Piloté par l’Agence nationale de l’habitat (Anah), le nouveau dispositif MaPrimAdapt’, destiné à entrer en vigueur au 1er janvier 2024, est directement issu des propositions du rapport dit « bien-vieillir » de Luc Broussy. MaPrimAdapt’ fusionne trois dispositifs : la prime « habiter facile » de l’Anah, le crédit d’impôt « adaptation » et l’aide de la Cnav allouée par les Carsat.
A ce regroupement des sources de financement s’ajoutent des objectifs quantitatifs nationaux et un budget revus largement à la hausse, afin d’accélérer le « virage domiciliaire » prenant en compte le vieillissement de la population, dans une logique de renforcement de la prévention.
Au-delà de ses aspects novateurs, MaPrimAdapt’ suscite deux remarques d’ordre plus général, liées d’une part aux représentations de la vieillesse et de la dépendance mises en perspective avec des données objectives, d’autre part au déficit persistant de connaissance des politiques des collectivités locales dans un domaine croisant habitat et médicosocial.
Se préparer au grand âge dès 60 ans
Le renforcement de la prévention, jugé prioritaire, semble se heurter aux résistances des ménages concernés. Se préparer au grand âge dès 60 ans est un programme qui peut laisser dubitatif les « jeunes seniors », bénéficiaires potentiels, dès ce cap fatidique franchi, de l’allocation personnalisée d’autonomie, de la carte senior SNCF ou de l’accès au club du troisième âge ! A 60 ans, pourtant, quatre ans de vie active se profilent à l’horizon, de grands enfants habitent parfois encore le domicile, les « vieux » parents requièrent de l’attention et on peut espérer avoir de nombreuses années en bonne santé devant soi, souvent accompagné d’une moitié sur qui compter !
Nul doute, dès lors, que l’adaptation préventive du logement à la perte d’autonomie peine à convaincre les foules, l’âge moyen des bénéficiaires d’une aide de l’Anah (plus de 80 ans) en attestant, à l’image d’une espérance de vie sans incapacité de 77,6 ans chez une femme de 65 ans en 2021. Ne pas adapter son logement avant d’en ressentir le besoin peut aussi être un vrai choix et 75 ans, plus que 60 ans, semblerait un âge mieux adapté à la délivrance de messages de prévention susceptibles d’être entendus.
L’aide nationale va bouleverser les équilibres locaux
Calquée sur le modèle de MaPrimRénov’, MaPrimAdapt’ va en outre modifier des dispositifs locaux, conçus à l’échelle départementale ou intercommunale. Encore une fois, la transformation d’une aide nationale va bouleverser les équilibres locaux, alors que 50 % des aides de l’Anah sont déléguées et que l’on aurait pu espérer, pour reprendre un terme à la mode, une « coconstruction » en amont articulée avec les engagements locaux.
Ceux-ci demeurent largement inconnus, le rapport d’activité 2022 de l’Anah sur « les politiques territorialisées » en matière d’autonomie restant muet à leur sujet, tout comme le rapport « Broussy » qui souligne que la question des aides à l’adaptation des départements « reste à creuser », faute de recensement exhaustif.
On aurait pu espérer que MaPrimAdapt’ soit une occasion d’une meilleure lecture des aides nationales articulées avec les aides locales, en fonction du profil des bénéficiaires et de la dimension préventive ou curative de l’adaptation. La connaissance de quelques « bonnes pratiques » à l’échelle locale ne saurait suffire.