Lancé en 2023, le transfert du label de la DGE à Atout France a été effectif seulement en mai 2024. Comment interprétez-vous cette transition houleuse ?
C’était une décision prise par une ministre [Olivia Grégoire, nldr, alors ministre déléguée chargée du Tourisme], il faut « faire avec ». La transition entre les services n’est jamais simple, certains veulent se débarrasser et imposer à d’autres, sans concertation ni travail préalable. Un changement imposé, sans donner les moyens financiers et humains, suscite plutôt de la réticence, mais c’est passé. Dans les faits, cela se passe bien.
Qu’entendez-vous par l’absence de moyens ?
Deux personnes à la DGE s’en occupait, Atout France ne les a pas récupéré, son service classement, qui a récupéré le label, doit faire à effectifs constants. En revanche, Atout France a une convention avec ATH pour disposer d’un ETP. Il y a juste eu un marché public pour la co-gestion technique du label, nous étions les seuls à pouvoir y répondre avec ADN Tourisme.
Quel bilan tirez-vous de cette initiative après une vingtaine d’années d’existence ?
Il a fait progresser l’accessibilité, en suscitant une prise de conscience. Il y a quelques années, quand on en parlait de l’accessibilité, c’était “cause toujours”. Maintenant, ce sont les prestataires qui viennent vers nous. C’est donc positif, même si la labellisation peut prendre du temps et qu’il faut aussi trouver les financements. La France reste toutefois très en retard par rapport à la loi de 2005 sur le handicap, l’ensemble des collectivités ont traîné.
Quels freins identifiez-vous au déploiement du label ? Que faudrait-il faire pour l’accélérer ?
Déjà, continuer à être pédagogue. Et puis il y a la question des financements. Il existe un fonds Accessibilité [ndlr] mais la complexité administrative de la France reste un problème, cela démobilise les personnes. Il faudrait pouvoir les aider de manière efficace et simple, surtout sur le handicap, qui est un sujet complexe. Il faudrait davantage de référents handicaps compétents, capables de motiver et de trouver des solutions de financement pour les cas particuliers. On commence à en voir, par exemple à Lyon. [voir notre article]
Y a-t-il des pays qui sont beaucoup plus en avance et pour quelles raisons ?
Certains ont fait évoluer les mentalités, ce qui n’est pas encore le cas en France. Les pays nordiques ont intégré l’accessibilité par exemple, rien ne se fait sans la prendre en compte. Les Espagnols sont aussi très bons. En France, on y pense après coup. Des structures ouvrent, qui ne sont pourtant pas accessibles, alors que depuis 2007, les nouveaux Etablissements recevant du public (ERP) ont l’obligation d’être accessibles à tous les handicapés.
Certains handicaps sont-ils des parents pauvres de l’accessibilité ?
Le handicap auditif car il est invisible. Mais celui qui nous demandé le plus de travail, c’est le handicap visuel. Certains non voyants se déplacent seuls, l’accueil des animaux est obligatoire mais certains ne le savent pas.
Dans quelle mesure le contexte institutionnel est-il gênant ?
Beaucoup d’administrations sont bloquées pour des raisons budgétaires, il n’y a pas de décisions qui peuvent être prises. C’est un frein pour faire un certain nombre d’actions de promotions. Il y a également de l’incertitude dans les collectivités sur les ETP.
Est-il nécessaire d’être une grande collectivité pour faire avancer la cause ? Et la couleur politique joue-t-elle ?
Non, c’est une question de volonté. De petites communes font de super choses, par exemple celles de la côte de Nacre, c’est une question de dynamisme avec le maire ou l’office du tourisme. Et la couleur politique ne joue pas non plus.
Quelles évolutions aimeriez-vous apporter au label ? Certains le trouvent complexe, y a-t-il un enjeu à le simplifier ?
Il n’y a pas d’enjeu à le simplifier, il compile les critères de la loi et ceux nécessaires pour profiter de la structure touristique, les critères de confort. La labellisation peut prendre deux ans mais c’est une démarche enrichissante qui fédère les équipes autour de ce projet commun.
En revanche, nous voulons améliorer l’information et l’accessibilité des sites internet, qui servent beaucoup de support pour préparer les voyages. Il arrive régulièrement que des structures touristiques aient le label mais que cette information ne soit pas mise en valeur sur les sites, ni les réseaux sociaux ! Quant à l’accessibilité, de nombreux sites ne sont pas encore conformes au référentiel général d’amélioration de l’accessibilité (RGAA), alors que la deadline est en 2030, c’est demain.