Au cours des dĂ©bats sur la rĂ©forme des retraites de la fonction publique, la retraite additionnelle a fait l’objet de critiques : assiette de cotisation trop petite, existence de l’ERAFP trop rĂ©cente ; la RAFP ne gĂ©nèrerait pas un « vĂ©ritable » complĂ©ment de retraite…
L’ERAFP a Ă©tĂ© créé avec le souci de respecter l’Ă©quitĂ© intergĂ©nĂ©rationnelle, c’est Ă dire de faire payer le vrai prix de la retraite afin d’assurer une prestation Ă©quitable aux bĂ©nĂ©ficiaires actuels mais aussi futurs. C’est guidĂ© par ce principe que le conseil d’administration a fixĂ© l’Ă©quilibre de dĂ©part du rĂ©gime tel que le rĂ©sume son rendement technique.
En clair, quand l’ERAFP a Ă©tĂ© mis en place, il a Ă©tĂ© dĂ©cidĂ© qu’un euro de cotisation versĂ© au RAFP permettait d’acheter un point qui lui-mĂŞme donnerait droit Ă une rente viagère de 4 centimes d’euros. Le rendement technique – le rapport entre la valeur de service du point et sa valeur d’acquisition – est de 4,075 % en 2009. Cela signifie qu’il faudra 25 ans pour rĂ©cupĂ©rer l’argent placĂ©. C’est long et le rendement est faible, certes, mais on ne vend pas de fausse monnaie !
Le rĂ©gime de la RAFP est solide, Ă la diffĂ©rence de certains rĂ©gimes qui affichent des rendements de 12%, voire plus. Un rendement de 12% signifie qu’il suffit de 8,5 annĂ©es pour rĂ©cupĂ©rer ses cotisations. Est-ce raisonnable au regard de ce que nous savons de l’espĂ©rance de vie Ă 60 ans ? Les jeunes cotisants peuvent-ils espĂ©rer dans 20, 30 ou 40 ans bĂ©nĂ©ficier des mĂŞmes prestations ? Personnellement j’en doute.
J’interpelle ceux qui nous reprochent notre prudence et la modicitĂ© du rendement technique : que nous suggĂ©rez-vous ? Des fonds de pension Ă l’anglo-saxonne qui « tirent des plans sur la comète » et escomptent des taux de rentabilitĂ© de leur placements beaucoup trop optimistes, ce qui d’ailleurs pousse Ă investir dans des actifs très risquĂ©s tels que ceux de Madoff ?
Notre conseil d’administration est très clair sur ce point : nous devons ĂŞtre très prudents dans la manière dont nous escomptons l’avenir, c’est Ă dire dont nous prenons en compte les rendements de nos futurs placements. La durĂ©e moyenne de nos engagements porte sur 30 ans. C’est ce qui nous diffĂ©rencie de l’assurance-vie.
La durĂ©e de montĂ©e en charge de l’ERAFP sera très longue et ce n’est que dans une quarantaine d’annĂ©es qu’il parviendra Ă sa pleine charge. Pendant de nombreuses annĂ©es, le rĂ©gime va recevoir des cotisations dont le montant sera très supĂ©rieur aux prestations versĂ©es. Le solde net ( cash flow net positif) permettra Ă l’ERAFP d’investir plus d’1 milliard d’euros par an pendant les 20 prochaines annĂ©es.
La secrĂ©taire fĂ©dĂ©rale de la CGT, Sandrine Mourey, a Ă©mis le souhait de voir l’ERAFP disparaĂ®tre…
L’ ERAFP est le seul « vrai » fonds de pension, crĂ©e par l’Etat, gĂ©rĂ© par un conseil d’administration composĂ© notamment de 8 reprĂ©sentants syndicaux (plus 8 reprĂ©sentants des employeurs et 3 personnalitĂ©s qualifiĂ©es), parmi lesquelles la CGT. La CGT contribue donc Ă dĂ©finir la politique de gestion de l’ERAFP ! La position de la CGT peut donc paraĂ®tre Ă©tonnante.
Je rappelle que l’ERAPF a Ă©tĂ© mis en place par la rĂ©forme Fillon, en 2003. A l’Ă©poque, les primes et rĂ©munĂ©rations accessoires – 22 Ă 23% de la rĂ©munĂ©ration en moyenne – ne faisaient pas l’objet de cotisation pour la retraite. Le taux de remplacement de 75% n’Ă©tant calculĂ© que sur la seule base du traitement indiciaire.
Certains syndicats militaient pour que les primes soient intĂ©grĂ©es dans le traitement de base. Plusieurs d’entre eux Ă©taient farouchement opposĂ©s Ă un fonds de pension gĂ©rĂ© en points selon la technique de la capitalisation.
Nombreux étaient ceux qui pensaient que le gouvernement ne pouvait pas intégrer les primes dans le traitement de base pour plusieurs raisons :
- Il est impossible d’harmoniser les grilles de la fonction publique ;
- Les primes sont une variable d’ajustement nĂ©cessaire de la rĂ©munĂ©ration ;
- Comme dans le privé, les primes ne sont pas cotisées, elles coûtent moins cher.
Un accord s’est finalement dĂ©gagĂ© autour de la mise en place d’un rĂ©gime de retraite en rĂ©partition intĂ©gralement provisionnĂ©. La retraite additionnelle a Ă©tĂ© créée, mais son assiette est plafonnĂ©e Ă 20% du traitement indiciaire. C’est ce que l’on appelle l’effet d’Ă©crĂŞtement. Les fonctionnaires cotisent dĂ©sormais sur leurs primes, mais dans la limite de 20% du traitement indiciaire. Les montants ainsi plafonnĂ©s sont soumis Ă un taux de cotisation de 10%, rĂ©parties Ă parts Ă©gales entre employeurs et fonctionnaires. Elles reprĂ©sentent 1 milliard 700 millions d’euros par an.
Les fonds de l’ERAFP sont placĂ©s sur les marchĂ©s boursiers. N’est-ce pas dangereux de spĂ©culer avec la retraites des fonctionnaires ?
La RAFP est un système prĂ©financĂ©, Ă©tabli sur le modèle de la rĂ©partition, intĂ©gralement provisionnĂ©e. C’est le placement de l’argent cotisĂ© qui va permettre d’honorer la promesse faite aux cotisants et aux bĂ©nĂ©ficiaires. Notre mission consiste Ă faire en sorte que la façon dont on place l’argent permette de reverser la prestation promise mĂŞme si le versement de celle-ci interviendra dans 40 ans pour les plus jeunes de nos cotisants.
Pour ce faire, notre conseil d’administration pratique une politique financière de l’Investissement socialement responsable (ISR) qui consiste Ă concilier performance financière, maĂ®trise des risques et engagement socialement responsable. Les 5 valeurs sur lesquelles repose l’ISR sont :
- Etat de droit et droits de l’homme
- Progrès social
- Démocratie sociale
- Environnement
- Bonne gouvernance et transparence
En rĂ©sumĂ©, l’ERAPF peut investir dans tout ce qui autorisĂ© est par l’Etat et qui se positionne par rapport Ă ces enjeux. Nous avons une approche pragmatique. On n’exclut pas, par exemple, d’investir dans le nuclĂ©aire si les sociĂ©tĂ©s ont des positions qui respectent nos prĂ©occupations. Nous n’avons pas de posture morale. On prend l’Ă©conomie telle qu’elle est.
Dans les faits, l’essentiel des actifs du rĂ©gime sont des obligations souveraines ou assimilĂ©es (Banque mondiale, CADES, grandes collectivitĂ©s locales, etc.) Ces actifs reprĂ©sentent 83% de l’actif du rĂ©gime.
Pour ce qui est du portefeuille d’actions, l’ERAFP a confiĂ© sa gestion
- pour les actions dite « zone Euro » Ă
- IDEAM,
- Robeco AM,
- BNP Paribas AM
- Pictet AM.
- pour les actions internationales Ă
- Allianz
- State Street
Les gĂ©rants sĂ©lectionnĂ©s s’engagent Ă optimiser le rendement financier des fonds comme la performance ISR. Cela signifie que ne peuvent entrer dans notre portefeuille que des Ă©metteurs qui atteignent une note minimale au point de vue ISR. La seule performance financière en saurait suffire Ă les rendre acceptables.
Nous n’avons en revanche aucun lien organique avec la Caisse des DĂ©pĂ´ts.
L’ERAFP a Ă©tĂ© mis en place par la loi d’aoĂ»t 2003 ; les fonctionnaires cotisent depuis 2005. Combien de cotisants peuvent Ă ce jour liquider leur retraite additionnelle en rente ?
L’ERAFP compte 4, 7 millions de cotisants. Les investissements rĂ©alisĂ©s Ă ce jour s’Ă©lèvent Ă 9 milliards d’euros. Le nombre minimum de points qu’il faut atteindre pour partir avec une rente a Ă©tĂ© fixĂ© Ă 5.125 points. Sachant que la valeur du point est de 0,04108 euros et que la rente minimale a Ă©tĂ© fixĂ©e Ă 18 euros par mois, il y a, Ă ce jour, assez peu de bĂ©nĂ©ficiaires qui partent avec une rente. Bien Ă©videmment, ce nombre va augmenter assez rapidement pendant les prochaines annĂ©es.
Références
- Téléchargez le rapport de gestion 2008 de l'ERAPF
- Loi n° 2003-775 du 21 août 2003 portant réforme des retraites (article 76)
- Décret n° 2004-569 du 18 juin 2004 relatif à la Retraite additionnelle de la Fonction publique
- Arrêté du 26 novembre 2004 portant application du décret n° 2004-569 du 18 juin 2004 relatif à la Retraite additionnelle de la Fonction publique
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