L’année 2025 marque probablement un basculement de notre rapport au numérique. Des tendances déjà fortement perceptibles ont convergé brutalement : nous sommes exposés désormais à de nouvelles vulnérabilités numériques qui fragilisent notre démocratie. L’évolution fulgurante des technologies et le développement de l’intelligence artificielle posent des défis inédits, exacerbant les inégalités et créant un sentiment diffus de souffrance numérique. Face à cette réalité, les collectivités locales, qui sont l’échelon de la proximité, ont un rôle essentiel à jouer.
Aujourd’hui, les vulnérabilités numériques ont changé de visage. Au-delà de l’accès aux services en ligne, elles englobent désormais le phishing, la désinformation, la difficulté à discerner le vrai du faux et la nécessité de maîtriser constamment de nouveaux usages. Face à ces défis, de nombreux citoyens – étudiants, actifs, retraités – se sentent dépassés, inadaptés, voire exclus.
Sur le terrain, les actions concrètes sont nombreuses et essentielles. Dans de nombreuses communes, les ateliers numériques ouverts à tous permettent d’acquérir les compétences de base : création d’une adresse électronique, navigation sur internet, utilisation des services publics en ligne.
Les espaces France Services et les médiathèques proposent des permanences avec des médiateurs numériques formés pour accompagner pas à pas les usagers dans leurs démarches. La formation des agents d’accueil est également cruciale. Ces agents, en première ligne, doivent pouvoir répondre au premier niveau de questions des usagers. L’action des conseillers numériques est en ce sens fondamentale et rien ne justifierait de remettre en cause ce dispositif.
Toucher ceux qui n’osent pas demander
À Bordeaux Métropole aussi, nous faisons le choix d’un « numérique choisi et non subi ». Notre Observatoire métropolitain des inégalités numériques a révélé que 75 % des habitants sont amenés à être des aidants numériques pour leurs proches.
Notre enquête « Regards sur la souffrance numérique » témoigne de la profondeur, souvent méconnue, de cette souffrance. Il ne s’agit pas seulement d’inclusion numérique, mais bien de droits numériques – donc de droits de l’Homme. Enfin, notre Conseil de Développement (C2D) travaille sur la question de la santé mentale, une vulnérabilité grandissante induite par le développement du numérique.
Nous mesurons toute l’importance des initiatives ciblées : sensibilisation aux questions éthiques dans les écoles, ateliers de développement de l’esprit critique face aux fake news, sessions sur la protection des données et le droit à l’oubli, accompagnement à la parentalité numérique, ou encore actions de prévention contre le cyberharcèlement. Tout ceci dans un esprit « d’aller vers », pour toucher ceux qui n’osent pas demander.
Mais face à l’ampleur des défis, les actions isolées ne suffisent pas. Nous devons unir nos forces pour défendre une société démocratique en mettant en œuvre activement les droits et principes énoncés dans la Déclaration Européenne pour les droits et principes numérique adoptée en décembre 2022.
J’appelle donc tous les élus locaux à se mobiliser sur le terrain, à partager leurs bonnes pratiques et à rejoindre la Coalition des villes pour les droits numériques. Ce réseau international, qui compte déjà plus de 60 villes engagées, œuvre pour inscrire les droits numériques éthiques et inclusifs à l’agenda mondial.
La mobilisation des villes, en coopération avec leurs territoires voisins, confirmera s’il en était besoin, qu’en travaillant au plus près des besoins des personnes, en écoutant et en agissant, nous donnons à l’action locale la force de l’Universel.
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