L’eau potable abondante et bon marché n’est plus, la gestion « facile » de l’eau est révolue. C’est le constat que fait Simon Porcher, professeur des universités en sciences de gestion à Paris 2 – Panthéon-Assas. La moitié de la population mondiale est désormais exposée au manque d’eau et les tensions sur les usages explosent partout. Ces conflits cristallisent un sentiment d’appropriation, voire de confiscation, de l’eau par quelques-uns au détriment des autres, formant le socle de nouvelles politisations. C’est le cas, en France, des mobilisations contre les mégabassines, voire les méga-usines, les mégafermes, etc. « Parce que l’eau ne peut se réduire à de la matière ou de la tuyauterie, sa gestion est un laboratoire où s’invente la démocratie », estime Simon Porcher.
Ses travaux portent sur la gestion et la tarification des services publics de l’eau et de l’assainissement dans ce contexte de modification du grand cycle de l’eau et d’exacerbation des tensions pour l’accès à la ressource. Il a codirigé un ouvrage collectif, en anglais, sur les questions de gouvernance de l’eau dans le monde. Il dresse, dans son livre « La fin de l’eau ? », publié cette année chez Fayard, un état des lieux clinique des enjeux de gestion de l’eau. Les axes de travail qui nécessitent de changer de logiciel sont copieux : faire évoluer la manière de prendre les décisions sur l’eau, repenser le modèle économique des services d’eau, réorienter à bon escient la tarification, innover en matière de rémunération des opérateurs, décloisonner les politiques de l’eau, s’attaquer à la transition « bleue » de l’agriculture, rémunérer les services environnementaux des agriculteurs…
Vous qualifiez la gouvernance de l’eau de « faillite » institutionnelle et appelez à sa refondation. Pourquoi ?
On observe une multiplication des conflits autour de l’eau à mesure qu’elle se raréfie et que la compétition pour son usage s’intensifie. En France, la démocratie de l’eau est à parfaire.
Le changement climatique rend moins crédibles les institutions du passé. Les usagers les plus puissants utilisent ces instances pour défendre leurs intérêts. Quand l’urgence prend le pas sur le long terme, on tend à privilégier certains usages économiques ou à ne pas appliquer certaines sanctions au détriment de l’intérêt général.
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