Plus de 200 morts, c’est le terrible bilan des intempéries qui ont touché l’Espagne début novembre. En cause, le changement climatique, mais aussi, au vu de la colère des citoyens, des carences dans la gestion de la crise par les autorités locales et nationales.
Cette tragédie fait évidemment écho aux inondations survenues dans le Var. Et pousse à s’interroger sur la question de la gestion des crises dues aux inondations par les autorités publiques françaises.
Ce sujet est une préoccupation grandissante des élus, en particulier depuis la création de la compétence Gemapi (gestion des milieux aquatiques et prévention des inondations) qui a tenté de clarifier le degré de responsabilité de chacun. En effet, alors que cette compétence vise à cibler les responsables de la prévention des inondations, elle ne remet pas en cause les pouvoirs de police des maires et des préfets, qui, lors des crues, restent les autorités de référence pour alerter et déclencher l’intervention des secours. Cela suppose d’anticiper l’organisation entre les autorités compétentes pour gérer la crise au mieux. Il y a donc un premier hiatus : ceux qui sont censés prévenir ne sont pas ceux qui doivent donner l’alerte et organiser concrètement la gestion de la crise.
Une gestion efficace de la crise suppose aussi une information de la population en amont, par le biais, notamment, des outils réglementaires existants – PCS/PICS (plans communaux et intercommunaux de sauvegarde), Dicrim (document d’information communal sur les risques majeurs), plan Orsec –, et c’est aux maires et aux services de l’Etat de s’assurer que l’information circule et qu’elle est comprise. C’est là le deuxième hiatus : l’information est trop documentaire et administrative, et exclut le citoyen des exercices préventifs. Or, une information pertinente et ciblée ne peut être donnée que par un échange direct entre l’autorité chargée du risque et le citoyen.
L’information doit également être donnée au moment où la crise survient. Ici encore, les services de l’Etat et les maires sont en première ligne et doivent s’assurer d’employer les bons canaux (SMS, médias…) pour garantir l’efficacité de l’information et donner des consignes ciblées et compréhensibles. Pour être prêts en temps et en heure, il faudrait disposer de messages prépréparés selon le risque visé.
Il s’agit là de la troisième difficulté : un message trop général peut être dangereux. Ainsi, lors de la tempête Xynthia (en 2010), le message de la préfecture demandait à chacun de rester chez soi : dans les lieux soumis à submersion, il fallait au contraire conseiller de quitter à temps son domicile.
La gestion du risque inondation impliquant différentes autorités, nous devons impérativement nous coordonner en amont pour garantir à la population une information juste et efficace lorsqu’il s’agit de faire face au danger. Les enjeux liés à la multiplication des inondations et à leur intensité croissante doivent donc conduire à changer nos pratiques d’information, de coordination pour s’assurer de qui fait quoi très en amont de la crise. L’Espagne nous rappelle, une fois encore, l’urgence de cette mise en place.