Appelé à se prononcer sur la conformité au principe constitutionnel de laïcité du régime concordataire d’Alsace-Moselle, le Conseil constitutionnel, dans un surprenant considérant n° 6, se réfère aux travaux préparatoires du projet de la Constitution du 27 octobre 1946 (relatifs à son article 1er) ainsi qu’à ceux du projet de la Constitution du 4 octobre 1958 (« qui a repris la même disposition ») pour affirmer :
…en proclamant que la France est une « République… laïque », la Constitution n’a pas pour autant entendu remettre en cause les dispositions législatives ou règlementaires particulières applicables dans plusieurs parties du territoire de la République lors de l’entrée en vigueur de la Constitution et relatives à l’organisation de certains cultes et, notamment, à la rémunération de ministres du culte » (1).
Outre la référence aux travaux préparatoires, inattendue s’agissant d’une Constitution adoptée par référendum, le considérant est surprenant car avant l’apparition de la question prioritaire de constitutionnalité (QPC) dans le droit français (entrée en vigueur le 1er mars 2010), aucun contrôle de constitutionnalité n’était susceptible de s’exercer a posteriori sur les lois françaises (sauf cas particulier d’un contrôle a posteriori induit par le contrôle a priori d’une loi modificative).
Par conséquent, en l’absence de contrôle a posteriori de la constitutionnalité des lois, la consécration par le Constituant (en particulier celui de 1958) d’une liberté ou d’un droit fondamental ne pouvait avoir pour objectif de remettre en cause des dispositions législatives déjà en vigueur.
Nouvelle limite à la QPC ? – A travers la décision n° 2012-297 QPC du 21 février 2013, faut-il donc comprendre que le Conseil constitutionnel vient implicitement d’ajouter une nouvelle condition de recevabilité des QPC ? Les QPC portant sur des dispositions législatives entrées en vigueur avant 1958 sont-elles désormais irrecevables ou vouées systématiquement au rejet au motif que la Constitution de 1958 n’a pas entendu les remettre en cause ?
Ou bien faut-il admettre, pour les QPC, que certaines décisions de rejet du Conseil constitutionnel, alors même que celui-ci n’est pas une cour suprême, s’apparentent à des décisions d’espèce ?
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