Il n’est pas question de renoncer à la neutralité du net. C’est ce qu’affirme, en substance, un rapport très attendu publié par la Commission européenne, mardi 19 avril.
Dans ce texte, la Commission annonce qu’elle demandera à l’organe des régulateurs des communications électroniques (Orece) d’examiner les conditions qui garantissent un internet ouvert. Il s’agit notamment de s’assurer que les utilisateurs soient libres de changer d’opérateur ou que l’utilisation du réseau ne soit pas limitée. La Commission critique, par exemple, le fait que certains fournisseurs d’accès bloquent les services de voix sur IP, notamment utilisés pour les services de téléphonie sur Internet.
Bruxelles entend baliser l’adaptation en droit national des dispositions du «paquet télécoms», adopté fin 2009. Les 27 ont jusqu’au 25 mai pour achever cette transposition. Les résultats de l’enquête de l’Orece seront connus d’ici la fin de l’année.
« Si je ne suis pas satisfaite, je n’hésiterai pas à présenter des mesures plus strictes », a affirmé la commissaire en charge de la Stratégie numérique, Neelie Kroes. Elle a notamment évoqué la possibilité de mettre en place de nouvelles orientations ou des mesures législatives, si cela s’avère nécesssaire.
« Si cela ne devait pas suffire, je suis prête à interdire tout blocage de services et d’applications licites », a-t-elle ajouté.
Pour justifier ces mesures, Mme Kroes affirme qu’un internet qui ne serait pas « ouvert et neutre » contreviendrait aux principes de la concurrence « qui sont au cœur des nouvelles règles sur les télécommunications qui concernent la transparence, la qualité de service et la possibilité de changer aisément d’opérateur ».
« Refus de réguler » dénoncé – Un rapport accueilli avec « une grande circonspection » par l’eurodéputée Catherine Trautmann (PS – S&D), qui fut l’un des rapporteurs du « paquet télécoms » au Parlement européen. Le texte, « n’aborde de front aucune des questions qui sont au cœur du débat », poursuit l’ancienne ministre de la Culture dans un communiqué. Elle cite notamment la gestion de trafic ou les rapports d’interconnexion entre fournisseurs de contenus et opérateurs.
Ces manques provoqueront, selon Mme Trautmann, la naissance d’initiatives nationales qui « porteront nécessairement un coup à la cohérence du cadre réglementaire européen, et donc au marché unique numérique ».
« Neelie Kroes évite consciencieusement toute action concrète pour réguler les pratiques des fournisseurs d’accès discriminant le trafic de leurs abonnés », affirme pour sa part un communiqué de La Quadrature du Net.
« Mme Kroes se cache derrière de faux arguments libéraux pour ne pas agir, prétextant que les lois sur la concurrence et la consommation sont suffisantes pour résoudre le problème. Or, dans la plupart des États-membres, les opérateurs de téléphonie mobile s’entendent pour appliquer les mêmes mesures discriminatoires dans leurs offres de soi-disant « Internet mobile », ajoute le porte-parole du collectif, Jérémie Zimmermann.
Références
- Rapport de la Commission sur la neutralité du Net, Commission européenne
- Neutralité du Net : La Commission européenne lâche utilisateurs et innovateurs, La Quadrature du Net
- Enquete de l'Arcep sur la neutralité du net, Arcep, 2010
- Éléments de réflexion et premières orientations sur la neutralité de l’internet et des réseaux, Arcep, mai 2010
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