La guerre des capitales aura bien lieu en Normandie. Si jusqu’à présent, la fusion des deux régions ne semblait pas susciter de vifs débats, le choix de la future capitale administrative apparaît comme un point majeur de crispation. Yvon Robert, maire PS de Rouen, a lancé les hostilités lors de ses vœux à la presse le 15 janvier : “La capitale est Rouen, c’est évident”, a-t-il déclaré. Immédiatement, de nombreux élus bas-normands sont montés au créneau, dénonçant la volonté d’hégémonie de la métropole rouennaise et de l’actuelle région Haute-Normandie. En parallèle, un groupe Facebook s’est créé pour défendre la candidature caennaise.
S’il se défend aujourd’hui de vouloir polémiquer, sur le fond, l’édile rouennais n’en démord pas. « Il n’y a pas de débat », insiste-t-il. L’agglomération rouennaise est la plus peuplée de ce nouveau territoire, elle doit être capitale régionale à la manière de ce qui est en train de se faire pour l’ensemble des nouvelles régions. » Le maire de Rouen rejette catégoriquement toute « dérogation normande » : “Il ne peut y avoir deux capitales administratives, ça n’existe nulle part ailleurs.”
Répartition des fonctions métropolitaines
Une position de principe qui irrite Joël Bruneau, maire UMP de Caen. L’édile plaide pour une structuration du nouveau territoire en réseau, y compris en ce qui concerne la future capitale. “Rouen n’est pas une métropole régionale à vocation européenne comme peut l’être Bordeaux ou encore Lille”, argumente-t-il. Son idée serait plutôt de répartir les fonctions métropolitaines selon les spécificités des trois grandes agglomérations tout en évitant les doublons.
En cela, il se rapproche d’Edouard Philippe, le député-maire UMP du Havre. En retrait lors de la dernière passe d’armes entre ses homologues rouennais et caennais, il soutient, lui-aussi, une répartition pertinente des fonctions sur l’ensemble du territoire. « Tout concentrer à Rouen n’est pas la solution », assène-t-il. Il suggère, par exemple, que les services douaniers soient regroupés au Havre compte tenu du poids du port du Havre en termes de recettes. « Répartir les services publics sur tout le territoire est une bonne chose, abonde Yvon Robert. En revanche, les fonctions de directions doivent être regroupées au même endroit. » Pas question, selon lui, d’envisager de séparer l’implantation géographique de la préfecture et celle de l’hôtel de région.
Cette hypothèse avait notamment été avancée par Laurent Fabius, l’homme fort du Parti socialiste dans la région. Plus récemment, elle a été soulevée par les membres des conseils économiques et sociaux des deux régions (Ceser). « Il ne s’agit pas de troquer telle implantation contre une autre », estime pour sa part Joël Bruneau. Selon lui, la réflexion doit s’engager pour aboutir à “une répartition globale, équilibrée et équitable”.
Malgré les prises de position des uns et des autres, pour le moment, rien n’est encore tranché. Selon la loi portant sur la fusion des régions, le gouvernement doit décider d’un chef lieu provisoire avant la fin de l’année 2015. Dans un second temps, l’ assemblée régionale aura à se prononcer à la majorité des 3/5ème. « La prochaine campagne pour les élections régionales devrait permettre de clarifier les choses », juge Edouard Philippe. Le sujet – explosif – de la capitale y occupera, sans nul doute, une grande partie des débats…
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