Christian de la Guéronnière
Directeur d’Epiceum et président de La Suite dans les Idées
Jean-Daniel Lévy
Directeur délégué de Toluna Harris Interactive
Les citoyens sont avides d’informations locales. En moyenne, ils s’informent via 10,4 supports sur les 19 testés, soit une augmentation notable par rapport à nos précédentes enquêtes. Pourtant, pour une partie d’entre eux, l’information n’est pas suffisamment accessible. Cette attente formulée souligne la nécessité de multiplier les canaux de diffusion, tout en adoptant une approche proactive et personnalisée, pour faire arriver l’information « à la porte » ou « dans la poche » de chacun.
Dans ce contexte, le magazine papier des collectivités garde une place privilégiée : 69 % des Français expriment leur préférence pour un support distribué directement à domicile ; cette adhésion monte à 81 % chez les plus de 50 ans et à 79 % en zone rurale. Ce format, accessible sans connexion numérique, répond à un besoin d’immédiateté et d’intimité qui le rend incontournable, même à l’heure du numérique. Il est la traduction de la volonté de la collectivité d’aller vers les citoyens sans que ceux-ci n’aient à rechercher de l’information. En ceci, cette attitude est appréciée.
Le lien social au cœur de l’information locale
L’étude confirme un virage vers l’hyper-proximité. Le bouche-à-oreille est aujourd’hui le premier canal d’information locale (76 % des Français l’utilisent), traduisant un besoin de contact direct avec les acteurs locaux, que ce soit lors d’événements de quartier ou de rencontres avec les élus. Cette tendance révèle la valeur du lien humain dans la diffusion d’informations pertinentes et de confiance.
En parallèle, les réseaux sociaux, notamment chez les jeunes générations, prennent une importance croissante dans le relais des informations locales. En 2024, 58 % des Français suivent les pages de leurs collectivités (71% des moins de 35 ans), contre 25 % en 2013. Ces plateformes répondent à un besoin de réactivité et d’interactivité, complémentaire au lien social direct et aux supports traditionnels.
S’adapter pour une communication locale plus inclusive
Le baromètre montre une diversité marquée dans les attentes selon les générations et les zones géographiques. Par exemple, les 25-34 ans favorisent les réseaux sociaux (75 %) et l’intelligence artificielle (55 %), alors que les personnes plus âgées préfèrent les formats papiers. Cette hétérogénéité exige une stratégie multicanal, où chaque support est optimisé en fonction de ses atouts spécifiques : le papier pour sa fiabilité, le numérique pour sa rapidité, l’oralité pour sa capacité à créer du lien direct. Il s’agit ainsi de construire une communication universelle, adaptée aux pratiques de chacun.
Participation citoyenne : un levier à renforcer
L’enquête révèle également l’importance de la participation citoyenne dans la vie publique locale. Si 86 % des Français considèrent positivement les dispositifs participatifs, leur notoriété locale est en baisse, passant de 63 % en 2020 à 43 % en 2024. La connaissance de ces dispositifs reste inégale selon les niveaux d’instruction et les catégories socioprofessionnelles, indiquant un besoin de communication renforcée pour favoriser l’inclusivité. Pour renforcer l’adhésion, les dispositifs de participation doivent avant tout démontrer leur impact concret. Les collectivités doivent structurer leurs initiatives en montrant aux citoyens l’influence réelle de leur contribution et en diversifiant les formats pour inclure tous les publics.
Équilibrer le mix-média pour une information complète
L’histoire récente de la communication locale montre une transition vers une cohabitation équilibrée entre trois piliers : papier, numérique et oralité. Si le magazine des collectivités a longtemps dominé, le numérique et le bouche-à-oreille sont aujourd’hui des relais complémentaires, avec chacun leurs avantages. Le papier reste incontournable dans les petites communes, tandis que les supports numériques connaissent une croissance continue. Le bouche-à-oreille, quant à lui, incarne la proximité, en s’imposant comme la première source d’information pour 76 % des Français et ce quelle que soit la taille de la commune d’habitation.
La crédibilité, un atout à cultiver pour les collectivités
Un point fort de la communication publique est la confiance que lui accordent les citoyens. En 2024, 76 % des Français estiment fiable l’information locale provenant de sources officielles, comme les magazines, les sites web ou les comptes sur les réseaux sociaux des différents niveaux de collectivité. Cette crédibilité doit être cultivée et renforcée par des informations transparentes et utiles, qui facilitent la compréhension de l’action publique. Cela renforce le lien de confiance entre élus et habitants, encourageant ainsi une participation accrue à la vie de la cité.
Intelligence artificielle : potentiel et risques d’inégalités
Pour la première fois, le baromètre s’intéresse à l’intelligence artificielle dans les pratiques d’information locale, révélant des avis partagés. Si 55 % des jeunes adultes de 25-34 ans l’utilisent, elle reste peu accessible pour les générations plus âgées et les catégories socioprofessionnelles moins favorisées. Bien que l’IA offre des perspectives de personnalisation, elle peut accentuer les fractures sociales et générationnelles sans un accompagnement spécifique.
Renforcer la communication publique : un enjeu de démocratie de proximité
Dans un environnement où les citoyens sont sollicités par une surabondance d’informations, la communication publique a un rôle unique à jouer : elle doit être un service de proximité au cœur du lien social et un pilier de la démocratie locale. Aller vers les citoyens, en s’adaptant à leurs attentes et leurs préférences, est aujourd’hui un impératif pour garantir que l’information locale reste accessible, utile et engageante.
* Vous pouvez télécharger gratuitement le rapport intégral de l’étude sur le site www.barometrecomlocale.fr Cette enquête constitue la huitième vague du Baromètre de la communication locale, après les éditions de 2009, 2011, 2013, 2015, 2018, 2020 et 2022. Elle a été réalisée en ligne du 27 août au 5 septembre 2024 auprès d’un échantillon de 1 005 personnes, représentatif de la population française âgée de 18 ans et plus, selon la méthode des quotas et redressement appliqués aux variables suivantes : sexe, âge, catégorie socioprofessionnelle, région, niveau de diplôme et taille d’agglomération de l’interviewé.
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