L’Anas avait accueilli, « entre soulagement et attentes », le rapport Bourguignon (1). Qu’en est-il du plan interministériel dévoilé le 21 octobre ?
Nous faisons une lecture du plan du point de vue des assistants de service social, qui représentent une faible part des travailleurs sociaux. Globalement, le plan semble avoir retenu plusieurs demandes et attentes des professionnels qui ont été consultés tout du long de la démarche des États généraux du travail social (EGTS). Nous concernant précisément, l’élévation au niveau licence de notre diplôme, ou, en direction du public, l’affirmation de l’importance de la participation des personnes accompagnées, sont des combats que nous portons depuis de nombreuses années. Néanmoins, beaucoup d’incertitudes demeurent sur les moyens qui seront alloués à l’ensemble de ces mesures. L’État ne peut pas tout. Comment les collectivités et les institutions vont-elles s’en emparer ? Les professionnels sont pour le décloisonnement et la participation des personnes accompagnées, ils essayent de le mettre en pratique quand leur employeur ne les en empêche pas, mais si les structures ne se réorganisent pas en fonction, ces intentions resteront lettre morte.
Le plan souhaite la mise en place d’un « premier accueil social inconditionnel de proximité ». Est-ce une bonne chose ?
Le concept de premier accueil fait partie de nos propositions. En revanche, le plan n’est pas assez précis sur « qui » assurera ce service. Loin de nous l’idée de dévaloriser le travail réalisé par les bénévoles, mais sont-ils les bonnes personnes pour accueillir ? La question de la formation se pose. On voit déjà, dans différentes structures, du personnel administratif placé à l’accueil qui n’est pas préparé à gérer les attentes des personnes en grande difficulté. Ce premier accueil s’appuierait sur la fonction de référent de parcours, ce qui pose la question du partage de l’information. Toutes les personnes susceptibles de remplir cette fonction seront-elles formées aux règles du partage d’information ?
Un corpus d’enseignement commun par niveau, correspondant à environ 30 % de la formation, est prévu. Cela vous inquiète-t-il ?
À l’Anas, nous avions dit « 30 % maximum ». Les ministères vont consulter le Conseil supérieur du travail social sur le contenu de ce corpus commun. Nous estimons avoir droit à la parole sur ces choix. Nous devons mettre en place un espace de réflexion commun entre professions concernées afin de préciser nos attentes. Le rapport évoque aussi des modules de spécialisation. L’Anas réaffirme la nécessité de garder des diplômes généralistes. Toujours sur la formation initiale, le plan envisage que les écoles soient habilitées à produire des diplômes universitaires. Les diplômes seront-ils les mêmes d’une région à l’autre ? Ne risque-t-on pas de voir se développer des formations de valeur inégale ?
Une intersyndicale (2) vient de lancer des États généraux alternatifs. Allez-vous vous y associer ?
Certainement. Les EGTS ont enclenché, voilà déjà deux ans et demi, une dynamique de réflexion et de production, également de consultation en réseau, qu’il faut entretenir. Les travailleurs sociaux ont démontré qu’ils étaient force de propositions. Le plan n’est qu’une réponse interministérielle, il ne doit pas être le point final de cette démarche !
Son parcours
Anne-Brigitte Cosson a été élue présidente de l’Anas le 21 mars 2014. Assistante sociale à la Carsat (caisse d’assurance retraite et de la santé au travail), elle anime depuis plusieurs années la section locale Anas du Finistère, où elle s’implique dans des actions collectives qui favorisent la participation des personnes accompagnées.
Thèmes abordés
Notes
Note 01 « Reconnaître et valoriser le travail social », Brigitte Bourguignon, septembre 2015. Retour au texte
Note 02 Intersyndicale CGT, FSU, Sud-Solidaires, FAFP, UNEF et le collectif Avenir Educs. Retour au texte