Un coup de théâtre chasse un coup de théâtre… Alors que les trois députés UMP de la Marne, Benoist Apparu (maire de Châlons-en-Champagne), Arnaud Robinet (maire de Reims) et Catherine Vautrin (présidente de Reims Métropole), avaient réussi à faire adopter l’amendement n°826 au projet de loi relatif à la nouvelle organisation territoriale de la République, le gouvernement, qui y était hostile, a obtenu sa suppression la nuit suivante en recourant à un nouveau vote.
L’objectif de cet amendement était de permettre la constitution d’une métropole fusionnant les EPCI de Reims (Reims Métropole), de Châlons-en-Champagne (Cités en Champagne) et d’Epernay (communauté de communes d’Epernay Pays de Champagne). « Nous avons présenté cet amendement en profitant de la “jurisprudence brestoise”, puisque Brest métropole a été créée alors qu’elle compte moins de 400 000 habitants, ce qui serait aussi notre cas », explique Catherine Vautrin.
G10 puis G3
Cet opportunisme politique découle autant d’un contexte local particulier que d’une réflexion plus ancienne. Cela fait en effet une dizaine d’années que les trois villes planchent sur des formes de coopération élargie à l’ensemble de leur bassin de vie. C’est ainsi qu’est née l’idée d’un « G10 », ainsi nommé parce qu’il regroupe dix villes de la Marne, de l’Aisne et des Ardennes au sein d’une même association dont le point focal est l’agglomération rémoise. Plus récemment, on a vu apparaître la notion de « G3 », et même de « G4 », resserré autour des trois villes précitées. La fusion de leurs agences d’urbanisme et de leurs agences de développement a d’ores et déjà été actée.
L’actualité récente ravive aux yeux des élus locaux la nécessité de rapprocher leurs collectivités respectives. C’est tout l’argumentaire développé dans l’amendement présenté : la création de la grande région Alsace Champagne-Ardenne Lorraine crée un risque « d’aspiration vers Strasbourg d’un côté et vers Paris de l’autre » (Benoist Apparu), tandis que le retrait total de l’armée à Châlons-en-Champagne, qui coïncide avec la perte de son statut de préfecture de région, met en péril toute l’économie d’une ville basée sur la présence forte de l’administration. Bref, la création d’une nouvelle métropole permettrait de rééquilibrer le territoire au sein d’un espace déjà en proie à la désindustrialisation et à la baisse démographique.
Pôle métropolitain
Sauf que ce concept ne fait pas l’unanimité parmi les élus concernés. Initiateur du G10, le maire divers droite d’Epernay, Frank Leroy, plaide pour la création, dans un premier temps, d’un « pôle métropolitain » géré par un « syndicat mixte » plutôt que d’une métropole. L’élu sparnacien souligne en particulier « l’absence de continuité territoriale » entre les trois villes — celle-là même qui a rebuté le gouvernement —, et le risque de « cristalliser l’opposition des élus ruraux » en allant à marche forcée vers une intégration totale « en partant de rien ».
« Notre amendement ne permet pas de créer directement une métropole, rappelle la présidente de Reims Métropole, mais il crée les conditions d’un dialogue entre nos trois villes. Au demeurant, l’EPCI unique pourrait ne concerner dans un premier temps que Reims et Châlons. » Catherine Vautrin estime en tout cas que la partie n’est pas encore perdue, la navette parlementaire ne faisant que commencer, et que l’amendement a permis au moins d’attirer l’attention de la ministre de la Décentralisation sur la réalité territoriale champardennaise. « On va continuer à dialoguer avec le gouvernement », assure la députée marnaise.
Thèmes abordés
Régions