Les agents de l’ex-région Poitou-Charentes en ont gros sur le cœur. Une partie d’entre eux l’a fait savoir jeudi 24 mars par un « pique-nique de protestation » organisé dans la cour de la Maison de la région à Poitiers (Vienne). Une action symbolique destinée à interpeller sur le traitement dont ils font l’objet depuis qu’Alain Rousset a été élu à la tête de la nouvelle grande région Aquitaine-Limousin-Poitou-Charentes (ALPC). Ou, plus précisément, depuis qu’il a découvert et largement communiqué sur l’ardoise de 132 millions d’euros de factures impayées de la région longtemps dirigée par Ségolène Royal. Ardoise qui s’élèverait au total à 400 millions d’euros aujourd’hui si on inclut les 130 millions d’euros de dettes potentiellement toxiques, des éléments de sous-budgétisation et les frais de renégociation de la dette. Un audit financier de Poitou-Charentes, mais aussi des deux autres régions, est en cours.
Ni responsable, ni coupable
En attendant, les représentants syndicaux du site de Poitiers dénoncent un « contexte politico-médiatique délétère » et « une incompréhension grandissante ». « Nous avons le sentiment d’être punis pour une situation financière dont nous ne sommes aucunement responsables. Il y a un malaise profond chez les agents, en plus de l’anxiété liée à la fusion », rapporte David Bévière, élu CFDT au comité technique de la région ALPC.
A cela s’ajoute une impression de « mise sous tutelle » avec le parachutage d’Alexandre Piton, recruté en 2015 par Alain Rousset comme directeur général adjoint chargé de la fusion. Il a été nommé directeur général adjoint territorial sur le site de Poitiers, suite au limogeage du DGS, du directeur financier et de la DRH picto-charentais, « pour perte de confiance » justifie Jean-Baptiste Fauroux, DGS de la région ALPC. A Limoges, c’est l’ancienne DGS de la région Limousin Cécile Vernhes-Daubrée, qui assure la direction générale adjointe territoriale.
Nouvel organigramme
Au siège bordelais, on se défend de toute forme d’ostracisme. « Il n’est absolument pas question de chasse aux sorcières. Les autres DGA de Poitiers exercent la plénitude de leurs fonctions », assure Jean-Baptiste Fauroux. Auront-ils pour autant une place dans le nouvel organigramme ? Rien n’est encore décidé. Seule l’architecture de la future organisation a été présentée en comité technique le 24 mars dernier. Et soumise pour examen et propositions de modifications aux représentants syndicaux, « dans un souci d’apaisement et de co-construction », signale Jean-Baptiste Fauroux.
Mais déjà David Bévière dénonce la direction générale centralisée à Bordeaux : « On va concevoir à Bordeaux et exécuter à Poitiers et Limoges », estime-t-il. « Les choses ont été claires pendant la campagne sur ce point. Alain Rousset a toujours dit qu’il souhaitait une direction générale à Bordeaux et un secrétaire général de site à Poitiers et Limoges, sans fonction hiérarchique mais avec un rôle de coordination et d’animation », rappelle Jean-Baptiste Fauroux. « Il est aussi prévu que se tiennent des réunions d’élus sur les sites », signale Cécile Vernhes-Daubrée.
5 ans pour harmoniser
Comme si cela ne suffisait pas, les agents de l’ex-conseil régional picto-charentais bénéficient d’un régime indemnitaire plus favorable que leurs collègues d’Aquitaine et du Limousin. Tellement favorable qu’un audit a, là aussi, été commandé pour en vérifier les fondements. Légal ou pas, « il n’est évidemment pas question, et de toute façon impossible, de baisser les salaires », assure Jean-Baptiste Fauroux.
Mais peut-être de réduire les effectifs, comme le craignent les organisations syndicales ? « Aujourd’hui, à Poitiers les postes vacants ne sont pas remplacés », constate David Bévière. Ce que réfute Jean-Baptiste Fauroux : « Il y a pu y avoir le gel de certains postes en prévision de la nouvelle organisation. Mais pour le reste nous opérons les recrutements normalement. » Le DGS de la nouvelle grande région qui promet par ailleurs qu’il n’y aura « aucune baisse d’effectifs sur les sites de Poitiers et de Limoges, ni mobilité forcée ».