Le débat ouvert depuis le 31 août par 7 réseaux d’initiatives publiques (RIP) face à l’Arcep et l’Etat est-il définitivement clos ? Parmi leurs propositions figurait la possibilité de construire des infrastructures en fibre optique à l’échelle départementale incluant les zones rentables, sans être exclu du Fonds national pour la société numérique issu du Grand Emprunt.
Par son avis du 19 octobre 2011, la Commission européenne tranche au moins sur un point : les modalités d’attribution des 750 millions d’euros (relevés à 900 millions d’euros depuis juillet 2011) proposés en soutien au Programme national très haut débit est conforme aux règles communautaires.
L’aide publique ne concernera donc que les territoires où les opérateurs privés n’auront fait aucune proposition d’investissement afin de ne pas les évincer des zones rentables.
Ce qui conforte le président de l’Arcep, Jean-Ludovic Silicani qui déclarait le 30 septembre dernier, lors d’une visite dans le département de La Manche (l’un des signataires du mémorandum d’Aurillac) au sujet des collectivités locales prêtes à s’engager : « Elles disposent pour cela d’une possibilité unique de participer, en tant qu’opérateur, au déploiement des réseaux FTTH. Ce statut, prévu par la loi depuis 2004, leur offre une très grande liberté d’intervention et de financement, limitée uniquement par l’impossibilité de subventionner des projets, au-delà de certaines limites, ce qui constituerait des aides d’Etat proscrites par le droit communautaire ».
Le service d’intérêt économique général comme alternative – Sans possibilité de recours aux aides d’Etat pour compléter leur financement, les RIP départementaux ne pourraient donc plus être opérateur du déploiement du très haut débit ?
Tout dépend, en fait, de la lecture que l’on fait de la réglementation européenne. « Cet avis est conforme aux règles qui régissent les aides d’Etat, mais n’a pas d’impact sur la capacité et la légitimité des collectivités locales à mettre en œuvre un projet intégré dans le cadre d’un service d’intérêt économique général (SIEG), qui lui a droit à une analyse différente selon les lignes directrices de la Commission européenne », commente Sophie Garnier, avocate du cabinet Sphère Publique, conseillère juridique de plusieurs RIP signataires du mémorandum.
Des SIEG à l’échelle départementale ont eu l’aval de la Commission européenne pour le haut débit dans le Limousin et les Pyrénées-Atlantiques et pour le très haut débit dans les Hauts-de-Seine. Ces services publics sont régis eux-mêmes par des règles de neutralité des réseaux et d’accès non discriminant aux opérateurs privés de services numériques.
Ils sont validés par la Commission européenne quand la preuve est faite qu’ils limitent la part de financement public.
Et Sophie Garnier d’ajouter : « Pour faire avancer le déploiement des réseaux très haut débit en fibre optique en France, chaque partie doit avoir une lecture positive des règles communautaires qui confortent le champ de compétence des collectivités territoriales ».
Une consultation publique est d’ailleurs lancée par la communauté européenne pour réviser les lignes directrices communautaire des règles relatives aux aides d’Etat dans le cadre du déploiement rapide des réseaux de communication à haut débit.
Plusieurs collectivités y ont déjà apporté leur contribution.
Un amorçage de 9,2 milliards d’euros pour des services numériques paneuropéens
Parallèlement, la Commission annonçait qu’elle ouvrirait en 2014 un guichet d’aides pour soutenir l’investissement dans des projets d’infrastructures de services numériques innovants partagés par plusieurs Etats membres, tels :
- les dorsales transeuropéennes à très grande vitesse pour les administrations publiques ;
- la fourniture transfrontalière de services administratifs et de santé en ligne ;
- l’accès aux informations du secteur public et à des services multilingues ;
- la certification dans toute l’Union de l’identification électronique (eID), afin que les particuliers et les entreprises puissent utiliser des services numériques dans n’importe quel Etat membre ;
- les marchés publics en ligne ;
- la simplification des procédures administratives nécessaires à la création d’une entreprise dans un autre pays de l’Union ;
- la coopération en vue de retirer les contenus illégaux de l’internet (pédopornographie, par exemple) ;
- la coordination des réactions aux menaces informatiques ;
- l’accès au patrimoine culturel européen (Europeana) ;
- le déploiement de solutions relevant des technologies de l’information et des communications pour les réseaux énergétiques intelligents et la fourniture de services énergétiques intelligents.