Dans une note publiée le 5 mars, les analystes du département économie de France Stratégie se sont penchés sur la dynamique d’emploi à l’œuvre dans les zones d’emploi depuis la crise financière de 2008-2009. Avec un constat clair : un choc économique important, même dans une période courte, peut laisser des séquelles durables et qui s’accentuent au fil des années.
Entre 2007 et 2009, quelque 400 000 emplois salariés ont été perdus en France métropolitaine, de façon très disparate selon les zones d’emploi. Et si l’on comptait 13 ans plus tard un rebond de 700 000 emplois salariés, leur répartition géographique était tout aussi inégale. C’est ainsi qu’un tiers des zones d’emploi ont perdu plus de 3 % de leur emploi salarié pendant la crise et que la moitié n’avaient pas retrouvé fin 2019 leur niveau d’emploi salarié de 2007.
Dans le détail, moins d’un quart des zones ayant enregistré des pertes d’emploi salarié de plus de 3 % avaient retrouvé en 2019 leur niveau d’emploi d’avant-crise, contre 66 % pour les autres zones. « Les zones où l’emploi a fortement baissé pendant la crise (…) sont aussi celles qui avaient enregistré une croissance plus faible de l’emploi dans la période précédant la crise : en moyenne, l’emploi salarié y avait progressé de 1,2 % seulement entre 2002-2007, contre 5,2 % dans les autres zones », notent les auteurs de l’étude.
Décrochage de l’emploi non industriel
En 2020, les zones ayant subi de lourdes destructions d’emploi connaissaient un emploi inférieur de 4,5 % à celui qu’elles auraient enregistré sans le choc de la crise de 2008-2009. L’effet multiplicateur estimé est ainsi d’environ 1,6 : la perte d’un emploi pendant la crise financière se traduit en 1,6 emploi en moins en 2019.
Cette amplification pourrait s’expliquer par une dévitalisation du territoire à la suite de pertes massives d’emploi, qui entraînerait dans une spirale négative d’autres secteurs initialement épargnés.
Selon la note, ce mécanisme d’amplification au cours du temps relève d’un décrochage de l’emploi non-industriel. Un constat dont les pouvoirs publics devraient tirer quelques leçons. « Les interventions publiques en faveur des territoires en crise ne peuvent se cantonner à l’industrie. Les pertes d’emploi peuvent avoir lieu à bas-bruit dans le secteur non-industriel, dans de petites entités », relèvent les économistes de France Stratégie.
Zones dynamiques fortement freinées
Autre conclusion : une baisse d’emploi supérieur à 3 % semble impacter davantage les zones qui étaient jusque-là dynamiques. Malgré un retour de l’emploi plus rapide dans ces territoires, la crise a davantage affecté la trajectoire qui aurait été la leur sans choc économique. Leur dynamique apparaît en effet ralentie tout au long des cinq années qui ont suivi la crise.
Avec pour conséquence un effet démultiplicateur très élevé : un emploi perdu pendant la crise y équivaut à environ 2,5 emplois en moins en 2020 dans ces zones dynamiques. « C’est l’effet multiplicateur le plus élevé. Il semble que les zones dynamiques ont vu leur essor fortement freiné par la crise », concluent les auteurs de l’étude.
Comparativement à leur potentiel d’avant crise, ce sont d’ailleurs les zones dynamiques qui accusent le plus le coup. Seulement 33 % d’entre elles ont absorbé le choc de la crise, contre 50 % des zones qui étaient en perte de vitesse.
Références
Lire ici la note de France Stratégie "Quel rebond local après des pertes d'emplois massives "
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