. Morlaix-Communauté, contrairement à ce qui est affirmé dans l’article, dispose d’un service culture mais pour autant ne prétend pas lui confier l’organisation d’un nouveau programme d’animation. Ce n’est pas Le Fourneau qui a inscrit les arts la rue dans l’histoire de Morlaix, une belle programmation arts de la rue existait à Morlaix avec le concours d’autres opérateurs bien avant le partenariat avec Le Fourneau, et le spectacle vivant dans l’espace public peut donc survivre au désengagement du Fourneau ! »
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