Un assemblage d’outils cherchant Ă faire plier le numĂ©rique par la loi et l’infrastructure est inopĂ©rant face Ă l’environnement dĂ©centralisĂ©, participatif et dĂ©rĂ©gulĂ© propre Ă un jeu d’acteurs numĂ©risĂ© et connectĂ©.
Tandis que le numérique politique offre de réelles possibilités de sortir par le haut des étranglements de la société. Cela suppose une orientation autre de la posture régalienne et une redéfinition du jeu des acteurs.
Absence d’un projet politique – L’Open Data, mouvement d’ouverture des donnĂ©es, est d’abord politique. Ses propositions inscrivent dans les territoires la volontĂ© de transparence, d’efficacitĂ©, de proximitĂ© du service public, voulues par les derniers mouvements de dĂ©centralisation.
Ensuite ce projet nait d’une hypothèse de politique libérale, où l’Etat pour produire du service public, libère les données sur lesquelles repose son exercice, et délègue tout ou partie du service.
Mais si la promesse est allĂ©chante, rien ne contraint les entreprises de service et d’information Ă produire du service rĂ©ellement public. Dès lors, la simple ouverture d’un patrimoine de donnĂ©es ne fait pas un projet politique. Et pour l’heure, il n’est qu’un leurre, sans incidence ni sur la vie publique, ni sur l’Ă©conomie.
Les donnĂ©es : un bien commun – Pour rĂ©ussir, une telle approche implique une dynamique de « bien commun », appuyĂ©e sur un jeu d’acteurs qui assume ce bouleversement sociologique et politique.
Pour ĂŞtre Ă©quitable, viable et efficiente, un numĂ©rique politique suppose de consolider le flux des donnĂ©es de la puissance publique avec ceux des entreprises et des citoyens. En clair, la valeur des donnĂ©es rĂ©side dans les infrastructures sociales, renforçant l’observation de ValĂ©rie Peugeot : « La donnĂ©e n’est pas de l’or, c’est une construction sociale. »
Seule une pratique fondĂ©e sur de justes Ă©changes garantit que les entreprises se plient aux usages escomptĂ©s de ces donnĂ©es, en tirant partie des bĂ©nĂ©fices attendus. Ceci dĂ©place le rĂ´le du rĂ©galien vers le respect des conditions d’élaboration et d’usage de ce bien commun.
Le consommateur-producteur – Dans cette hypothèse, le consommateur de service public se rĂ©vèle le premier producteur des flux alimentant ces services. Ce glissement de la consommation passive Ă l’usage responsable est le pivot du passage au numĂ©rique politique.
Il dessine un système complexe de fines interdépendances et non une chaine d’actions de masse.
L’actualitĂ© rĂ©cente Ă©claire cette vision. Le rapport Colin et Collin, rappelle la prĂ©gnance de l’Ă©conomie numĂ©rique, armĂ©e par la contribution gratuite de donnĂ©es personnelles. Cet encouragement Ă dĂ©passer l’abondement public de l’Open data s’ouvre sur des services innovants Ă l’usager, dans un modèle rĂ©tro-actif « usager-services ».
A une autre encoignure, Colin et Verdier dans « L’âge de la multitude » cĂ©lèbrent le paradigme de la plate-forme contributive, au travers des fulgurances d’Amazon. Ce bolide monstre cassant tous les codes, Ă©prouve les vertus du « travail des autres » (entendre la « multitude » et ses contributions illimitĂ©es). Leurs innombrables innovations sont captĂ©es dans un modèle dont l’opĂ©rateur est le premier Ă entrevoir et Ă dĂ©ployer la puissance.
Dans ce sillage, Gabriel Plassat de l’Ademe, se fondant sur l’exemple du fil twitter @waze et de ses 36 millions d’abonnĂ©s, dĂ©crit une « plate-forme des mobilitĂ©s » se gavant des apports inĂ©puisables et gracieux des usagers et des dĂ©veloppeurs … mais Ă l’usage du collectif.
Aux acteurs publics de prendre la main – Si ces exemples montrent le potentiel de co-construction de services, aucun territoire n’a encore entrepris d’imaginer les protocoles d’apport et de circulation de ces donnĂ©es conjuguĂ©es pour en extraire les intelligences ; aucun acteur public n’a investi une plate-forme de crĂ©ation sociale qui Ă©prouverait sur les territoires ces visions.
Pourquoi les autorités publiques ne sauraient-elles pas animer de telles plateformes collaboratives et apporter sur le même mode des solutions aux défis énormes des métropoles ?
Pourquoi la puissance publique se priverait-elle de tels gisements de croissance ?
Sans doute parce que le politique persiste dans une approche industrielle et non numĂ©rique de la production de valeur ; ce que rĂ©vèle l’appel au rapatriement de la chaĂ®ne de valeur du traitement des donnĂ©es personnelles comme l’ont fait les ouvriers du coton indien il y a cent ans !
Le numĂ©rique politique suppose d’agir sur le monde avec les outils d’aujourd’hui, de s’inscrire de manière pragmatique en animateur de plateformes partagĂ©es et de garantir les conditions de production de ces services. Seul cet espace de partage est capable d’aborder les dĂ©fis de nos sociĂ©tĂ©s. Nous avons besoin d’un numĂ©rique politique.
InitiĂ© par le cabinet Chronos et le Hub Agence, DatAct est un programme de coproduction rĂ©unissant près de 40 entreprises et collectivitĂ©s territoriales depuis 3 ans. Ces acteurs travaillent Ă l’Ă©laboration de schĂ©mas de partages de donnĂ©es pour la coproduction de services urbains.








