La commission d’enquête sur les emprunts toxiques, présidée par Claude Bartolone (PS) et dont Jean-Pierre Gorges (UMP) était le rapporteur, a rendu son rapport public le 15 décembre dernier. Ses conclusions étaient très attendues après six mois de débat. Le principal enjeu était la désensibilisation des emprunts les plus toxiques, dont le rapport estime le montant à plus de 18 milliards d’euros. La piste évoquée concernant ce stock est la création d’un pôle d’assistance qui mutualise les emprunts afin de les traiter produit par produit et non par collectivité.
« Cette proposition nous convient dans l’état actuel des choses. Nous ne souhaitions pas qu’il soit fait appel à la solidarité de l’ensemble des collectivités. Partager la responsabilité entre les collectivités concernées et les banques me paraît raisonnable » affirme Philippe Laurent, vice-président de l’Association des maires de France (AMF).
« Tout le monde attend l’agence » – Le délégué général de l’Association des communautés urbaines de France (Acuf) Olivier Landel, quant à lui, regrette que la solution proposée ne comporte pas de volet juridique : « L’idée d’un pôle d’assistance est un concept que je défends depuis longtemps même si je pense qu’il faut assortir la renégociation d’une aide juridique, quand cela est nécessaire, afin que les actions soient menées de manière coordonnée. Quant à l’agence de financement, projet auquel le rapport déclare son soutien, tout le monde l’attend. Si cette agence avait existé, il n’y aurait pas eu d’emprunts toxiques. »
Le mécanisme de ce pôle laisse pourtant dubitatif Jean-Christophe Moraud, directeur général de l’Assemblée des départements de France (ADF) : « Dans le principe, il ne paraît pas illogique que les banques soient associées au partage des risques et des conséquences de ces prêts, notamment en raison de l’asymétrie de l’information. Reste la question du coût : dans la conjoncture, il est compliqué de faire accuser des pertes aux banques. »
Dans un tel contexte, les actions juridiques semblent plus efficaces que le projet de ce pôle d’assistance comme le pense Olivier Nys, directeur général des services de la ville de Reims et de Reims Métropole : « Les prises de positions juridiques fortes inciteront les banquiers à transiger plus que le rapport. D’ailleurs, on s’approche d’une jurisprudence que les banques redoutent car, si elle est favorable aux collectivités, la valeur de leurs produits va s’effondrer. Il est difficile d’imaginer que le droit n’accompagne pas le mouvement sociétal actuel qui remet en question les marchés et la financiarisation. »
Enfin, Olivier Régis, président délégué du Forum pour la gestion des villes et des collectivités territoriales estime que l’action du pôle est incomplète : « Au-delà de l’assistance, ce pôle devrait favoriser l’accès à la ressource et à sa valorisation. Sinon, il ne jouera que le rôle d’un hôpital de campagne. »
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Emprunts toxiques : comprendre l’engrenage
Sommaire du dossier
- Emprunts toxiques : comprendre l’engrenage
- Emprunts toxiques : « Nous exercerons une pression sur les banques » affirme Claude Bartolone
- Emprunts toxiques : décryptage des mesures proposées par la commission Bartolone
- Rapport Bartolone sur les emprunts toxiques : « Bien mais peut mieux faire »
- Avant-dernier acte de la commission d’enquête sur les emprunts toxiques
- La mécanique infernale des emprunts structurés
- Emprunts toxiques à l’hôpital : un outil à double tranchant
- Emprunts toxiques dans les petites communes : les banques présumées coupables
- Emprunts toxiques : le monde HLM relativement préservé
- Emprunts toxiques : les précisions de la Caisse des dépôts sur le futur cadre de financement des collectivités
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- Emprunts toxiques : la parole est à la défense
- Emprunts toxiques : Dexia, principal « accusé », entendu par les députés
- Emprunts toxiques : les experts éclairent le brouillard des produits structurés
- Emprunts toxiques : l’Etat invoque ses limites
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