
Xavier Crouan, directeur de l’information et de l’innovation numérique de Rennes et sa communauté d’agglomération, et Karine Sabatier, directrice de la cantine numérique rennaise
Rennes, ville numĂ©rique ? A bien des Ă©gards, la capitale bretonne apparaĂ®t comme un territoire d’expĂ©rimentation privilĂ©giĂ©. Et ce n’est Ă©videmment pas un hasard si la ville et la communautĂ© d’agglomĂ©ration ont reçu, le 14 octobre, le TrophĂ©e europĂ©en de l’e-dĂ©mocratie pour leur dĂ©marche d’ouverture des donnĂ©es publiques. Rennes et Rennes mĂ©tropole sont en effet les premières en France Ă avoir initiĂ© une mise Ă disposition gratuite des donnĂ©es. Afin d’encourager la crĂ©ation de services innovants Ă partir de celles-ci, elles ont Ă©galement lancĂ© un concours d’idĂ©es (www.data.rennes-metropole.fr) dotĂ© de 50 000 euros.
Audacieux et pragmatique
A la base de notre dĂ©marche, il y a la conviction que l’intelligence ne se trouve pas uniquement dans les institutions, mais aussi chez les Ă©tudiants, les dĂ©veloppeurs, les entreprises, etc., souligne Xavier Crouan, directeur de l’information et de l’innovation numĂ©rique de la ville et sa communautĂ© d’agglomĂ©ration. Pas question, pour autant, de foncer tĂŞte baissĂ©e : Il faut ĂŞtre Ă la fois audacieux et pragmatique, et ne pas vouloir libĂ©rer 100 % des donnĂ©es immĂ©diatement, conseille-t-il.
Une telle dĂ©marche soulève en effet de nombreuses questions d’ordre juridique et Ă©conomique. Celle de la propriĂ©tĂ© des donnĂ©es est au cĹ“ur du sujet. Toutes les informations relevant d’une dĂ©lĂ©gation de service public (DSP) appartiennent Ă la collectivitĂ©. C’est le cas, ici, des donnĂ©es de transports (bus et mĂ©tro), libĂ©rĂ©es par le groupe Keolis. Les donnĂ©es du cadastre, en revanche, appartiennent Ă l’Etat.
Sur le plan juridique, nous travaillons avec l’Agence du patrimoine immatĂ©riel de l’Etat, dans le cadre de la loi du 17 juillet 1978. Pour chaque type de donnĂ©es, une analyse est effectuĂ©e afin de savoir qui en est effectivement propriĂ©taire. Nous ne pourrions pas mettre Ă disposition des informations qui ne nous appartiennent pas sans l’accord de leur propriĂ©taire, poursuit Xavier Crouan. Les retombĂ©es Ă©conomiques d’une telle initiative demeurent pour l’instant difficiles Ă mesurer.
A Rennes, pourtant, les porteurs du projet misent sur un rĂ©el retour sur investissement, en raison de l’engouement croissant pour les services gĂ©olocalisĂ©s accessibles par mobile. Des exemples Ă©trangers, notamment celui de la ville de Londres, montrent que la libĂ©ration des donnĂ©es numĂ©riques s’accompagne automatiquement d’une rĂ©elle dynamique entrepreneuriale autour de la crĂ©ation de services Ă valeur ajoutĂ©e.
Et l’image positive initiĂ©e par ce mouvement profite Ă plein au territoire. Rennes est ainsi très bien classĂ© par les Ă©tudiants du programme Erasmus, qui en apprĂ©cient Ă la fois la qualitĂ© de vie urbaine et la dynamique autour des services numĂ©riques, note Xavier Crouan. Selon lui, les retombĂ©es Ă©conomiques indirectes sont multiples. Ces nouveaux services facilitent la vie quotidienne des habitants et peuvent amĂ©liorer l’accessibilitĂ© du territoire, notamment en direction des personnes Ă mobilitĂ© rĂ©duite.
PĂ©pinière d’idĂ©es
VĂ©ritable laboratoire Ă l’Ă©chelle nationale, Rennes a bien conscience que les rĂ©sultats de son concours d’idĂ©es seront particulièrement commentĂ©s. Très active, la communautĂ© de dĂ©veloppeurs rennais, qui dispose depuis quelques jours d’une « cantine numĂ©rique », fourmille d’idĂ©es pour inventer de nouveaux usages (lire le tĂ©moignage ci-contre). La diffusion spectaculaire des smartphones devrait contribuer Ă accĂ©lĂ©rer leur appropriation. Un seul exemple : l’application « VĂ©lo Rennes », accessible gratuitement sur Iphone, permet de calculer un itinĂ©raire et de connaĂ®tre, en temps rĂ©el, la disponibilitĂ© des vĂ©los en libre service des diffĂ©rentes stations de la ville. C’est l’exploitant Keolis Rennes, propriĂ©taire de ces donnĂ©es, qui les a libĂ©rĂ©es il y a dĂ©jĂ plusieurs mois. Pour le plus grand bonheur des cyclistes connectĂ©s !
« S’appuyer sur la vitalitĂ© du tissu associatif local »
Karine Sabatier, directrice de la cantine numérique rennaise (lieu de rencontre et de mise en réseau des acteurs du numérique)
La dĂ©marche rennaise d’open data est un grand pas en avant dans la citoyennetĂ© numĂ©rique, Ă la fois courageuse et innovante. La thĂ©matique Ă©ditoriale de la cantine numĂ©rique, qui vient d’ouvrir ses portes, est le participatif Ă l’Ă©chelle de la mĂ©tropole. Nous sommes au cĹ“ur de la problĂ©matique ! Nous souhaitons inviter les communautĂ©s de dĂ©veloppeurs Ă se rapprocher, en nous appuyant sur la vitalitĂ© du tissu associatif rennais. Il s’agit d’ĂŞtre un lieu d’Ă©changes, de frottements, de confrontations d’idĂ©es. Nous souhaitons apporter un double Ă©clairage sur ces questions de partage des donnĂ©es : technique, pour aider les communautĂ©s Ă s’emparer du sujet, mais aussi grand public et citoyen pour donner la parole aux usagers et recueillir leurs attentes par rapport Ă des applications innovantes, en s’affranchissant de toute contrainte a priori.
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