Dès ses premiers pas, en 2008, à la tête du conseil général de la Corrèze, François Hollande se forge une conviction : la collectivité départementale, dans sa forme actuelle, est à bout de course. A ses yeux, le canton, y compris en milieu rural, n’a plus guère de sens. Le financement des allocations sociales mène le conseil général à la ruine, puis à la mort. Lors de la campagne de 2012, le candidat Hollande évoque la suppression des départements… mezzo voce.
Ballons d’essai – Arrivé au pouvoir, il fait preuve de la même prudence de sioux. Son parti domine la plupart des conseils généraux. Le département est inscrit dans la Constitution. Il peut être dévitalisé, en aucun cas éradiqué.
Fidèle aux préconisations du think tank Terra nova, l’exécutif place les métropoles « au cœur de l’organisation territoriale ». Ces grands ensembles urbains et mondialisés sont destinés à absorber l’antique conseil général… à terme. Ailleurs aussi, les intercommunalités ont vocation à prendre le dessus. Mais pas tout de suite.
Bombardé à Matignon en 2014, Manuel Valls accélère le tempo. L’ancien maire d’Evry, enfant de la deuxième gauche antijacobine, n’entend rien au conseil général. Chantre du socialisme de l’offre, il ne veut plus de ce guichet d’aides sociales, cette collectivité qui ressemble tant à un démembrement de l’Etat. « Le conseil général a vécu », surenchérit François Hollande. A coup sûr, la plus belle prophétie autoréalisatrice de l’année qui s’achève.
Car le pouvoir ne se donne pas les moyens de ses ambitions. Il refuse de mettre devant ses responsabilités une UMP acquise à la fusion département- région. De majorité d’idées, il n’y aura pas. François Hollande et Manuel Valls écartent toute révision constitutionnelle, seul moyen pourtant d’en finir avec la collectivité honnie.
Boulimie – Ragaillardis par leur succès aux sénatoriales, les présidents de conseil général relèvent la tête. A la Haute Assemblée, en commission des lois, ils viennent d’obtenir le scalp du transfert des collèges, des routes et des transports scolaires aux régions. Toutes ces attributions, ils entendent les conserver.
Leur chef de file, Claudy Lebreton (PS), lorgne même la responsabilité pleine et entière des services départementaux d’incendie et de secours. Avec tous les coûts que cela implique. A force de se montrer gourmands, les présidents de département pourraient bien renouveler leur erreur historique de 2004. Déjà menacés dans leur existence, ils avaient réclamé et, naturellement, obtenu quantité d’onéreuses compétences. Un choix directement à l’origine de leurs tourments financiers présents.
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