Prenant la mesure du lourd tribut payé à la crise par le BTP limousin, 1500 emplois et près de 3000 emplois induits perdus depuis 2010, les services de l’Etat veulent relancer la machine. Pour ce faire, la préfecture vient d’organiser des assises de la commande publique ce 19 février. Le but : « former et informer entreprises et collectivités pour lutter contre les idées reçues », explique le préfet Laurent Cayrel.
Reconnaissant que « les collectivités sont sous le choc de la réduction des dotations » il estime néanmoins qu’ « elles ont parfois une vision fausse de la situation. » En effet, si les budgets de fonctionnement baissent, les subsides dédiés à l’investissement augmentent. La dotation d’équipement territorial et rural (DETR) 2014-2015 a ainsi augmenté en moyenne de 40% sur la région. Mais les chiffres disent aussi que cet effort ne se traduit pas par une réinjection dans l’économie locale. En 2013, les trois départements ont investi 521 millions d’euros dans le BTP, un montant en baisse.
« Les collectivités privilégient le fonctionnement à l’investissement »
Jean-Paul Bardet, président de la fédération française du bâtiment 87 (FFB) souscrit. Il estime que « les collectivités privilégient le fonctionnement à l’investissement. » Son constat est amer : « ici, la commande publique fait défaut, et les chiffres de janvier confirment que c’est une tendance de fond. Février est pourtant le mois du retour des grues, mais à Limoges il n’y en a qu’une, c’est celle de la cité judiciaire ! »
Les premières victimes restent les entreprises locales. « Il est regrettable, note la préfecture, qu’un certain nombre de marchés échappent aux entreprises locales. » TPE et PME ont en effet le plus grand mal à accéder aux marchés publics d’ampleur. Ainsi en France en 2013, les PME représentaient 58 % des commandes, mais seulement 27 % des sommes investies. Laurent Cayrel pointe tant la prudence et une interprétation parfois trop stricte du code des marchés publics par les collectivités, qu’un manque de préparation des entreprises. « D’un côté nous avons les collectivités qui, pour éviter que leurs choix ne soient remis en cause se bornent à une stricte lecture du code des marchés publics, notamment en choisissant systématiquement l’offre la moins chère, au mépris de dispositions certes plus complexes, mais plus pertinentes pour garder les entreprises locales dans la course. Et de l’autre, les entrepreneurs qui ne sont pas rompus au langage des administrations, et sont démotivés à l’idée de répondre à un appel d’offre. »
Conjoncture locale propre
A cela s’ajoute selon le préfet « une conjoncture propre au Limousin. D’abord en termes de bâti puisque les besoins, notamment en logements sociaux, sont très honorablement satisfaits ; mais aussi en termes démographiques car ici la population ne progresse pas ou peu. Ce qui ne veut pas dire qu’il n’y a pas besoin d’investissements, mais qu’ils doivent être pensés autrement, par exemple sous l’angle de l’amélioration énergétique. »
Le succès de ces assises, qui ont réunis près de 300 entreprises, acheteurs publics et élus, traduit un besoin réel d’information et de dialogue. A cette occasion, douze « ambassadeurs des marchés publics » ont été installés. Entrepreneurs privés issus du territoire, ils joueront le rôle d’interface entre collectivités et entreprises, devront centraliser l’information, mais aussi accompagner les entreprises, les encourager lorsque c’est nécessaire à se regrouper pour combiner leurs compétences et devenir plus compétitives dans la course aux marchés.
Une charte des bonnes pratiques complète le dispositif. En effet, si elles reconnaissent être désemparées face aux rouages des appels d’offre, les entreprises locales disent aussi souffrir de la méconnaissance qu’ont les administrations du fonctionnement des entreprises privées. Un comité de suivi veillera à ce que les engagements soient respectés de part et d’autre. Confiant, le préfet du Limousin estime : « nous devrions voir les premiers effets d’ici la fin d’année. »
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