Le retard pris dans la transcription de l’accord collectif national du 11 juillet 2023 sur la PSC des agents territoriaux suscite les inquiétudes de celles et ceux qui ont à le mettre en œuvre sur le terrain, d’autant que tout et son contraire se lit et s’entend actuellement.
Il nous semble donc essentiel de réaffirmer ici le fondement de cet accord et l’impératif de sa transposition au nom du dialogue social et de la décentralisation. À l’heure où certains peuvent s’interroger sur l’opportunité de cette réforme, il importe de partager collectivement la triple-réalité dans laquelle elle s’inscrit.
Rappelons tout d’abord que l’essence-même de la prévoyance, qui est au cœur de l’accord, est de protéger les agents contre les aléas de la vie et d’assumer pour les employeurs leurs responsabilités. En ce sens, en premier lieu, l’accord vient apporter une protection à des agents fortement exposés à la pénibilité et à l’usure professionnelles, et plus encore que dans les autres versants compte tenu des métiers qu’ils exercent et d’un âge moyen plus élevé.
En effet, pour mémoire, 3 agents territoriaux sur 4 appartiennent à la catégorie C et 1 sur 2 à la filière technique. Ces risques, renforcés par l’allongement des carrières induit par la réforme des retraites, appellent une réponse globale et cohérente, articulée autour de la réforme de la PSC et de la mise en place du futur fonds de prévention de l’usure professionnelle dans la FPT, que nous appelons de nos vœux.
Un dispositif commun, à adhésion obligatoire
Rappelons ensuite d’où nous partons : l’employeur ne peut participer au financement de la prévoyance que depuis 2011. Mais, depuis cette date, les agents sont encore trop nombreux à ne pas être couverts, même lorsque leur employeur leur propose une convention de participation. Ce sont autant d’agents qui sont exposés à la précarité au travers du basculement en demi-traitement.
Dans ces conditions, le fait que l’employeur soit obligé, à partir de 2025, de participer à la prévoyance à hauteur de 20 % minimum d’un panier de référence ne garantirait en aucun cas à lui seul une couverture effective de tous les agents.
C’est la raison pour laquelle, quelles que soient la strate de la collectivité et ses ressources, employeurs et organisations syndicales ont souhaité un dispositif commun, à adhésion obligatoire, qui protège les 1,9 million d’agents de la FPT, de tous statuts, de toutes catégories, de tous métiers et de tous âges. Ils ont également veillé ensemble à l’acceptabilité sociale de cette dépense en en partageant solidairement la charge entre employeur et agent.
Rappelons enfin la nécessité de faire valoir les spécificités du versant territorial alors que le débat se posait à l’échelle des trois versants. L’accord conclu pour les agents de l’Etat, désormais connu, repose essentiellement sur un renforcement des garanties statutaires.
Reconnaître les spécificités de la territoriale
Si les acteurs de la territoriale ne s’étaient pas saisis en amont du sujet et n’avaient pas engagé la négociation inédite qui a permis de conclure leur propre accord, ils se seraient vu imposer une transposition inadaptée à leurs réalités et leurs besoins.
Les employeurs auraient été mis en grande difficulté par le relèvement de garanties statutaires qu’ils peinent déjà à couvrir sur leur budget propre en cas d’auto-assurance ou à faire assurer dans un contexte de forte dégradation du marché, pour un niveau de protection inférieur en incapacité et invalidité. Et le modèle choisi dans la territoriale, consistant à cotiser sur la rémunération garantie, offre à tous une visibilité et une sécurité face au risque de précarité, et ce sur l’ensemble des éléments de rémunération de l’agent, indépendamment de son statut.
L’accord du 11 juillet 2023 n’a été rendu possible que grâce à la conviction partagée des employeurs territoriaux, des organisations syndicales, mais aussi du Gouvernement, que la protection des agents territoriaux contre les risques de la vie impliquait d’ouvrir un nouveau chapitre, propre à la territoriale. Il en va aussi bien de l’organisation de la couverture, du modèle de participation que de l’approche de la sinistralité pour construire des équilibres de protection entre générations, catégories et statuts et insuffler une nouvelle dynamique de prévention.
À la conclusion de cet accord, ses signataires, conscients de ces enjeux, appelaient l’ensemble des parties prenantes à relever le défi de sa mise en œuvre.
Malheureusement, plus de six mois après sa signature, sa transposition n’est toujours pas effective alors qu’elle l’est pour la fonction publique d’Etat par la loi de finances pour 2024, avec un accord pourtant signé postérieurement à celui de la territoriale.
Alors que la FPT fête ses 40 ans cette année, il appartient à chacun de lui conférer la place qu’elle mérite au sein de la fonction publique au vu des avancées qu’elle est capable de porter dans un dialogue social autonome.