Qu’apporte votre mission aux nombreux travaux qui ont été menés jusqu’ici sur les spécificités des zones rurales et leur avenir ?
Je connais bien la situation des zones rurales, du fait de mes mandats de député de Lozère et de rapporteur de la commission des communes rurales de l’Association des maires de France. Mais il y avait certains points qui méritaient, de mon point de vue comme de celui des trois autres membres de la mission, d’être creusés, ce qui nécessitait la création d’une mission. Grâce à ce cadre, nous avons pu parcourir le pays et rencontrer l’ensemble des acteurs du monde rural, mais surtout nous avons obtenu le droit d’investiguer dans le système administratif qui est un foyer de blocages divers dans lequel personne n’a mis le nez jusque là.
Quels enseignements tirez-vous de vos observations ?
Deux blocs coexistent sans communiquer dans les territoires ruraux : d’une part, le monde politico-administratif et d’autre part, le monde de la société civile. Il faut savoir que le territoire français est régi par 8.000 lois, 400.000 normes et encore des circulaires et des directives. Paradoxalement, cette situation crée une insécurité juridique qui est encore plus criante en zone rurale, du fait du dimensionnement des services : le principe de précaution pousse les administratifs à rejeter les projets qui leur sont présentés au moindre écart perçu entre le projet et les textes en vigueur. Et c’est comme cela que le monde rural se trouve figé par un système enrayé que plus personne ne maîtrise.
Que proposez-vous ?
Le rapport sera juridiquement et administrativement décoiffant ! La révision générale des politiques publiques (RGPP) a privé les préfets de département de leur pouvoir d’arbitrage et de décision. Ces derniers ont également été dépossédés de la matière grise qui les entourait. Le politique doit reprendre les choses en main. Le prochain président doit s’engager sur un principe de mesure qui suppose que l’on n’applique pas la norme de la même façon en zone rurale et en zone urbaine. Prenons l’exemple d’un petit hôtel coincé au fond de gorges. Doit-il nécessairement se voir imposer la même norme rigide qu’un hôtel classique en ville ? Il nous semble qu’une souplesse salutaire pourrait être requise. Un médiateur pourrait également être saisi par les élus lorsqu’une décision administrative leur parait inique. Son avis ne s’imposerait pas aux services de l’Etat, mais pourrait détendre des situations en apportant un nouveau point de vue.
Nous proposons aussi de réunir Etat, conseil général et collectivités au sein de groupements d’intérêt public qui apporteraient leur expertise sur les questions relatives à l’eau, la voirie, etc. de sorte que les plus petites communes pourraient trouver là des conseils avisés et gratuits.
En outre, 3.000 relais de service public devraient ouvrir dans les villes-centre des intercommunalités rurales afin de régler le plus grand nombre des problèmes rencontrés par les administrés.
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