Lyon, Marseille, Lille, Toulouse, Nantes, Bordeaux, Strasbourg, Rennes, Montpellier, et Paris bien sûr… Que ce soit pour du logement ou des activités tertiaires, les grandes villes françaises montent à nouveau dans les tours ! « Oui, nous observons une réémergence des tours, notamment dans les métropoles », souligne Gérard Penot (Atelier Ruelle), Grand Prix de l’urbanisme 2015. « Dans un quartier d’affaires, c’est une figure plutôt attendue », ajoute-t-il. Mais désormais Paris – La Défense n’est plus le seul territoire français à gratter le ciel.
Pyramide de bureaux de 180 mètres de haut, Porte de Versailles à Paris (2,2 millions d’hab.), la tour Triangle devrait lui faire écho dans les années à venir. A Lyon (500 700 hab.), Incity – la Gomme pour les intimes – culmine à 202 mètres, bien au-delà de la tour Part-Dieu – le Crayon – montée en 1977 à 165 mètres et de la tour Oxygène, qui pointe à 110 mètres de haut. La capitale des Gaules attend désormais To-Lyon et ses 170 mètres de haut (43 étages), qui complétera le paysage en 2022.
A Marseille (858 100 hab.), il est aussi question d’une « skyline », dans laquelle La Marseillaise prend progressivement ses aises. Signée Jean Nouvel, cette tour face à la mer, de 135 mètres de haut sur 31 niveaux et 35 000 mètres carrés, devrait être livrée courant 2018.
Lille (231 500 hab.) vise également les 135 mètres pour la future tour dans laquelle la métropole européenne, la MEL, installera ses bureaux, au cœur d’Euralille. Maxime Bitter, directeur « urbanisme, aménagement et ville » à la MEL, insiste sur l’aspect « symbolique et marqueur de paysage et sur la dimension dynamique de la tour, dans une ville au tissu urbain plutôt dense mais bas ».
Maître de conférences en géographie et aménagement à l’université de Lyon 2, Manuel Appert étudie cette « verticalisation des villes » depuis quelques années. Une façon pour les métropoles concernées d’envoyer un message à leurs voisins ou au monde entier : « la tour est utilisée comme un flambeau, un signal de quartier qui marque la transformation de la ville ».
Retour en catimini
En revanche, ce retour ne s’effectue pas forcément en grande pompe. Les élus avancent parfois à tâtons, comme c’est le cas à Lille. Un projet de tour, dans le quartier Vauban a été enterré, en raison de l’opposition des habitants. Résultat, le plan local d’urbanisme intercommunal en discussion devrait identifier des secteurs où, selon Maxime Bitter, ces « accidents urbains que sont les tours seront autorisés ». Ce sera le cas dans « des zones de projets telles qu’Eurallile ». Mais pas dans les zones dites de « dents creuses » (espaces non construits entourés de parcelles bâties, ndlr). En matière résidentielle aussi, la méfiance est reine. « Il persiste une certaine méfiance à introduire du logement dans une tour, a fortiori du logement social », développe Gérard Penot. Une référence aux perceptions négatives des grands ensembles érigés dans les années 60. « Le traumatisme est encore présent », confirme Geoffrey Mollé, en première année de thèse de géographie urbaine à l’université de Lyon 2. « C’est bien simple, on évite souvent d’employer le mot tour », constate ce chercheur qui a comptabilisé 75 projets de tours résidentielles tout juste sorties de terre ou qui émergeront d’ici à 2020 dans l’Hexagone. Sur les plaquettes commerciales, point de « tour » donc, mais une « émergence » par-ci, un « regard », un « point de vue » ou un « complexe panoramique » sur la ville, par-là. Il est aussi question de « signal », de « domination », d’« icône » voire, étape supérieure en matière de marketing urbain, de « sky avenue » ou de « sky home »…
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Gazette des Communes, Club Techni.Cités
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