Cette fois l’Agence France Locale n’a plus qu’un simple pied dans la porte du marché de la dette locale, elle y est bien installée. Après six années d’exercice dans un contexte saturé de liquidité, elle a annoncé son premier excédent brut d’exploitation positif à 300 000 euros sur le premier semestre 2020.
Elle affiche un produit net bancaire de 6,1 M€ contre 4,9M€ au premier semestre 2019 pour une marge nette d’intérêt de 6,3 M€ (4,6 M€ un an avant), provenant notamment de ses revenus liés à son portefeuille de crédits (3,7 M€) et de ses revenus d’intérêts sur la dette et le collatéral (4,1 M€) mais obéré par une gestion de sa réserve de liquidité négative (-1,5 M€) « en raison des taux d’intérêts qui sont restés profondément ancrés en territoire négatif », note l’AFL dans son rapport financier.
Cet équilibre est presque total. En prenant compte le coût du risque lié aux modifications des pondérations des scénarios macro-économiques liées à la pandémie de 455 M€, le résultat net reste légèrement négatif à -24 000 euros, contre un million de moins à la même époque l’an dernier.
Changement d’échelle
Mais ce résultat brut d’exploitation positif est une bonne nouvelle pour cet acteur hétérodoxe dans ce marché de plus en plus concentré de la dette locale française car ses revenus générés par son activité seule hors résultats exceptionnels « couvrent désormais l’ensemble des charges d’exploitation ». En d’autres termes, l’AFL peut commencer à imaginer une stratégie de développement plus intense, malgré une place, selon le dernier observatoire de la dette locale de Finance Active, encore confidentielle de 5,3 % dans un marché dominé par les banques privées et marqué par la concentration de l’offre publique autour de la Banque Postale et la Banque des territoires-Caisses-des dépôts-SFILL.
L’AFL a ainsi franchi plusieurs paliers cette année, outre celui de l’équilibre financier. D’une part, grâce à un efficace travail de lobbying de la part notamment d’Olivier Landel, délégué général de l’AFL-Société Territoriale qui réunit les collectivités adhérentes et par ailleurs délégué général de France urbaine, un décret du 13 mai 2020, de la loi Engagement et Proximité du 27 décembre 2019 a élargi la base des entités éligibles à son adhésion notamment aux syndicats intercommunaux. Le périmètre était jusqu’ici limité aux communes, départements, régions, EPCI à fiscalité propre et établissements publics territoriaux (EPT). « Cet élargissement devrait faciliter la poursuite du renforcement du capital du groupe AFL, favorisant l’essor de ses activités » s’est félicité la banque.
Parallèlement, le conseil d’administration de l’AFL-ST a augmenté le seuil de capital initial que chaque nouvel adhérent doit apporter à 0,9 % de son encours de dette ou de 0,30 % de ses recettes réelles de fonctionnement, à partir du 1er janvier 2021.
En attendant la mise en application de ce seuil, l’AFL a procédé à trois augmentations de capital cette année. Les deux premières ont eu lieu durant le 1er semestre 2020 avec 17 nouveaux membres, portant le total des membres actionnaires à 369 au 30 juin 2020, contre 11 à sa création. Le capital libéré de l’AFL s’élevait à 151 M€ pour l’AFL compagnie financière et 159 M€ avec un capital promis à 181,3 M€ pour l’AFL-ST, avant qu’une 26e augmentation de capital ne soit décidée le 25 septembre dernier avec 5,5 M€ supplémentaires pour chacune de deux entités.
Faire sa place dans un marché stable mais incertain
Sa structure même est par ailleurs taillée pour la crise. Alors que quelques banques privées se détournent plus ou moins de ce marché liquide et stagnant depuis 2016 à 16 milliards de volume d’emprunts annuels pour monter enfin à 17,5 milliards cette année selon la Banque Postale, l’AFL qui n’a pas d’autres activités, apparait de plus en plus aux yeux des collectivités comme une alternative sécurisante. Ainsi malgré les incertitudes liées à la crise sanitaire, la banque revendique un modeste volume de crédits à moyen et long terme de 248 millions d’euros réalisé sur le premier semestre, mais en hausse de 82 millions d’euros par rapport à la même période l’an dernier. Auxquels il faut ajouter 53 millions de lignes de trésorerie.
Aussi, après des débuts mezzo voce et un peu à contrecourant d’un marché inondé de liquidité, la banque est désormais en position de faire valoir ses atouts principaux, l’indépendance et la garantie d’une diversification des sources de financement. Dans un contexte aussi incertain, ce sont des arguments qui peuvent porter.
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L'Agence de financement des collectivités se lance sur les marchés
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