Depuis le 1er septembre 2025, et jusqu’aux élections municipales des 15 et 22 mars 2026, la communication des élus et des communes est particulièrement encadrée. Le code électoral interdit, durant cette période préélectorale, l’utilisation de tout procédé de publicité commerciale à des fins de propagande électorale (article L52-1) ou encore la participation d’une collectivité au financement de la campagne électorale d’un candidat (article 52-8). Les réseaux sociaux n’échappent pas à ces règles.
Mais il existe encore quelques incertitudes concernant leur utilisation dans le cadre d’une campagne électorale locale, selon Philippe Bluteau, avocat spécialiste en droit public : « Il pourrait y avoir quelques surprises dans le cadre du contentieux électoral qui suivra les municipales de 2026, même si les juges ont déjà apporté pas mal de réponses à la suite des dernières élections ».
Mieux vaut donc être prudent, car une utilisation irrégulière des réseaux peut mener à l’annulation du scrutin par le juge électoral en cas de faible écart de voix. Et cela peut justifier une sanction financière de la part de la CNCCFP, qui peut réduire le montant du remboursement des dépenses électorales que le candidat percevra de l’État.
Le compte officiel de la ville
Concernant l’utilisation des comptes officiels des collectivités sur les réseaux sociaux, les choses semblent assez claires. Il faut veiller à ce que les moyens de la commune (ou de toute autre collectivité) ne soient pas utilisés pour faire la campagne des élus sortants, afin de garantir l’égalité entre tous les candidats. Évidemment, cela n’empêche pas les collectivités d’utiliser leur compte officiel, par exemple pour diffuser les décisions du conseil municipal ou toute information présentant un intérêt local.
Il reste toutefois une zone d’ombre concernant « le fait de savoir si la commune peut fermer l’espace commentaires », estime Maître Bluteau. « Il y a plusieurs opinions sur ce sujet. Selon moi, une collectivité peut fermer les commentaires sous ses publications, mais à condition de le faire pour tout le monde. C’est une solution radicale, mais qui permet de se simplifier la vie. Par contre, il n’est pas possible de fermer l’espace commentaires à seulement certains internautes. Je conseillerais également aux collectivités d’éviter de se mettre à modérer ou réguler les commentaires. Car il y a un risque de traiter différemment les différentes opinions, et ainsi d’accorder un avantage à la liste des élus sortants. Soit on ferme les commentaires pour tout le monde, soit on les laisse ouverts à toutes et tous ».
Le compte personnel du maire sortant
S’agissant de l’utilisation des comptes personnels des élus sortants, la situation est plus floue. Le candidat peut bien sûr disposer de son propre compte Facebook ou X, mais celui-ci doit être tout à fait distinct de celui de la collectivité. En fait, le compte utilisé par un candidat pour faire campagne ne doit pas pouvoir être confondu avec les comptes relevant de la communication institutionnelle (« commune de », « maire de », etc.). Et ce n’est pas toujours évident.
Ainsi, pour qu’un élu sortant puisse utiliser son compte personnel (souvent sous la forme @PrénomNom), utilisé de longue date, pour sa campagne, il faudra qu’il remplisse trois conditions, selon Philippe Bluteau. La première c’est « qu’il y ait une page officielle de la ville par ailleurs », indique l’avocat. La deuxième, c’est « que cette page personnelle soit, au vu des messages publiés par le passé, une page clairement personnelle, et pas une page institutionnelle ». Avec des messages sur la vie de l’individu, et pas uniquement sur la vie des institutions.
La troisième condition est mise en avant par la CNCCFP dans son guide à l’usage des candidats : c’est l’élu lui-même qui doit avoir alimenté le compte, et ce bien en amont de la période électorale. « L’utilisation de tels comptes pourrait constituer un concours prohibé d’une personne morale si l’audience de ces comptes résulte de communications institutionnelles financées par des moyens publics ou s’ils sont habituellement promus et animés aux moyens de fonds publics » (social média manager rémunéré par une collectivité par exemple), est-il précisé dans le document.
Dans une telle situation, « l’élu sortant va alors devoir ouvrir un nouveau compte, “Patrick Martin 2026” par exemple, spécialement dédié à sa campagne électorale, s’il veut échanger sur les réseaux sociaux », précise Philippe Bluteau.
Domaines juridiques








