Parmi les chantiers qui attendent notre pays, celui de la réforme des collectivités est incontournable. L’organisation actuelle repose sur un empilement de compétences, une dilution des responsabilités et un partage confus des financements. Elle génère inefficacité, gaspillage, tensions locales et une incompréhension croissante de nos concitoyens. Mais, au-delà de cette complexité, une inégalité est devenue inacceptable : celle de la répartition des ressources entre territoires. En 2025, mieux vaut être riche dans une ville riche que pauvre dans une ville pauvre.
J’ai été maire (UMP) de Montgeron (23 900 hab.) dans l’Essonne, où la fiscalité est parmi les plus élevées d’Ile-de-France. Non par mauvaise gestion – le budget par habitant y est 25 % inférieur à la moyenne –, mais parce que les recettes reposent quasi exclusivement sur les habitants, faute de tissu économique. A l’inverse, les grandes villes disposent de services publics de bon niveau, financés en partie par des ressources externes liées à la présence d’entreprises. Les habitants des premières paient plus pour avoir moins. Ceux des secondes, moins pour avoir plus. Où est la justice républicaine ?
Je préside aussi la communauté d’agglo Val d’Yerres Val de Seine (9 communes, 177 000 hab., Essonne), l’une des plus pauvres de France, et pourtant contributrice nette à un fonds de péréquation (le FNGIR) en faveur des métropoles riches, pour un montant supérieur aux impôts perçus sur les personnes physiques. Cette aberration résulte du maintien de garanties de ressources obsolètes. Résultat : les plus fragiles financent les plus riches.
En tant que président de l’Essonne, je constate les effets des choix de l’Etat. En 2015, François Hollande décidait de baisser de 25 % la dotation des départements. L’Essonne perdait 50 % de ses dotations. Depuis, la taxe d’habitation a été supprimée et les droits de mutation chutent. Nos ressources s’effondrent, nos charges augmentent. Hier, le développement d’un territoire était une chance. Aujourd’hui, c’est un coût. Cette situation alimente les frustrations locales et fragilise l’unité de la République.
Deux chantiers s’imposent. Le premier : clarifier les compétences. Une collectivité, une compétence, un financement clair. Les rapports d’Eric Woerth et de Boris Ravignon tracent des pistes. Le second : refondre la répartition des ressources. Chaque niveau de collectivité doit disposer de recettes cohérentes avec ses missions. Il faut aussi rétablir un lien entre citoyen et financement local, aujourd’hui rompu, notamment au niveau communal. Je propose qu’au-delà d’un seuil de 25 % au-dessus de la moyenne nationale, l’excédent des ressources d’une commune alimente un fonds commun pour les plus défavorisées afin de garantir un socle de services publics partout. Cette convergence doit être progressive, sur vingt ans. Quand certains proposent des voyages subventionnés à 50 % et que d’autres peinent à entretenir écoles et crèches, il faut repenser le contrat territorial.
Je propose un nouveau pacte entre les collectivités et la nation. Un pacte de clarté, de justice, d’efficacité. Car la République ne peut tolérer qu’un enfant n’ait pas les mêmes chances selon la commune où il grandit.
Thèmes abordés