S’agit-il d’une durable inversion de tendance ? L’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe) veut y croire : de 2008 à 2010, les coûts de gestion des déchets ménagers et assimilés ont diminué du fait de l’essor du tri et de la valorisation, évolution que devraient à l’avenir conforter les politiques de prévention menées par les collectivités.
Après avoir crû en moyenne de 6 % par an pendant une décennie, le coût de la gestion des déchets a baissé de 5 % entre 2008 et 2010, selon l’enquête réalisée par l’Ademe auprès de 177 collectivités (12,4 millions d’habitants) ayant renseigné sa « matrice des coûts ». Il s’établit ainsi à 85 euros par habitant (déchets recyclables et résiduels confondus), après déduction des diverses recettes (produits de vente de matériaux et d’énergie, soutiens des éco-organismes, subventions). Cette moyenne masque une dispersion allant de 59 à 107 euros par habitant.
Le bac jaune au même prix que le bac gris – Le recul du coût du service public est d’abord dû à la croissance des apports en déchetteries, flux beaucoup moins coûteux que ceux collectés en porte-à-porte, expliquent les experts de l’Ademe. Une tendance appelée à se poursuivre avec la multiplication des filières sous « responsabilité élargie du producteur » (Rep), comme les meubles et les produits de bricolage et d’entretien (peintures, solvants …), qui recourront au regroupement des flux dans les 4 500 déchetteries des collectivités.
Joue aussi à la baisse la légère hausse des quantités d’emballages et papiers recyclables, collectés sélectivement – et sources de recettes. « Aujourd’hui, l’écart de coût est quasi-nul entre le recyclable et le résiduel », souligne l’économiste Aude Andrup : il est en effet de 198 €/t pour le premier flux (hors verre) et de 199 €/t pour le second. En zone rurale, où la performance de tri est deux fois plus élevée qu’en milieu urbain (par ailleurs sous-équipé en déchetteries), le recyclable coûte d’ores et déjà moins cher que le résiduel. Pour certaines collectivités rurales où la collecte se fait en apport volontaire, les rentrées financières (soutiens d’Eco-Emballages et d’Ecofolio et recettes de vente de matériau) sont même supérieures aux charges. Au plan national, il reste des marges de progrès : « En moyenne, encore la moitié des emballages et papiers finissent encore dans la poubelle des déchets résiduels », observe Cheverry, chef du service prévention et gestion des déchets.
L’optimisation des centres de tri, notamment par le biais de l’automatisation, est un autre facteur de baisse des coûts.
TGAP à conforter – Pour la fraction résiduelle de la poubelle, les coûts sont appelés à poursuivre leur hausse, du fait de l’augmentation programmée de la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) sur l’incinération et le stockage, observe Pierre Galio, chef du service planification et observation des déchets. L’Ademe plaide pour une suppression de certaines modulations du taux de TGAP, comme celle accordée aux unités d’enfouissement et d’incinération certifiées ISO 14001, qui bénéficie aujourd’hui à plus 90 % des installations et des tonnages. « L’incitation à adopter un système de management environnemental a joué son rôle, la mesure n’est plus d’actualité », juge Marc Cheverry. Du fait des diverses modulations, « le taux de TGAP sur le stockage est de 14 €/t alors qu’il devrait être de 20 €/t, compare Pierre Galio. Pour l’incinération, il s’établit dans les faits à 3 €/t contre un taux théorique de 7 €/t ».
Plus de la moitié du produit TGAP alimente le budget « déchets » de l’Ademe, l’Etat s’appropriant le solde. Face à l’ancien Premier ministre François Fillon, invité le 6 juin de l’émission « Des paroles et des actes » (France 2), le ministre du Budget Bernard Cazeneuve citait l’Ademe comme l’un des « opérateurs » de l’Etat au sein desquels le gouvernement allait « procéder à une diminution des dépenses de façon très significative ».